Samedi, 24 octobre 2020

  • Noa’h
Editorial

 Montée des périls ?

Début d’année nouvelle : déjà plus d’une semaine écoulée. Le récit de la création du monde et du commencement de l’histoire des hommes a résonné dans toutes les synagogues. Mais, et en particulier après ce temps si prodigieux de Tichri, le mois « rassasié » de fêtes et d’expériences spirituelles inoubliables, tout change. C’est presque d’un basculement qu’il faudrait parler. Il y a encore bien peu de temps, notre vie était faite d’espoirs à concrétiser, d’élan pour se dépasser et, quasiment du jour au lendemain, nous voici pris dans une impression d’obscurité croissante, comme dans une sensation de montée des périls. Sur le front sanitaire, les nouvelles ne sont guère joyeuses et sur les autres, qui pourrait le dire ?

Cette atmosphère étrange dans laquelle nous nous trouvons éveille en chacun d’anciens souvenirs, spécialement d’actualité cette semaine. La Torah nous raconte en effet, l’histoire de Noé, l’homme qui, seul, affronte autant l’adversité que l’hostilité d’un monde qui refuse de comprendre sa quête. Voilà bien un homme qui doit faire face aux menaces de toutes sortes, celle du déluge annoncée et celle de la férocité des hommes. Que fait-il donc, véritable exemple du meilleur de l’humain ? Acte surprenant, même s’il est ordonné par D.ieu, il construit une arche, un bateau en pleine terre. Le moment venu, il s’y réfugie, toujours sur l’ordre divin, avec sa famille et des représentants de toutes les espèces animales. Tout disparaît sous les eaux, l’époque est détruite mais la terre a une nouvelle chance. Traduisons : devant la montée des périls, Noé n’a pas reculé. Il a agi, avancé, poursuivi son chemin et, sauvant l’avenir, il a fondé un nouveau monde.

On l’a dit : le cycle de Tichri s’est terminé. Mais ses lumières ne se sont pas éteintes. Par cette force nouvelle, nous ne nous efforçons pas de détourner le regard pour éviter de voir les dangers du temps. Nous savons comment nous en protéger. Au-delà des précautions que la raison commande, il nous faut entrer, nous aussi, dans l’arche. En tout temps, elle existe et reste ouverte autant que nécessaire. Elle s’appelle étude de la Torah et lien avec D.ieu par la prière. Elle est plus qu’un refuge : la sauvegarde de ce qui est grand et précieux en l’homme et, plus globalement, dans la création. L’accès en est libre et les périls deviendront alors autant de clés pour des bénédictions infinies.

Etincelles de Machiah

 L’esprit et le cœur

La ‘Hassidout explique les gains spirituels immenses de notre descente en exil. C’est ainsi qu’il est écrit (Isaïe 12 : 1) : « Je Te remercierai D.ieu car Tu as été en colère contre moi ». Lorsque Machia’h viendra, les Juifs remercieront D.ieu de les avoir envoyés en exil car, alors, ils verront toutes les élévations spirituelles que cela aura permis.

Cependant, en même temps, cette conscience ne doit pas atténuer notre profond désir de quitter cet exil. Pour cela, il faut proclamer, avec la plus grande sincérité, « car dans Ton salut nous espérons tout le jour ».

En fait, ce sont ces deux attitudes, l’une de conscience et l’autre d’émotion, qu’il nous faut avoir en parallèle constamment.

(D’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch,

veille de Hochaana Rabba 5744)

Vivre avec la Paracha

 Noa’h

D.ieu donne l’instruction à Noa’h, seul Juste dans un monde consumé par la violence et la corruption, de construire une grande Téva (« arche ») de bois, enduite de poix, à l’intérieur et à l’extérieur. D.ieu annonce qu’un grand déluge va effacer de la face de la terre toute forme de vie. Mais l’arche flottera sur l’eau, protégeant Noa’h, sa famille et deux membres (mâle et femelle) de toutes les espèces animales ainsi que les sept couples d'animaux purs (cacher).

La pluie s’abat pendant quarante jours et quarante nuits. Puis les eaux s’agitent encore cent cinquante jours, avant de se calmer et de commencer à diminuer. L’arche se pose sur le Mont Ararat et de sa fenêtre, No’ah envoie un corbeau puis une série de colombes « pour voir si les eaux ont baissé sur la surface de la terre ». Quand le sol est complètement sec, exactement une année solaire (365 jours) après le début du Déluge, D.ieu ordonne à Noa’h de sortir de la Téva et de repeupler la terre.

Noa’h construit un autel et offre des sacrifices à D.ieu. D.ieu jure de ne plus jamais détruire l’humanité entière à cause de ses actes et établit l’arc en ciel comme témoignage de Sa nouvelle alliance avec les hommes. D.ieu donne également à Noa’h des ordres soulignant la valeur sacrée de la vie : le meurtre est jugé comme une infraction capitale et si l’homme a le droit de consommer de la viande, il lui est interdit de manger de la chair ou du sang provenant d’un animal vivant.

Noa’h plante un vignoble et s’enivre après en avoir consommé son produit. Deux de ses fils, Chem et Yaphet, sont bénis pour avoir couvert sa nudité, alors que son troisième fils, ‘Ham, est puni pour avoir profité de son avilissement.

Les descendants de Noa’h restent un peuple uni, avec un langage et une culture identiques, pendant dix générations. Puis ils en viennent à défier leur Créateur en construisant une haute tour pour symboliser leur propre invincibilité : la Tour de Babel. D.ieu mêle alors leurs langages de sorte que « personne ne comprend la langue de l’autre ». Cela résulte en l’abandon de leur projet et en leur dispersion sur toute la terre, en soixante-dix nations.

La Paracha se conclut avec la chronologie des dix générations entre Noa’h et Avraham et le voyage de ce dernier depuis son lieu de naissance, Our Kasdim jusqu’à ‘Haran, dans son cheminement vers la terre de Canaan.

La fenêtre

Les eaux décrurent sans cesse jusqu’au dixième mois ; le premier jour du dixième mois, les sommets des montagnes furent visibles.

Au bout de quarante jours, Noa’h ouvrit la fenêtre de l’arche qu’il avait faite. Il envoya le corbeau et il fit des aller-retours… Il envoya la colombe pour observer si les eaux avaient baissé sur la face de la terre. Mais la colombe ne trouva pas se poser… Il attendit encore sept jours et renvoya de nouveau la colombe de l’arche. La colombe revint vers lui le soir et voici qu’elle tenait dans son bec une feuille d’olivier fraîche ; et Noa’h sut que les eaux avaient baissé sur terre. (Beréchit 8 : 6-11)

Cela s’est déjà produit : un monde noyé dans la violence et attendant la Rédemption. Un geste divin était espéré car l’homme avait fait, quant à lui, tout ce qui lui était possible ; le reste était entre les mains de D.ieu.

L’homme attendait dans une arche scellée mais cette arche avait une fenêtre. Et par la fenêtre fut envoyée une colombe pour cerner les cieux, pour remuer le monde céleste dans une quête fébrile. Pendant les quatre millénaires qui allaient suivre, elle déploierait ses ailes et la branche d’olivier accrochée à son bec symboliserait la quête de l’humanité pour l’harmonie et la paix.

Un corbeau et trois colombes

Les versets cités ci-dessus décrivent une séquence d’événements qui se produisirent au dixième mois d’une année d’un Déluge qui avait couvert la terre, à l’époque de Noa’h.

Comme le relatent les septième et huitième chapitres de Beréchit, la pluie tomba quarante jours et quarante nuits, après quoi le flot des eaux continua à s’agiter et à gonfler pendant encore cinq mois. Enfin les eaux se calmèrent et commencèrent à diminuer. Le niveau d’eau baissant, l’arche se posa sur le mont Ararat. Bientôt, le sommet de la montagne commença à jaillir au-dessus de la surface de l’eau. Quelques semaines plus tard, Noa’h ouvrit la fenêtre de l’arche qui avait été scellée et envoya un corbeau. Après une semaine, ce fut au tour d’une colombe qui revint et qu'il renvoya une semaine plus tard. Le but de ces trois missions était d’ « observer si les eaux avaient baissé sur la face de la terre ».

Pourquoi Noa’h expédia-t-il ces émissaires ailés ? Nous pouvons comprendre son empressement à reconstruire, à remplacer le chaos laissé par le Déluge par un nouveau monde harmonieux ?

En revanche, il semblerait que les informations recueillies au cours de ces envols fussent de peu d’utilité pour Noa’h. Et de fait, une lecture attentive du récit de la Torah montre que même après qu’il eut été convaincu que le Déluge avait pris fin, Noa’h ne pouvait décider par lui-même que la terre était prête à une renaissance. Il était entré dans l’arche obéissant à un commandement explicite de D.ieu et tant qu’il ne recevrait pas d’instructions contraires, l’injonction divine : « Entre dans l’arche » restait en vigueur. Ce n’est qu’après l’ordre : « Sors de l’arche », qui survint en fait deux mois après le retour de la colombe avec une feuille d’olivier dans le bec, qu’il put sortir de l’arche et commencer à établir et développer un monde nouveau.

La question revient donc avec force : pourquoi envoya-t-il le corbeau et les colombes ?

Une utopie flottante

Nos Sages enseignent que l’arche de Noa’h constituait le prototype du parfait monde futur de Machia’h. Chaque espèce animale, y compris celles qui, en temps normal sont des proies les unes pour les autres, coexistaient dans l’harmonie, entre les murs de l’arche, évoquant le temps où « le loup résidera avec l’agneau et le léopard s’allongera auprès de l’agneau… le lion mangera de la paille tout comme le bœuf… ils ne feront pas de mal ni ne détruiront… car le monde sera rempli de la connaissance de D.ieu… » (Yichayahou 11 :6-9).

L’injonction divine à Noa’h : « Sors de l’arche » pour « croître et te multiplier sur la terre » représente la force impartie par D.ieu pour commencer la tâche de réaliser cet idéal à une échelle universelle.

Dans notre vie, « l’arche de Noé » représente nos propres efforts pour créer des sanctuaires de sainteté au sein des flots de la matérialité. Là aussi, la mission de notre vie se divise en deux phases. Tout d’abord, nous recevons l’instruction : « Rentre dans l’arche ». Alors que le chaos d’un monde qui se noie dans une confusion morale et spirituelle fait rage autour de nous, nous devons créer un havre de tranquillité et de sainteté, protégé par les mots de la Torah et de la prière.

Mais nos « arches personnelles » ne sont pas une fin en soi. En dernier ressort, elles doivent servir de graines pour ensemencer un monde nouveau et embrasser toute la création. Notre mission est de créer un monde libéré de cupidité, de jalousie et de haine, un monde pénétré de la connaissance et de la bonté de son Créateur. L’objectif est de transposer la Divinité que nous avons cultivée dans nos « arches » privées dans le parfait monde divin de Machia’h.

Cette directive : « Entre dans l’arche » qui caractérise notre tâche durant les années « Déluge » de notre histoire, n’est qu’un prélude à « Sors de l’arche » de l’Ère Messianique où la sainteté et la perfection d’une existence basée sur la Torah toucheront toute la création.

Attendre n’est pas une action passive

Tout comme Noa’h, nous devons attendre. Il ne nous incombe pas de décider si l’Ère Messianique a commencé ou non. C’est le commandement divin qui nous a enjoint de pénétrer dans l’arche et c’est D.ieu qui enverra Machia’h pour annoncer l’aube nouvelle.

Cela pourrait nous conduire à l’erreur de penser qu’il faut attendre passivement la Rédemption. C’est ici qu’intervient la leçon que nous transmettent les messagers ailés de Noa’h.

Bien avant de recevoir le commandement de sortir de l’arche, Noa’h ouvrit une fenêtre sur le monde extérieur. Dès qu’il ressentit les signaux de l’accalmie du Déluge, il envoya des messagers pour « tester les eaux » et confirmer que le monde était prêt à un renouveau. Noa’h ne se contenta pas de développer le monde intérieur de son arche, laissant l’Histoire suivre son cours. Mais il fit tout ce qui était dans ses aptitudes pour assurer que le monde était préparé. Il hâta ainsi la Force divine à faire de son arche une réalité universelle.

Aujourd’hui, nous nous trouvons au même croisement des chemins que Noa’h, il y a plus de quarante et un siècles.

Partout dans notre environnement, nous détectons des signes que le monde commence à s’améliorer, à se perfectionner, transformant ses glaives nucléaires en socs de charrue pour venir en aide aux affamés et acceptant les principes de liberté, de justice et de compassion comme universels.

Dans cette accalmie des eaux du Déluge, nous ne pouvons, ni ne devons, nous enfermer dans le cocon de nos arches, ne nous préoccupant que d’améliorer notre vie personnelle et attendant que D.ieu envoie Machia’h. Il nous faut ouvrir en grand les fenêtres de nos arches et aller vers un monde qui se secoue du tumulte de son passé chaotique. Nos efforts constants pour établir que le monde est réellement prêt pour la Rédemption hâtera l’annonce céleste que l’Ère de la paix universelle est arrivée.

Le Coin de la Halacha

 Quelles sont les « Sept Lois des Enfants de Noé » ?

Après le déluge, Noé et ses enfants reçurent de D.ieu sept lois à appliquer universellement afin que plus jamais le monde ne connaisse pareille catastrophe.

Lors du don de la Torah sur le mont Sinaï, D.ieu répéta ces lois que les Juifs ont donc l’obligation d’enseigner aux non-juifs quand ceux-ci manifestent le désir de les connaître. Si un non-juif apprend les détails de ces lois et les applique, non pas parce qu’il les trouve logiques et bénéfiques mais pour obéir à D.ieu, il est considéré comme un « Juste des Nations ».

1) Croire en D.ieu, placer sa confiance en Lui et ne pas adorer d’idoles.

2) Ne pas blasphémer le Nom de D.ieu, Le respecter et Le louer.

3) Ne pas tuer, respecter la sainteté de la vie humaine.

4) Ne pas commettre d’adultère ou toute autre relation interdite ; respecter la sainteté du mariage.

5) Ne pas voler, respecter les droits et la propriété d’autrui.

6) Ne pas consommer la chair d’un animal vivant : éviter la cruauté envers les animaux.

7) Etablir des cours de justice et respecter leurs décisions.

Par ailleurs, au cours des générations, les nations ont adopté d’autres lois :

- Respecter les parents.

- Donner la charité.

- Offrir des sacrifices dans le Temple de Jérusalem.

- Prier.

Ces lois comportent de multiples détails qu’il convient d’étudier minutieusement et de réviser souvent, en particulier à la fin du Michné Torah du Rambam (Maïmonide).

Si toutes les nations du monde se conformaient strictement à ces lois, le monde se porterait beaucoup mieux. Nombre de non-juifs s’y sont déjà engagés.

F.L. (d’après « The Path of the Righteous Gentile » - Clorfene et Rogalsky)

Le Recit de la Semaine

 Secret nucléaire

C’est une histoire incroyable que mon grand-père, Docteur David Eli Rosengard nous raconta de nombreuses fois.

Peu après la Guerre de Corée, alors qu’il était docteur et lieutenant-colonel dans l’armée américaine, il fut envoyé dans le Pacifique sud (je ne me souviens plus de l’endroit exact mais il est possible que ce soit l’île de Guam). Là, des soldats américains tombaient malades et souffraient de mystérieux maux d’estomac. La situation était très grave et se prolongeait, ce qui posait un sérieux défi quant à la santé et à l’efficacité de nos troupes.

Avant de partir mener son enquête épidémiologique, mon grand-père décida de demander sa bénédiction au Rabbi de Loubavitch. Médecin, il avait soigné à Boston la famille Krinsky et c’est Rav Yehouda Krinsky - qui était devenu le secrétaire du Rabbi - qui lui fixa une entrevue.

Quand mon grand-père entra dans le bureau et expliqua le but de son prochain voyage, le Rabbi (qui, dans sa jeunesse avait travaillé comme ingénieur dans la Marine de l’armée américaine à Brooklyn) sortit d’un tiroir une carte militaire de la région en question. Il révéla à mon grand-père que, non loin de là, se déroulaient en secret des essais nucléaires. Sans doute, les soldats avaient consommé des fruits de mer (qui constituent de véritables filtres) et en étaient tombés malades car ils avaient absorbé des toxines produites par ces essais. Pour s’en assurer, continua le Rabbi, mon grand-père devait se rendre sur la plage après une marée haute, prélever des échantillons de fruits de mer et procéder à des expériences qui prouveraient ce qu’il affirmait. Le Rabbi donna des instructions très précises quant à la localisation de ces essais secrets, ce qui stupéfia mon grand-père.

Cependant, à son arrivée sur place, il ne procéda pas immédiatement à ces opérations. Une semaine ou deux passèrent sans apporter d’amélioration quant à la situation sanitaire des soldats. C’est alors que mon grand-père se souvint des paroles du Rabbi, demanda à ce qu’on lui apporte des échantillons de l’eau de l’océan ainsi que des mollusques et crustacés qu’on y trouvait. Les analyses confirmèrent exactement les affirmations du Rabbi et on identifia la toxine qui causait ces terribles douleurs.

Une fois le problème résolu, mon grand-père décida de tout raconter à son commandant qui eut du mal à accepter que des essais nucléaires secrets aient lieu à proximité de son affectation sans qu’il en ait été informé et qu’en plus, ils soient la cause de ces graves problèmes. Il était absolument sidéré par ce scoop et ne pouvait admettre de telles conséquences écologiques et épidémiologiques.

Mais une ou deux semaines plus tard, la une d’un grand journal confirma exactement ce que le Rabbi avait révélé à mon grand-père : des essais nucléaires secrets avaient été effectués aux dépens de la santé des soldats et de la population locale !

Ce que je trouve incroyable dans tout cela, c’est que les plus haut-gradés de l’armée américaine semblaient ignorer ce qui se passait dans la région alors que le Rabbi, assis dans son bureau de New York, en était conscient et avait agi pour le bien de l’armée ! Il faut réaliser que, dans l’armée, il y a des documents « classifiés » et d’autres encore plus sensibles appelés « top secret » auxquels n’ont accès que très peu de responsables gouvernementaux. Mais le Rabbi n’avait pas besoin d’espions pour les connaître : ses immenses connaissances de Torah lui donnaient accès à des codes spirituels qui rendaient inutiles toute clandestinité de sorte qu’il pouvait révéler aux cadres de l’armée ce qui se passait quand eux-mêmes n’en étaient pas informés.

Je regrette juste de n’avoir pas raconté plus tôt cet épisode que mon grand-père avait raconté très souvent en public avant sa mort en 2009. A chaque fois, il remerciait avec émotion le Rabbi qui avait sauvé tant de vies humaines…

 

Rav Avraham Zelig Gold - JEM

Traduit par Feiga Lubecki