Point culminant… et au-delà
Un Tsadik, un Juste, qui quitte ce monde n’en disparaît pas, il s’y trouve avec une intensité encore plus grande, nous enseigne le Zohar. Lorsque, en ce Chabbat, revient le 3 Tamouz, jour où le Rabbi quitta matériellement ce monde, cette phrase, immanquablement, résonne dans l’esprit et dans l’âme de chacun. De fait, ce 3 Tamouz est la vingt-cinquième fois que nous marquons l’événement. Certes, vingt-cinq années, cela constitue une bien longue, bien trop longue, durée. Cependant, chacun constate à quel point la présence du Rabbi semble être toujours plus sensible, comme plus profonde. Par ses enseignements, par les actions croissantes qu’il suscite aux quatre coins du monde, le Rabbi continue de guider, conduire, vivifier des centaines de milliers de personnes, diverses tant par leur origine que par leur mode de vie, leurs opinions ou leur situation géographique.
Certains pourraient penser que la grandeur du 3 Tamouz se limite à ces considérations. Ces idées expriment sans doute une actualité indéniable – et, en cela, elles sont d’autant plus essentielles que l’époque paraît comme plus obscure. Toutefois, si cette date se contentait d’incarner cela, les années qui passent ne verraient rien se rajouter aux acquis antérieurs. On dirait alors que ce jour n’est qu’une commémoration, même importante, parmi toutes les autres. Or il représente bien autre chose et sans doute est-ce en cela qu’il révèle son urgence pour chacun, car il est un jour d’élévation. Cela signifie que, lorsqu’il revient, d’année en année, il ne réapparaît pas au même niveau. Il entraîne toujours dans un degré plus haut et ce progrès est infini. C’est ainsi que le Rabbi lui-même s’élève également de degré en degré. Il ouvre un chemin toujours nouveau et chacun peut le suivre. Plus encore, il importe pour chacun de s’élever avec lui. Et l’occurrence des vingt-cinq ans le souligne encore.
Le propre d’une voie qui monte, c’est d’exister et d’offrir le passage. Mais il appartient à l’homme de s’y engager et d’en suivre les avancées. Cette route-là est spirituelle, c’est spirituellement qu’il faut savoir l’emprunter. C’est dire que le 3 Tamouz n’est pas qu’une journée qu’il faut marquer, c’est un moment rare qu’il faut vivre par l’action et par l’étude, par le cœur et par l’esprit. Ce jour tombe ce Chabbat, a-t-on dit, comme pour souligner qu’il incarne une sorte de point culminant. Parce que c’’est une période nouvelle qui s’ouvre et que notre âme sait y trouver les ressources du renouveau. Afin que l’ombre recule pour faire place à la Lumière, celle du temps de Machi’ah.
Se préparer
Quand on arrive dans un lieu nouveau, on s’habille de manière conforme à cet endroit. Sans un vêtement convenable, il est difficile de s’y installer.
Nous sommes tout près de l’entrée du Chabbat. Il faut nous préparer à la venue du Machia’h.
(D’après Sefer HaSi’hot 5696 p. 18)
Un véritable dirigeant
La Paracha de cette semaine relate comment Kora’h entra en confrontation avec Moché en protestant : « Toute la nation est sainte et D.ieu est parmi eux. Pourquoi t’ériges-tu au-dessus de l’assemblée de D.ieu ? »
Pour comprendre cette histoire, il nous faut nous concentrer sur différentes approches de la fonction de chef. L’une d’entre elles s’appuie sur le charisme. Un tel dirigeant attire le peuple parce qu’il « brille ». Il projette une image d’un futur très prometteur. Kora’h était riche, il avait de l’humour et il promettait au peuple un avenir meilleur. C’est la raison pour laquelle il attirait dans son sillage de nombreux hommes crédules.
Moché était avare de paroles et avait des difficultés à communiquer. Les gens trouvaient difficile de le comprendre. Néanmoins, ils savaient que de Moché émanait la vérité de D.ieu. Il ne tirait pas la source de sa force de sa personne elle-même mais de son aptitude à se dépasser.
C’est la dissonance dans les sentiments qu’il inspira qui conduisit au conflit. Parce que Moché ne leur fit pas de promesses étincelantes, ils ne furent pas très inspirés par son message. Mais par ailleurs, ils prirent conscience, et D.ieu leur rappela constamment que Moché était Son messager. Il ne prononçait pas ses propres paroles. Il ne disait que ce que D.ieu voulait qu’il dise.
Ce que cela semble impliquer est que Kora’h était attirant mais Moché, droit. Cela voudrait-il donc dire que choisir Moché aurait signifié choisir la rigueur en renonçant au plaisir ?
Moché mérite plus que cela. Un dirigeant comme Kora’h pourvoit aux besoins de ses adeptes de manière superficielle. Il leur offre des gratifications rutilantes et immédiates. Mais il n’investira pas l’énergie nécessaire pour pénétrer dans l’essence de ses fidèles.
Un homme comme Moché est différent. Son souci est de donner à son peuple la force de découvrir et d’accomplir sa mission dans la vie. Chaque individu a été créé dans le but d’accomplir une mission divine qui lui est propre. Moché ne donne pas de réponses rapides et de solutions toutes faites. Il va plutôt inciter l’homme à pénétrer dans le fond de son être et comprendre ce que D.ieu attend de lui.
Il est vrai que cela requiert de se projeter au-delà du présent immédiat. L’homme ne doit pas aspirer au plaisir immédiat mais à ce qui est véritablement juste et vrai. C’est un plus grand défi mais aussi une réussite bien plus gratifiante. Car si quelque chose est vrai, bien que cela demande plus de sacrifice, au moment présent, cela conduit au bien véritable. Bien plus encore, le bien qui en résultera sera continu et perdurera dans l’avenir.
Moché donne au peuple une vision à long terme qui lui permet de vivre sa vie avec un but profond et dans la joie. Il fait surgir cette forme de bonheur qui jaillit de l’intérieur quand nous accomplissons quelque chose qui a du sens. Au lieu de ne viser qu’à une élévation immédiate, Moché aspire à la véritable réalisation de notre raison de vivre. Et la prise de conscience de cette mission le remplit de vitalité et de joie. Il est enthousiaste dans sa vie quotidienne parce que chaque acte qu’il accomplit résonne de signification.
Dans chaque génération, nous pouvons rencontrer des guides comme Moché et Kora’h. De la même façon, chacun d’entre nous peut être un Moché ou un Kora’h. En effet, que ce soit dans notre foyer, sur notre lieu de travail ou parmi nos amis, nous agissons tous, à un moment ou à un autre, comme des dirigeants. Quand nous exerçons donc cette fonction, nous ne devons pas nous concentrer sur l’intérêt personnel, immédiat, que ce soit le nôtre ou celui de la personne que nous cherchons à impressionner, mais sur des objectifs bien plus élevés.
Perspectives
Cette question évoque également le temps de la Délivrance. Car alors, il ne s’agira pas simplement d’une époque où l’humanité parviendra à son accomplissement total. Ce sera l’Ere de Machia’h. Un homme, Machia’h, initiera les changements qui embrasseront l’humanité tout entière.
Et pourquoi suivrons-nous Machia’h ? Pas à cause de son charisme et certainement pas à cause d’une campagne remplie de promesses.
Nous suivrons Machia’h parce qu’il portera un message de vérité. Ce qu’il dira aura un réel impact et nous reconnaîtrons qu’il s’agit du but et de l’objectif de la destinée humaine. Car lorsque nous sommes mis face à la vérité, nous la reconnaissons. En fait, la vérité nous valorise et nous hisse à son niveau, éveillant en nous le potentiel de véritablement la réaliser. Telle est la clé du rôle de guide de Machia’h.
Une grande partie du peuple soutenait Kora’h et Moché lança donc un défi : Kora’h et ses deux cent cinquante adeptes apporteraient des encens en offrande, ainsi qu’Aharon le Grand-Prêtre. D.ieu accepterait l’une des offrandes et ceux qui avaient apporté les autres mourraient. Ce fut l’offrande d’Aharon que D.ieu accepta et la terre s’ouvrit et avala Kora’h et toute sa faction.
Mais qu’y avait-il de si grave dans la revendication de Kora’h ? Il semblerait même qu’elle ait pu être fondée. Puisque tous les membres du peuple sont saints, chacun d’entre eux possède une étincelle de Divinité. Pourquoi donc une personne devrait-elle « s’ériger » au-dessus des autres ? Pourquoi donc D.ieu apporta-t-Il son soutien à Moché et Aharon ?
La réponse à ces questions dépend de la compréhension que l’on peut avoir de ce sujet. Il ne fait aucun doute que toute la nation était sainte mais pour exprimer cette sainteté, le peuple devait être motivé et inspiré. Et cela requérait un dirigeant, un « Moché ».
Un dirigeant donne à son peuple la force de réaliser son potentiel et de l’exprimer. Sans un tel homme, et bien que les membres du peuple possèdent des qualités extraordinaires, ils risquent de rester passifs et de ne pas les utiliser ni de les exprimer.
Bien que chacun possédât une étincelle essentielle divine, il était de la responsabilité de Moché de permettre la révélation de cette Divinité. Chacun possédait le potentiel mais comme l’indique le récit biblique, ils faillirent, à maintes occasions, à le réaliser. C’est Moché qui les motivait, les faisait aller de l’avant pour exprimer ce qu’ils étaient réellement.
Coutumes liées au jour de la Hilloula du Rabbi, le 3 Tamouz (cette année samedi 6 juillet 2019)
Le Rabbi avait fixé un certain nombre de coutumes à respecter à l’occasion de la Hilloula du Rabbi précédent. Ce sont ces mêmes coutumes qui ont été reprises pour le 3 Tamouz. En voici quelques-unes :
- • On allumera une bougie de vingt-quatre heures depuis vendredi soir 5 juillet.
- • Pendant chacune des trois prières du jour, cinq bougies resteront allumées devant l’officiant.
- • La veille, on donnera de la Tsedaka (charité), au nom de chacun des membres de sa famille, pour une institution du Rabbi.
Ces trois points devront être accomplis avant l'entrée du Chabbat puisque cette année le 3 Tamouz tombe un Chabbat.
- • On consacrera un moment dans la journée pour parler du Rabbi et de sa grande Ahavat Israël (amour du prochain) à sa famille et son entourage.
- • On étudiera les chapitres de Michnayot correspondant aux lettres qui constituent le nom du Rabbi.
- • On étudiera les enseignements du Rabbi.
- • On rédigera la veille un « Pane », « Pidyone Néfech », une lettre de demande de bénédictions (en y précisant les prénoms et les prénoms des mamans de chacun) qui sera déposée sur le Ohel du Rabbi.
N° de fax du Ohel : 00 1718 723 44 44
N° de fax du Beth Loubavitch : 01 45 26 24 37
Adresse du Ohel : 226-20 Francis Lewis Blvd – Cambria Heights, New York 11411
E-Mail : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.
Retour du Ohel…
Il y a quelques mois, alors que j’arrivais au Ohel pour prier auprès de la tombe du Rabbi, je rencontrai un homme qui me demanda s’il pouvait retourner avec moi à Crown Heights, le quartier ‘hassidique de Brooklyn : il faisait trop froid, il n’avait pas la force d’attendre un bus à l’extérieur.
Dans la voiture, nous avons fait connaissance : en 1976, à l’âge de six ans, il avait contracté une maladie grave qui ne pouvait pas être traitée en Russie (où il habitait) mais seulement à Boston, aux États-Unis et à un coût astronomique. Quelqu’un contacta le Rabbi à New York qui, grâce à l’aide de diverses organisations philanthropiques, put récolter de l’argent. Mais le plus difficile était d’obtenir une autorisation de sortie d’Union Soviétique ; les autorités locales refusèrent mais la mère connaissait quelqu’un qui était devenu officier du gouvernement et qui, miraculeusement, accepta de délivrer les autorisations nécessaires. C’est ainsi que le père, la mère et l’enfant purent se rendre à Boston où l’enfant séjourna deux mois à l’hôpital.
Avant de retourner en Russie, ils se rendirent à New York pour remercier le Rabbi qui s’était tellement dévoué pour eux. C’était la semaine de la Paracha Kora’h et le Rabbi – qui, bien entendu, parlait couramment le russe puisqu’il était originaire d’Ukraine – mentionna qu’à la suite de sa rébellion, Kora’h avait été englouti dans la terre. Le petit garçon, A.B., demanda innocemment : « Dans le métro ? », ce qui fit bien rire ses parents.
Le Rabbi répondit : « Ne riez pas ! Nous apprenons souvent des leçons importantes des questions posées par les enfants ! »
Autant que A.B. puisse s’en souvenir, le Rabbi avait alors expliqué : le système du métro souterrain ne fonctionne que dans les grandes villes connaissant une intense circulation en surface. Le métro permet de mieux circuler d’un point de la ville à l’autre. C’est aussi particulièrement les grandes villes (comme New York – A.B. se souvenait que le Rabbi avait mentionné cette ville) qui offrent malheureusement de nombreuses destinations peu recommandables moralement. Kora’h aurait utilisé le métro pour parvenir à ces endroits mais nous ne devons l’utiliser que pour les bonnes destinations. Le Rabbi avait alors donné deux billets d’un dollar à l’enfant (au lieu de l’habituel billet unique) en lui demandant d’en remettre un à la Tsedaka et l’autre au Kotel, le Mur Occidental à Jérusalem.
Les parents s’écrièrent alors : « Rabbi ! C’est absolument impossible ! ». Il faut se souvenir qu’à l’époque, il était pratiquement impossible de sortir d’Union Soviétique. Mais le Rabbi répliqua : « Vous verrez ! ».
Les années passèrent, la famille était retournée en Russie. Puis, en 1989, le régime soviétique s’écroula, les frontières s’ouvrirent. A.B. put se rendre en Israël et donna le dollar qu’il avait reçu du Rabbi dans une boîte devant le Kotel. Il profita de son séjour pour épouser une jeune fille juive qu’il connaissait, avec une ‘Houppa et un rabbin.
Par la suite, il devint citoyen américain, s’installa à Brooklyn tandis qu’elle retourna en Russie. Le fait est qu’ils n’étaient pas mariés civilement (ce qui n’est pas nécessaire en Israël) et ils devaient donc se contenter de se voir occasionnellement, en tant que visiteurs et non citoyens du pays du conjoint. Quand leur fille eut six ans, ils se rendirent avec elle à ‘Haïfa. Comme par hasard, c’était la Paracha Kora’h… Ils entendirent un certain rabbin mentionner que Kora’h avait été englouti par la terre et la fillette demanda innocemment : « Dans le Carmélit (le métro de ‘Haïfa) ? ». Cette question rappela à A.B. que lui-même avait posé la même question des années auparavant devant le Rabbi et il répéta à sa fille ce que le Rabbi lui avait répondu.
Songeur, je demandai à A.B. s’il était pratiquant : il ouvrit sa mallette et me montra les Téfilines qu’il mettait tous les jours : « Et je peux vous assurer que cela me pose bien des soucis quand je me rends à St Pétersbourg pour rejoindre ma femme : les douaniers russes soupçonnent à chaque fois qu’il s’agit d’une nouvelle sorte de bombe ! »
- Et quelles bénédictions avez-vous demandé auprès du tombeau du Rabbi aujourd’hui ? demandai-je.
- Ma mère a un cancer et mon père un glaucome : j’ai donc demandé une bénédiction pour leur santé ; j’ai aussi demandé que ma femme obtienne enfin les papiers nécessaires pour venir s’installer avec moi à Brooklyn.
- Je peux vous aider ! Je connais un très bon avocat !
Immédiatement, encore dans la voiture, je téléphonai à mon avocat, un expert dans ces questions. Contrairement à son habitude, il répondit au lieu de me laisser déposer un message sur son répondeur qui était souvent trop plein pour qu’on puisse y rajouter un mot… Il accepta de discuter pendant dix minutes avec A.B. pour bien définir la situation et lui fixa un rendez-vous le jour-même !
Leur conversation se termina juste au moment où je garai ma voiture sur Kingston Avenue…
Un des problèmes de A.B. était déjà résolu !
Rav Yeheskel Lebovic – Collive.com
Traduit par Feiga Lubecki