Le début de la Parchat Yethro relate de quelle manière Yethro rejoignit les enfants d'Israël(1), après avoir eu connaissance des grands miracles survenus lors de la traversée de la mer Rouge et durant la guerre contre Amalek(2).

Le saint Zoharo(3) explique, à ce propos, que la venue de Yethro et sa reconnaissance de D.ieu furent la préparation nécessaire au don de la Torah. C'est uniquement après que Yethro soit venu et qu'il ait épousé la foi d'Israël que D.ieu donna la Torah.

On peut s'interroger, sur cette affirmation. En effet, quel rapport y a-t-il entre la venue de Yethro et le don de la Torah ? Pourquoi est-ce précisément la première qui prépare le second ? Comment prétendre que, pour que la Torah soit donnée, il fallait attendre l'arrivée de celui qui avait servi les idoles, au point de devenir le «prêtre de Midyan»(4) ?

Pour répondre à cette question, il convient de rappeler, au préalable, la célèbre parabole du Midrash, définissant l'apport du don de la Torah(5). Le Midrash dit : «On peut citer, à ce propos, l'image suivante. Un roi prit la décision suivante, les Romains ne descendront pas en Syrie et les Syriens ne monteront pas à Rome(6). De même, quand D.ieu créa le monde, Il décida que : les cieux sont les cieux de D.ieu et la terre, Il la donna aux hommes(7).

Puis, quand II voulut donner la Torah, Il supprima ce premier Décret et II déclara : les créatures inférieures s'élèveront vers les créatures supérieures et les créatures supérieures descendront vers les créatures inférieures». Il permit ainsi que la spiritualité ne soit plus coupée du monde.

Il en résulte que, grâce à l'étude de la Torah et à la pratique des Mitsvot dans ce monde(8), un Juif y révèle la spiritualité et il la met en évidence sur la terre, au sein de la matérialité. Il réunit, de cette façon, le spirituel et le matériel, les cieux et la terre.

Cela veut dire que la finalité du don de la Torah était de supprimer les barrières séparant ce monde matériel des mondes spirituels, afin que l'on soit en mesure d'obtenir, ici-bas, une Lumière si élevée et si sainte qu'elle n'avait brillé, jusqu'alors, que dans les stades les plus hauts de la création(9).

Comme on le sait, une préparation doit être en rapport avec ce qu'elle prépare. En l'occurrence, celle du don de la Torah devait faire en sorte qu'un homme comme Yethro s'attache également aux voies de D.ieu. A l'époque, Yethro était l'un des plus grands, parmi les Sages des nations. Il avait servi toutes les formes d'idolâtrie au monde(10) et il se trouvait donc dans une situation morale particulièrement basse. Il était profondément éloigné de la Divinité lorsqu'il prit la décision de se rapprocher.

Quand un homme comme Yethro vient et déclare : «Désormais, je sais que l'Eternel est plus grand que tous les dieux(11)», il proclame ainsi la grandeur de D.ieu de la manière la plus forte et, de cette façon, il est établi, sans ambiguïté, que la foi peut animer les créatures les plus basses de ce monde.

Ce qui vient d'être exposé permet de comprendre l'affirmation du Zohar, précédemment citée, selon laquelle la conversion de Yethro fut un préalable nécessaire au don de la Torah. Tel fut, en effet, l'objet de la révélation du Sinaï. Les «créatures supérieures», les Lumières divines les plus hautes et les plus saintes devaient parvenir aux «créatures inférieures», aux parties les plus basses de la création.

Et, cette conclusion nous permettra, en outre, de répondre également à une autre interrogation : comment la Parchat Yethro, relatant un événement historique de la plus haute importance, la réception de la Torah par les enfants d'Israël, sur le mont Sinaï, peut-elle porter précisément ce nom de Yethro(12) ? Une Paracha aussi importante n'aurait-elle pas mérité d'avoir un autre nom ?

On peut effectivement répondre à cette question d'après ce qui a été exposé au préalable. Un homme comme Yethro et son engagement sur les voies de D.ieu sont l'expression la plus forte de ce qui fut l'apport central de ce don de la Torah, comme on l'a indiqué ci-dessus. C'est la raison pour laquelle la Paracha, dans son ensemble, porte le nom de Yethro.

Il découle de ce qui vient d'être dit un enseignement pour le service de D.ieu de chacun : comment un Juif peut-il réaliser sa propre réception de la Torah, en l'étudiant et en la comprenant(13) ? Pour cela, il est nécessaire qu'il agisse sur le Yethro qu'il porte en lui, en son corps et en son âme animale.

Ainsi, il doit faire en sorte que le corps et l'âme animale reconnaissent également la grandeur de D.ieu, même si leurs centres d'intérêt se limitent aux domaines matériels, même s'ils tentent de convaincre l'homme qu'il doit rechercher tout ce qui est superflu et luxueux.

Un homme doit faire des efforts pour affiner son corps et son âme animale, les Yethro qu'il porte en lui, jusqu'à ce que ceux-ci lui signifient leur accord et adoptent la volonté de l'âme divine, l'étude de la Torah et la pratique des Mitsvot.

Quand un Juif fait en sorte que non seulement son âme divine, mais aussi son âme animale, le Yethro qu'il porte en lui, se conforment à la Volonté de D.ieu, il mérite alors de réaliser son don personnel de la Torah. Dès lors, il la reçoit, la comprend et il connaît la réussite en son étude et en sa pratique.

(Discours du Rabbi, Likoutei Si'hot, tome 4, page 1271)

Notes :
(1) En adoptant leur foi.
(2) C'est ce qui le conduisit à prendre cette décision.
(3) Au début de la Parchat Yethro, à la page 67b.
(4) Selon une explication du Midrash Chemot Rabba, chapitre 1, au paragraphe 32 et du Me'hilta, au début de la Parchat Yethro. Comme le texte l'indiquera par la suite, nos Sages, dont la mémoire est une bénédiction, disent qu'il n'y avait pas une forme d'idolâtrie au monde qu'il n'ait servie. Et, c'est seulement après tout cela qu'il décida de s'attacher au Saint béni soit-Il, ce qui fait, précisément, toute la valeur de sa démarche.
(5) Dans le Midrash Chemot Rabba, chapitre 12, au paragraphe 3.
(6) Il y aura une coupure hermétique entre ces deux pays.
(7) Il instaura également une coupure entre la spiritualité et la matérialité.
(8) Au moyen d'objets matériels.
(13) Comment parvenir à l'intérioriser de la manière qui convient ?
(9) C'est le sens de la disparition de cette coupure.
(10) Comme le dit Rachi, commentant le verset Yethro 18, 11 : «cela veut dire qu'il connaissait toutes les formes d'idolâtrie du monde. Il n'y en avait pas une qu'il n'ait servi».
(11) Et, il parle en connaissance de cause !
(12) Celle d'un prêtre idolâtre, comme on l'a dit !
(13) Comment parvenir à l’intérioriser de la manière qui convient ?

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