En ce qui me concerne, le Mouvement de libération de la femme juive a été initié par le Rabbi.

Quand, enfant, j’habitais dans le quartier ‘hassidique de Williamsburg, à Brooklyn, qu’y avait-il de prévu pour les jeunes filles ? Si un Rabbi tenait un rassemblement pour hommes, les filles ne s’y rendaient pas, quelle que soit la communauté à laquelle elles appartenaient.

C’est le mouvement Loubavitch, sous la direction du Rabbi, qui a été le premier à prendre des initiatives en ce sens alors que la plupart des gens ne comprenaient pas la révolution qui se mettait en marche.

Les femmes Loubavitch ont été libérées bien avant les autres et nous n’avons même pas eu besoin de combattre pour cela. Le Rabbi combattait pour nous et nous mettait sur un piédestal et nous n’avons même pas eu besoin de demander un piédestal.

Il est évident que le Rabbi anticipait les défis que devraient affronter les femmes juives de notre époque. Il réalisait que si les femmes ne s’impliquaient pas dans le judaïsme, elles s’impliqueraient dans d’autres domaines.

Quand le Rabbi envoya des émissaires répandre le judaïsme dans le monde, il n’envoyait pas un mari et sa femme, il envoyait un couple et confiait à chacun des deux une mission à accomplir.

Mon mari et moi-même avons été envoyés à Milan en Italie en 1958, quand il n’y avait aucune vie juive organisée digne de ce nom. Mon mari avait toujours envie de retourner à New York pour prendre conseil auprès du Rabbi.

Je me souviens du jour où mon mari obtint finalement du Rabbi la permission de voyager : nous avions envoyé un télégramme au Rabbi – à l’époque tout se passait par télégrammes – et nous avons reçu une réponse du secrétaire du Rabbi : «Si votre épouse est totalement d’accord avec votre souhait et que vous êtes sûr d’obtenir un visa pour retourner en Italie, alors vous pouvez venir à New York !».

Quand mon mari arriva à New York, il eut un entretien avec le Rabbi qui, entre autres, lui demanda quelque chose de très intéressant ou, plutôt, de très étrange : le Rabbi lui demanda de mettre par écrit la relation que nous avions ensemble. Je suppose que le Rabbi était étonné qu’un jeune homme originaire de Russie (comme mon mari) et une jeune fille originaire des États-Unis (comme moi) puissent bien s’entendre. Avec le défi supplémentaire d’être envoyé en Chli’hout, en mission dans un pays étranger dont la langue nous était inconnue.

Bien sûr, mon mari écrivit au Rabbi et ne manqua pas d’ajouter au passage des compliments sur moi. A la fin de son texte, il s’excusait presque : «Je n’aurais peut-être pas dû être aussi prolixe en décrivant ses qualités !». Quand le Rabbi lut cela, il barra les mots «ne pas» et souligna le mot «prolixe» avant de rendre la «rédaction» à mon mari.

Telle était l’attitude du Rabbi.

Venons-en à la suite : avant que mon mari ne rentre à la maison, il décida de m’acheter quelques gâteaux à la crème, sachant combien je les appréciais, surtout qu’il n’y avait pas encore de pâtisserie cachère à Milan.

Puis Rav Hodakov, le secrétaire personnel du Rabbi, l’appela : «Vas-tu acheter un cadeau à ton épouse ?»

- Oui, bien sûr ! répondit-il.

- De quoi s’agit-il ?

- Je lui ai acheté des gâteaux.

- Elle appréciera les gâteaux mais ce n’est pas un cadeau ! Tu dois lui acheter quelque chose en or !

Ils se mirent d’accord sur une montre en or. Rav Simpson – qui se lançait dans la bijouterie à ce moment-là – fut appelé à la rescousse ; il apporta tout un choix de montres. Mon mari, Rav Hodakov et, si je ne me trompe pas, Rav Groner également examinèrent les différentes montres pour décider laquelle ferait l’affaire. Finalement, Rav Hodakov prit tout le plateau de montres pour demander l’opinion du Rabbi !

Le Rabbi prit son temps pour décider et déclara : «S’il y a le temps, il faudrait prendre ce bracelet et l’attacher à ce cadran ; s’il n’y a pas de temps, il faut choisir cette montre !»

Puis le Rabbi prit un Ma’hzor (livre de prières des jours de fêtes) qui venait d’être publié et annonça : «Et ceci est mon cadeau pour elle !»

De nombreuses années ont passé avant que je ne raconte cette histoire en public et, avant de le faire, j’en ai demandé la permission à mes enfants. Vous savez, les enfants sont parfois embarrassés quand les parents racontent en public ce qui se passe dans la famille…

Certains de mes enfants étaient déjà mariés et ils répondirent à l’unanimité : «Maman ! Tu dois raconter cette histoire ! Combien de fois sommes-nous si impliqués dans notre travail communautaire que nous en oublions que notre relation avec notre conjoint est fondamentale, même et surtout pour tout ce que nous devons accomplir ensemble dans la communauté !»

Une bonne relation entre époux est essentielle, pour la maison bien sûr mais aussi pour l’extérieur. La compréhension, l’amour, le respect, la considération que les époux doivent avoir l’un envers l’autre quand ils sont en Chli’hout doivent être bien plus importants que s’ils n’étaient pas des émissaires du Rabbi.

En y réfléchissant, je ne pense pas que le message du Rabbi à moi et mon mari était d’ordre privé. Je pense plutôt que je devais montrer l’exemple. Racontez-moi quelle relation vous avez l’un envers l’autre et je vous dirais quel genre de succès vous pouvez espérer dans tous les domaines de votre vie !

Rabbanite Bassie Garelik – www.chabad.org

Traduite par Feiga Lubecki