Quand la joie grandit
Lorsqu’un enfant naît, les parents, tout à leur émerveillement initial, découvrent un bonheur de chaque instant. Et ils voient grandir et se renforcer ce sentiment jour après jour. Mais quand l’enfant a un mois, c’est dans une nouvelle phase qu’ils entrent. Même si une immense attention est toujours nécessaire, tout paraît comme plus assuré. La joie naturelle apparue au début en est encore grandie et ses fruits prodigieux commencent à être visibles. C’est dans une situation similaire que nous nous trouvons aujourd’hui. Le mois d’Adar a maintenant trente jours et c’est décidément un bel âge !
Etrange proposition que celle-là ! Le mois en cours a donc un mois… C’est que commence à présent Adar, deuxième du nom, celui qui nous conduit à l’absolue allégresse de Pourim. De fait, il a été abondamment dit que cette année, dans le calendrier juif, compte treize mois et que le mois supplémentaire est celui d’Adar qui, justement, est redoublé. L’implication est claire. Il ne s’agit pas ici d’un quelconque dédoublement d’une même réalité, comme si l’on ne faisait que répéter un événement déjà connu. L’idée d’un Adar redoublé est celle d’une force multipliée. Nous franchissons donc le seuil d’un nouveau temps, chargés de la puissance accumulée pendant la période précédente. Il ne faut pas croire que la joie vécue jusqu’ici est entrée dans une sorte de routine du fait de la longueur de l’attente avant le point culminant que constitue Pourim. Elle n’a cessé de progresser dans notre cœur et dans notre âme et sa solidité est maintenant à toute épreuve. Elle éclaire à présent plus que jamais et la route paraît d’une beauté inégalée tant on en discerne déjà l’éclatant aboutissement. Alors, laissons-en monter la lumière !
Ce cadeau que nous donne le mois est littéralement extraordinaire. Il porte en lui l’usage qu’il appartient à chacun de choisir d’en faire. Lorsque le monde alentours, la vie et ses méandres semblent vouloir, comme par une lente usure, éteindre l’enthousiasme, lorsque, en des temps d’incertitude globale, l’identité juive paraît moins facile à porter, la joie vient briser les barrières. Elle fait lever comme un vent nouveau que rien ne peut arrêter, qui chasse les miasmes de l’abandon. C’est déjà là l’histoire de Pourim dont on entend l’écho avant-coureur. Ce n’est guère étonnant, en ce deuxième Adar commençant, tout prend une autre dimension, plus nouvelle que renouvelée. Cette période qui s’ouvre est ainsi celle de tous les espoirs : réjouissance, célébration et, plus encore, liberté conquise par/pour chacun, spirituelle et matérielle, pour une libération collective et universelle, celle du temps messianique.
La Techouva au temps de Machia’h
Le Zohar (III, 153b) enseigne : «Machia’h viendra pour que les Justes fassent Techouva». La définition du «Juste», du «Tsadik» étant précisément qu’il n’a pas commis de faute, pourquoi devrait-il revenir à D.ieu, faire Techouva, en ce nouveau temps ?
En fait, quand Machia’h viendra, c’est un niveau si élevé de la Divinité qui se révèlera que, en comparaison, même le degré le plus haut de la Sagesse Divine sera considéré comme aussi bas que le monde matériel. Du fait de l’intensité et de la grandeur de cette révélation, les Justes ressentiront un sentiment de Techouva. Bien entendu, celui-ci ne correspondra à aucune faute mais à la pure volonté de s’approcher de D.ieu.
(d’après Likoutei Torah, Chir Hachirim, p. 50b)
Vayikra: Chaque Juif est précieux
Chacun parmi tous
Il suffit de jeter un rapide regard sur notre peuple pour constater une grande hétérogénéité car il n’existe quasiment pas de lieu où les Juifs n’aient pas vécu. Ils se sont distingués au sein de chaque civilisation majeure et, ce faisant, se sont adaptés à ces environnements variés.
Mais ce qui change n’est pas seulement l’endroit où ils vivent mais la nature même des individus eux-mêmes. Nos Sages commentent que tout comme il n’existe pas deux individus qui ont le même visage, leurs processus intellectuels ne sont également jamais les mêmes (Sanhédrin 38a).
Cependant, cette diversité n’entrave aucunement l’unité fondamentale qui lie tous les membres de notre peuple, de tous les pays et de toutes les époques. Chaque Juif, homme, femme et enfant, possède une âme qui est «une véritable partie de D.ieu» et qui imprègne chaque dimension de son être. C’est de ce peuple que D.ieu dit : «J’ai créé ce peuple pour Moi ; ils chanteront Ma louange».
Chaque Juif est le légataire de tout l’héritage de notre peuple. Une chaîne d’or s’étend à travers les générations, remontant à nos Patriarches, Avraham, Its’hak et Yaakov et à nos Matriarches, Sarah, Rivkah, Ra’hel et Léa. Chaque Juif de la génération représente la collectivité dans son ensemble comme elle a existé et évolué au cours de l’histoire. C’est ainsi que D.ieu chérit chaque Juif comme un père chérit son fils unique.
La proximité avec D.ieu
L’amour unique que témoigne D.ieu au peuple juif s’exprime au début de notre Paracha qui déclare : «Et Il appela Moché, et D.ieu lui parla». Avant que D.ieu ne s’adresse à Moché, Il l’appela, lui manifestant ainsi une affection toute particulière. Il ne le convoqua pas pour lui transmettre une information mais bien au contraire, Il l’appela pour lui exprimer cet amour essentiel qu’Il partage avec notre peuple (car bien que Moché seul fût appelé, cet appel s’adressait au dirigeant du peuple entier).
La nature divine que nous possédons dans notre essence nous «appelle» constamment, cherchant à s’exprimer. Cela apparaît dans le sujet de la Paracha, les offrandes de sacrifices. Le mot hébreu pour «sacrifice», korban, possède la même racine que le mot karov, qui signifie «proche». Les sacrifices permettent au potentiel spirituel du Juif de faire surface, le rapprochant sensiblement de D.ieu.
Une aura d’affection
Les concepts dont on vient de parler sont fondamentaux quand il s’agit des relations que nous devons entretenir avec ceux des nôtres dont la conduite s’est écartée (pour l’instant) de notre héritage.
D’abord et avant tout, il nous faut apprécier qui est véritablement l’autre. Quand nous nous adressons à un Juif, il nous faut être conscients que nous parlons à une âme qui est «une véritable partie de D.ieu».
Nul n’est besoin de se concentrer sur les aspects négatifs de la conduite d’autrui. Bien au contraire, il nous faut mettre en lumière son potentiel positif, lui faire prendre conscience de l’étincelle divine qui est en lui. Nous devons nous inspirer de l’exemple que nous livre la lecture de la Torah et montrer à notre prochain une proximité toute particulière, l’invitant à se joindre à des activités qui encouragent l’expression de son essence juive.
Il nous faut adopter cette approche avec confiance car elle s’adresse à la partie la plus profonde de notre alter ego. «Aucun Juif ne peut ou ne désire se séparer de D.ieu». Quand nous l’invitons, avec chaleur et ouverture à affirmer son héritage, il répond, se «rapprochant de D.ieu» à son propre rythme. Puisqu’il appartient à une nation «créée pour Lui», il est inévitable qu’il finira par «chanter Sa louange», en suivant le chemin de la Torah et des mitsvot.
Chercher le bon côté
Une tendance naturelle nous pousse à l’impatience, à précipiter une personne vers l’observance complète de la Torah et de ses mitsvot et peut-être à la critiquer si elle hésite ou recule. La Torah n’approuve pas une telle approche. Quand le prophète Yichayahou s’exprima durement à propos du peuple juif, D.ieu le reprit sévèrement malgré le fait que ses paroles fussent justifiées. Plutôt que de critiquer, nous devons nous efforcer d’apprécier et de toujours insister sur les qualités positives que chacun d’entre nous possède. Car le fait qu’un Juif existe est en soi une louange pour D.ieu, indépendamment du service divin qu’il accomplit.
Bien que les Juifs soient «une brebis parmi soixante-dix loups» et qu’ils aient subi d’atroces persécutions, nous avons survécu alors que des peuples apparemment plus nombreux et plus puissants ont totalement disparu. Cela démontre clairement que D.ieu a investi Son peuple d’une dimension de Son éternité. La pérennité de notre existence en tant que peuple et individus est l’expression de la Providence Divine.
La louange ultime
Le potentiel divin qui réside en chaque Juif et dans notre peuple en tant qu’entité ne restera pas latent. Son épanouissement conduira à une ère où la Divinité cachée dans le monde en général s’exprimera de façon manifeste, l’Ere de la Rédemption. Le peuple juif chantera alors pleinement «la louange à D.ieu» témoignant de sa gratitude pour les miracles qu’Il a accomplis pour lui.
Que fait-on à Pourim ?
Cette année, Pourim tombe le dimanche 16 mars 2014.
Jeudi 13 mars 2014, on jeûne de 5h35 à 19h31 (horaire de Paris), c’est le jeûne d’Esther. Le matin, on récite les Seli’hot et la prière «Avinou Malkenou». Avant l’office de «Min’ha», l’après-midi, on donne trois pièces de cinquante centimes à la «Tsedaka» (charité) en souvenir de l’offrande des trois demi-sicles pour la construction et l’entretien du Temple. A Min’ha, lecture de la Torah et dans la «Amida», on rajoute la prière «Anénou».
Samedi 15 mars, après la sortie de Chabbat (19h 43 - Horaire de Paris) et la prière du soir, on écoute attentivement chaque mot de la Méguila, le rouleau d’Esther. Après la lecture, on récite la Havdala.
Pourim, les enfants se déguisent, si possible dans l’esprit de la fête en évitant de se déguiser en «méchant».
Dimanche matin 16 mars, ou éventuellement plus tard dans la journée :
1) on écoute à nouveau chaque mot de la lecture de la Méguila.
2) ce n’est qu’après avoir écouté la Méguila qu’on peut procéder aux autres Mitsvot de Pourim : on offre au moins deux mets comestibles à un ami, en passant par un intermédiaire: un homme à un homme, et une femme à une femme : ce sont les «Michloa’h Manot».
3) on donne au moins une pièce à deux pauvres pour leur permettre de célébrer la fête, c’est: «Matanot Laévyonim».
4) dimanche après-midi, on se réunit pour prendre part au festin de Pourim dans la joie.
Lundi 17 mars, c’est Chouchane Pourim, le Pourim des «villes fortifiées» dont Jérusalem. On ne récite pas les prières de supplication, Ta’hanoune, et on partage la joie du peuple juif où qu’il se trouve.
F.L.
Comment provoquer le miracle…
C’est lors de ma seconde année à l’Université de British Columbia que j’ai commencé à observer sérieusement le Chabbat.
Au début de l’année, je ne me présentai pas aux cours Roch Hachana et Yom Kippour : l’année universitaire venait de commencer et je n’apparaissais pas en classe ! Ce fut dur mais je ne peux pas vraiment appeler cela une épreuve. Ce n’est pas que je me sois forcé mais je ne pouvais tout simplement pas y aller.
Toute l’année, je progressais dans mon observance du Chabbat mais, pour moi, tout allait de soi sans que cela me demande vraiment des efforts. Jusqu’à la fin de l’année et là…
Tôt le matin. Mais je ne suis pas dans mon lit, je travaille mes notes. Je regarde la montre et là : le choc ! J’avais passé toute la nuit à préparer l’examen le plus important, au coefficient le plus élevé mais, même si je sortais immédiatement de ma chambre, je serais en retard !
J’enfile mes chaussures sans même prendre la peine d’attacher les lacets – il est tard – et je me dirige vers la porte.
Là, je m’arrête.
Une petite voix à l’intérieur de moi : «Et qu’en est-il de la routine ?»
Durant l’année, j’avais pris sur moi une nouvelle routine : attacher des boîtiers en cuir contenant des parchemins avec des lanières noires autour de mon bras gauche et ma tête, ce qu’on appelle des Téfilines, des objets avec lesquels les Juifs prient chaque matin. Puis je passais environ une heure à déchiffrer des prières en hébreu en essayant de me concentrer - approximativement - sur le sens des mots avant de me rendre à vélo aux cours.
Mais il y a un animal à l’intérieur de moi, celui qui contrôle mes bras, mes jambes, mon cœur et mes entrailles et, assez souvent aussi, mon cerveau. Il rugissait – comme s’il était le patron : « Oublie tout cela ! Juste ce matin ! Tu le feras plus tard, dépêche-toi, il est tard !»
Mais le rebelle en moi manifesta son opposition : «Freeman ! Tu as des principes, oui ou non ? C’est toi qui décides !»
Des principes ? C’est là le problème : qui suis-je vraiment ?
Je me lave les mains ; je lie les lanières sur mon bras et ma tête ; je bredouille les mots en hébreu aussi vite que possible…
- Voyons ! Si déjà tu fais quelque chose, fais-le correctement !
Alors je m’applique, je déchiffre chaque mot, j’oblige chaque neurone de mon cerveau à se concentrer sur ce que je marmonne. Bon, peut-être pas une heure cette fois-ci, peut-être quarante minutes ou même juste une demi-heure… Une demi-heure qui me semble durer une éternité…
Ok, terminé, dénouer les lanières, ranger les boîtiers, dévaler toute la rue jusqu’à la 41ème Avenue et faire du stop : c’est une superbe voiture de sport qui s’arrête et m’embarque ; à peine je referme la porte et la voiture part en vrombissant à toute allure : «Si cette dame était si pressée, pourquoi s’est-elle arrêtée pour m’emmener ?». La question est pertinente, avouez-le. Elle ne prononce pas un mot. Une telle course aurait dû durer au moins quinze minutes mais, en cinq minutes à peine, elle me dépose sur le parking de l’université. Tout à fait à l’autre bout de la salle de cours.
Il fait beau, on est au mois de mai et je prie mentalement : « Si déjà Tu fais des miracles, ne pourrais-tu pas continuer ?»
- Hé président !
C’est Rodney, le vice-président de l’orchestre dont je suis le président.
- Rodney ! Je dois me rendre tout de suite au département Humanités 204 !
Rodney ne possède pas de voiture de sport. Mais il adore rouler sur les trottoirs avec sa petite voiture qui a connu des jours meilleurs, en essayant de ne blesser personne.
- Hé, Rodney ! C’est écrit : «Personnel autorisé uniquement» !
- Oui mais tu es le président ! Et moi le vice-président ! Peut-on être plus «autorisé» que cela ?
Une minute plus tard, je suis arrivé devant les Humanités 204. Il est dix heures. L’examen était prévu à 8 heures 30. C’est perdu. A quoi ont servi tous ces miracles ?
J’entre en classe, je n’ai plus rien à perdre. Les étudiants sont debout, assis, bavardent… Pas de professeur à l’horizon.
- Alors, l’examen est déjà fini ?
- Si c’était fini, pourquoi serions-nous restés ici ?
- Je ne comprends pas…
C’est alors que le professeur entre en classe, tout penaud…
- Je suis un peu en retard ce matin. Quiconque veut rester pour l’examen est le bienvenu. Mais si vous préférez revenir une autre fois, je le comprends parfaitement ! A vous de choisir !
J’ai eu la meilleure note de la classe.
Depuis quand a-t-on jamais entendu un professeur se lever tard un jour d’examen ? La dame dans la voiture de sport avait dû quitter sa maison bien avant que je n’imagine faire de l’auto-stop. Et Rodney qui n’hésite pas à enfreindre toutes les règles du campus pour me faire arriver plus vite. Et le professeur qui a décidé de boire plus qu’il n’est permis la veille de l’examen afin qu’il ait du mal à se lever le matin… Cela fait beaucoup de coïncidences et tout ce que j’ai compris de cela, c’est qu’il existe certainement un Grand Coordinateur de tout ce système.
Avancez plus loin que vos limites et Celui qui est en Haut saura briser toutes les limites. Pour vous. Vous faites bien plus qu’assister à des miracles. Vous les créez vous-même !
Tzvi Freeman – www.chabad.org
Traduit par Feiga Lubecki