En 1960, je commençai à travailler pour la NASA dans le programme chargé d’étudier les conséquences épidémiologiques de la vie éventuelle sur Mars. Le Rabbi se montrait très, très intéressé par le travail que j’effectuais. Quand je le rencontrai la première fois, il me demanda si je connaissais la signification du concept «Providence Divine» tel que l’expliquait le Baal Chem Tov, le fondateur du mouvement ‘hassidique au 18ème siècle.

Je répondis que je connaissais cette notion : rien de ce qu’un Juif voit ou entend n’est en vain ; tout est prévu par D.ieu afin de vous rapprocher de la Torah et de D.ieu. Rien n’est inutile. Le Rabbi ajouta : «Si ceci est vrai pour n’importe qui, ce l’est encore davantage pour celui qui explore la stratosphère ou qui recherche la vie sur Mars ou qui travaille dans un laboratoire pour surveiller les épidémies ou qui voyage dans le monde entier et rencontre tant de gens. Vous avez certainement une foule d’anecdotes qui toutes démontrent la Providence Divine. Vous devriez garder un journal de toutes ces histoires et événements pour les analyser par la suite et voir quelles leçons en tirer. Et si vous n’y parvenez pas tout seul, apportez-les-moi et je vous aiderai ! »

Je suivis son conseil. Et, aujourd’hui, je dispose d’un journal avec des centaines d’histoires que j’espère un jour diffuser largement.

A l’époque – on était au début des années 70 – quand on apprit que je travaillais avec la NASA et que je recherchais des traces de vie sur Mars, certains Juifs pratiquants me le reprochèrent : «C’est contraire à la Torah !». J’avais déjà commencé à me rapprocher du judaïsme et leurs remarques me troublèrent : peut-être devais-je arrêter ces recherches… J’en parlais au Rabbi qui réfléchit et répondit : «Vous devez chercher la vie sur Mars et continuer de chercher la vie sur Mars. Si vous ne trouvez pas, alors cherchez ailleurs et ne cessez pas de chercher parce qu’être assis dans ce monde et prétendre qu’il n’existe pas de vie ailleurs signifie poser des limites à ce que D.ieu peut faire. Et personne ne peut faire cela !». Il me demanda ensuite s’il pouvait lire certains de mes rapports à la NASA tout en ajoutant : «S’ils ne sont pas classés Secret Défense !». Je déclarai que je pouvais lui transmettre de nombreux documents déclassifiés mais m’étonnai : «Pourquoi le Rabbi voudrait-il lire tout cela ? Je veux dire, ce ne sont que des préliminaires, nous n’avons pas encore été sur Mars. Nous n’établissons que des projections pour un voyage sur Mars et ce n’est que de la simple bactériologie, ce n’est pas très intéressant…». Le Rabbi répondit : «Laissez-moi décider !».

Je promis mais, au bout de quelques mois, je n’avais toujours rien envoyé au Rabbi. Un jour, alors que je me trouvais à New York, j’en profitai pour prier Min’ha dans la synagogue du Rabbi. Le Rabbi m’aperçut bien que je me fus mis de côté et m’appela : «Vous m’aviez promis…». Je répondis que je pensais que le Rabbi était trop occupé pour cela mais il insista : «N’ayez pas pitié de moi ! Envoyez-moi les rapports !».

De retour à la maison, je préparai une pile de documents déclassifiés – trois ou quatre épais classeurs - et les envoyai au Rabbi. C’était des descriptions de ce que nous estimions à l’époque être l’environnement sur Mars, d’après les prises de vues envoyées par les sondes spatiales : nous cherchions à récupérer des échantillons de poussière de la planète Mars pour y détecter d’éventuels microbes vivants. C’était un travail de laboratoire : un grand nombre de microbiologistes travaillaient pour moi, écrivant des centaines de notes que nous envoyons à la NASA mais ce n’était que des spéculations.

Lors de ma rencontre suivante avec le Rabbi, il remarqua : «Je voudrais attirer votre attention sur un passage ; il est évident que je ne comprends pas votre travail mais il semble que vous écriviez à un endroit (il nomma la page du volume) que ces bactéries s’y développeraient et, à un autre endroit, qu’elles ne le pourraient pas !».

Je promis de vérifier et, effectivement, il y avait une contradiction flagrante !

Un an plus tard, je revis le Rabbi et le remerciai de m’avoir signalé ce qui n’était finalement qu’une erreur de typographie. Il me remercia : «Je n’aime pas les contradictions dans le domaine scientifique. Mais si vous dites que ce n’est qu’une erreur, alors je me sens mieux !».

Par la suite, il me demanda de plus en plus de rapports et, un jour, je m’enhardis : «On dit que le Rabbi possède Roua’h Hakodech, une inspiration divine ; alors pourquoi le Rabbi me demande davantage de rapports ? Ne sait-il pas ce qui se passe ?». Si des ‘Hassidim s’étaient trouvé avec moi dans la pièce, ils m’auraient frappé pour une telle insolence. Mais le Rabbi se contenta de sourire et conclut : «Si les gens parlent, qu’ils parlent. Mais de vous, j’exige des rapports !»

Dr Velvel Green – www.chabad.org

Traduit par Feiga Lubecki