Lag Baomer : pour que les hommes vivent !
Et si on prenait le temps – et la peine – de regarder encore Lag Baomer… Trente-troisième des jours qui s’étendent entre Pessa’h et Chavouot, étape de l’attente impatiente depuis la sortie d’Egypte jusqu’au Don de la Torah, fin d’une tragique – quoique antique – épidémie, temps de cette joie liée à celle de Rabbi Chimon Bar Yo’haï : les thèmes sont si nombreux qu’il pourrait sembler presque inutile, ou très ambitieux, d’y revenir… Ce jour éclaire toute la semaine. Comment alors ne pas penser, une fois de plus et jamais une fois de trop, à ces centaines, ces milliers d’enfants qui se réunissent réunis partout dans le monde ? Comment ne pas penser à eux qui, en ce jour, savent clamer haut et fort leur bonheur d’être Juif, tous ensemble, par leurs jeux et leurs chants ? Et les messages qu’ils donnent sont ceux, éternels, de la connaissance, de la fidélité et du courage. Ce sont les messages de l’éducation juive.
C’est peut-être ainsi que Lag Baomer livre son grand secret. Car il serait facile de n’en faire qu’une commémoration parmi toutes les autres ou une fête en l’honneur d’un de nos grands Sages qui, au fil des siècles, serait devenue une sorte de folklore émouvant, chaleureux… et sans conséquence. Mais ce n’est pas de cela que les hommes peuvent vivre. Leur vie, ils la tirent justement de la conscience qu’ils s’inscrivent dans un projet qu’ils portent et qui les emportent à la fois. Ils la tirent de cette justesse de comportement qui fait qu’un enfant juif est capable de ressentir pleinement que la joie de Rabbi Chimon le concerne, et pas seulement au titre de l’histoire. Ils la tirent du fait qu’un tel événement est aussi un facteur d’avenir. Comme un bel arbre qui grandit d’autant mieux que ses racines sont plus profondes.
Il faut nous souvenir : Rabbi Chimon vécut en une époque très dure. L’empire romain occupait Israël, l’oppression grandissait et nul ne savait de quoi le lendemain serait fait. Céder à l’envahisseur, désespérer d’impuissance étaient des tentations faciles. Rabbi Chimon maintint le judaïsme, consacra sa vie à l’étude de la Torah et donna au monde tout ce dont il avait besoin. Lorsque les enfants fêtent Lag Baomer, c’est cela qu’ils célèbrent : le don de soi, l’amour de l’autre, le souci de tous, l’impératif de la connaissance, la recherche de la paix. C’est cette volonté multiple qu’ils déclarent solennellement mettre en œuvre lorsqu’ils chantent et qu’ils jouent. C’est cette volonté qu’ils concrétisent lorsque, au lendemain de Lag Baomer, le monde n’est décidément plus tout à fait le même, grâce à eux. A présent que la route, par leur passage, s’est éclaircie, à nous de les accompagner. Le monde est obscur et les obstacles nombreux ? Le chemin n’est plus très long. Déjà la lumière se lève.
Une double grandeur
Il est souligné que Machia’h sera «de la maison de David et de la descendance de Salomon». Ce double point désigne sa nature particulière.
En effet, Machia’h incarnera la grandeur de David qui se caractérise par la notion de royauté ainsi que celle de Salomon lié à l’idée de paix – Chalom. Cela signifie qu’il détiendra la plénitude de la royauté, y compris la sagesse qui lui est attachée. En ce sens, il sera «encore plus sage que Salomon».
(D’après un commentaire du Rabbi – 20 Iyar 5751)
Behar
Résumé
Sur la montagne de Sinaï, D.ieu communique à Moché les lois de l’année chabbatique : toutes les septièmes années, tout travail sur la terre doit être interrompu et ses produits rendus accessibles à tous, hommes et animaux.
Sept cycles chabbatiques sont suivis d’une cinquantième année : l’année du Jubilée au cours de laquelle, tout travail de la terre cesse, tous les serviteurs liés par contrat sont libérés et tous les états ancestraux de la Terre Sainte, qui ont été vendus, reviennent à leurs propriétaires originels.
Behar contient également des lois supplémentaires concernant la vente de terres et les interdictions de fraude et d’usure.
La Paracha de cette semaine décrit la mitsva de l’année du Jubilée. Durant cette année, la terre, qui constituait l’héritage ancestral d’une personne et qu’elle avait vendue, lui était rendue. Cela demande une explication : quand les Juifs entrèrent en Erets Israël, la terre fut divisée entre eux, chacun recevant une part équivalente. Il leur fut alors donné l’opportunité de travailler la terre. Inévitablement, certains réussirent mieux que les autres. Et parmi eux, il en fut qui rencontrèrent un tel échec qu’ils furent obligés de vendre leur terre pour combler leurs besoins essentiels.
Pendant que chacun vivait son histoire personnelle, le peuple, en tant qu’entité, comptait les années. Tous les sept ans, arrivait l’année chabbatique lors de laquelle la terre ne pouvait pas être cultivée. Après sept cycles de sept années chabbatiques, 49 ans, survenait le Jubilée. Au début de cette année-là, toutes les propriétés qui avaient été vendues revenaient au propriétaire originel ou à ses héritiers.
D’un côté, ce processus constitue une extraordinaire opportunité de renaissance ou de renouvellement. Mais par ailleurs, nous savons tous, par expérience, que lorsque l’on donne une seconde chance à une personne, il y a de fortes probabilités pour qu’elle agisse à nouveau exactement comme elle l’a fait la première fois. Après tout, nos habitudes sont ancrées dans notre psychisme au point qu’il y a fort peu de chances pour que l’on en change.
Quelle est alors la raison d’être du Jubilée ?
Il vient donner une opportunité à l’individu. Il l’invite à briser ses modes de fonctionnement présents et à commencer quelque chose de nouveau.
Cela va encore plus loin. La mitsva du Jubilée souligne également la force inhérente à chacun, force qui lui permet de briser son mode de conduite antérieur et d’amorcer quelque chose de nouveau plutôt que de répéter les événements du passé.
Le Jubilée commence avec le son du Choffar. En plus de le sonner à Roch Hachana, on le fait également retentir à Yom Kippour, en l’honneur du Jubilée. L’appel du Chofar émane de l’essence même de notre être. Il est simple, sans artifices musicaux : il s’agit de l’essence du Juif qui appelle son père dans les Cieux.
C’est donc à partir de son être le plus essentiel, le plus profond, que l’homme commence à construire dans le Jubilée. L’essence du Juif est «une réelle partie de D.ieu», infinie, illimitée et absolue, comme D.ieu Lui-même. Cependant, bien souvent, ce potentiel divin reste latent et l’individu se livre à sa routine quotidienne, sans grands changements ou mutations. Le son du Choffar remue son potentiel divin et l’engage à se révéler. Il donne à cet homme le potentiel d’y accéder et à commencer une vie totalement différente.
Perspectives
Le cycle qui mène à l’année chabbatique, tout comme le cycle des sept jours de la semaine, fait allusion à un cycle à la perspective bien plus large. L’histoire du monde est divisée en six millénaires aboutissant au septième millénaire, tout comme les six années débouchent sur l’année chabbatique et les six jours de la semaine sur son septième jour : le Chabbat.
Le septième millénaire est une ère où la Présence Divine est tangible. Pour citer les mots de nos Sages : ce sera une ère où «tout est Chabbat et repos pour une vie éternelle».
Il ne s’agit pas d’une prophétie concernant le futur. Ce sont des paroles qui nous font prendre conscience de la période exceptionnelle dans laquelle nous vivons, aujourd’hui. Si nous allons dans le sens des concepts que l’on a précédemment évoqués, aujourd’hui, c’est vendredi après-midi. Midi est passé. Maintenant, à cette heure-ci, dans les foyers juifs, la maison commence à prendre une «couleur de Chabbat». De la même façon, en ce moment-même, la maison de D.ieu, le monde, commence à se préparer à l’Ere de la Rédemption. En ouvrant nos yeux devant la dynamique messianique en marche dans nos vies, au présent, notre attente du Machia’h peut être chargée de la force d’une idée sur le point de se réaliser.
En quoi consiste l’obligation de respecter sa parole ?
Dans toute transaction commerciale, on doit respecter sa parole comme il est écrit (Vayikra - Lévitique 19 : 36) : «Tu auras des poids (Hine) justes». Nos Sages commentent : «Quand tu dis Hine (qui peut aussi se comprendre comme «oui»), ton ‘oui’ doit être juste et ton ‘non’ doit être juste». Cela signifie que tu dois respecter ta propre parole.
Celui qui change le sens de ses paroles est considéré comme s’il servait des idoles.
Le Rambam écrit : «Le Sage ne s’engage pas dans les affaires s’il n’y est pas tenu par la Torah afin qu’il puisse tenir sa parole et ne pas la changer».
Même dans des relations amicales et quand il s’agit de prévenir une querelle, on ne formulera pas une promesse mensongère. (Il est écrit qu’on a le droit de changer le sens de ses paroles pour maintenir la paix : cela s’applique seulement pour le récit d’événements déjà passés mais pas pour des événements à venir).
Celui qui a la crainte de D.ieu s’efforcera même d’accomplir la décision qu’il n’a prise que dans son cœur comme il est écrit (Tehilim – Psaumes 15 : 2) : «Il parle la vérité dans son cœur». La Guemara rapporte l’histoire de Rav Safra qui souhaitait vendre un objet ; comme il était en train de réciter le Chema, l’acheteur proposa un prix plus élevé mais, après avoir achevé le Chema, Rav Safra ne voulut pas profiter de la situation et le vendit au premier prix qu’il avait décidé dans son for intérieur.
(d’après Rav Yossef Ginsburgh – Sichat Hachavoua N° 1531)
Un ver dans les Téfilines
J’avais construit ma première maison de mes propres mains dans la forêt appelée Baal Chem Tov près de la ville de Méron en Galilée. Alors que je venais d’achever la structure en bois, j’oubliai que j’y avais laissé des bougies allumées. Le vent propagea le feu dans toute la maison qui fut entièrement détruite. J’y avais une belle bibliothèque mais tous les livres furent réduits en cendres. Sauf un ! Son titre Bra’ha Vehatsla’ha : c’était un recueil de conseils donnés par le Rabbi, avec sa photo sur la couverture. Ma mère l’avait reçu en cadeau d’un Chalia’h du Rabbi à Herzliya pour la remercier d’un don qu’elle avait fait quelques années plus tôt et elle me l’avait offert. C’est le seul livre qui est sorti indemne de cet incendie…
J’entrepris alors de construire une seconde maison. J’avais acheté des planches, des clous et tout le matériel nécessaire ; j’ai tout assemblé moi-même. Mais vers la fin de la construction, j’ai commencé à ressentir des douleurs épouvantables dans le dos. Naïvement, je me suis dit que cela disparaîtra comme c’était venu mais ce ne fut pas le cas et les douleurs devinrent de plus en plus intenses.
Je restais trois jours au lit, incapable de bouger un muscle. Chaque mouvement me causait une douleur terrible. J’ai alors décidé de faire appel au professeur qui m’avait enseigné la médecine alternative Shiatsu mais, malgré son habileté, ses efforts ne servirent à rien.
J’étais désespéré et cette situation n’arrangeait pas mon moral. Au bout de deux jours, je décidai d’accomplir un effort surhumain et de me rendre auprès de la tombe de Rabbi Chimone Bar Yo’haï, non loin de chez moi, pour y prier avec ferveur. Alors que j’étais assis, un jeune Loubavitch passa devant moi et déposa un livret Dvar Mal’hout ouvert sur la table, sans doute pour l’étudier quelques minutes plus tard. Instinctivement, je me mis à le lire. Et je n’en crus pas mes yeux. Le texte sur la page justement ouverte – j’appris plus tard qu’il s’agissait d’une lettre du Rabbi de Loubavitch – évoquait les vertèbres. Le Rabbi remarquait que, si elles représentent une part importante du corps humain, permettant à la personne de se tenir droite, elles n’étaient pas considérées comme un membre. Il en est de même, poursuivait le Rabbi, pour la prière : alors que la prière permet à un Juif de se lier à D.ieu, elle n’est pas considérée comme une Mitsva de la Torah. La colonne vertébrale compte dix-huit vertèbres tout comme la prière de la Amida, prononcée debout, compte dix-huit bénédictions.
Je lus tout cela avec des yeux incrédules. Je me tenais là, souffrant de terribles maux de dos et la Providence Divine me mettait face à ces explications du Rabbi. Je continuai à lire. Dans un extrait d’une autre lettre, le Rabbi mentionnait l’importance de faire vérifier les Téfilines. C’était quelque chose que je n’avais jamais effectué auparavant. Depuis cinq jours, je n’avais pas été capable de prier correctement et certainement pas de me tenir debout pour la Amida ; peut-être y avait-il un problème avec mes Téfilines ?
Je ne perdis pas de temps. Malgré mes douleurs, je me rendis immédiatement directement de la synagogue de Rabbi Chimone Bar Yo’haï vers le domicile d’un Sofère (scribe) à Tsfat (Safed). Il accepta d’ouvrir mes Téfilines devant moi sans attendre. Quand il ouvrit les boîtiers et en retira les parchemins, il s’écria : «Vos Téfilines sont absolument Passoul, non-cachères !». Il s’avéra qu’un ver avait réussi à s’introduire dans le boîtier et avait complètement abîmé le parchemin ! J’étais choqué !
Le Sofère mit les parchemins dans une boîte réservée aux parchemins à enterrer (car devenus Passoul) et me prêta une paire de Téfilines à utiliser en attendant. Sur le chemin de retour, j’étais absolument bouleversé, horrifié à l’idée que j’avais mis, pendant des années peut-être, des Téfilines qui n’étaient pas cachères. Mais, par ailleurs, j’étais bouleversé que le Créateur ait mis sur ma route une lettre du Rabbi qui m’avait conduit à faire vérifier mes Téfilines : maintenant je mettrai des Téfilines strictement cachères. Et pourtant, j’étais loin d’imaginer ce qui allait suivre.
Dès que j’arrivai chez moi, bien qu’on soit déjà en fin de matinée, je mis les Téfilines et commençai à prier. Jusqu’à présent, pour la Amida, je me levai avec beaucoup de difficultés, en m’appuyant sur le dos d’une chaise placée devant moi. Quand j’arrivai au verset final «Ossé Chalom…», je me tournai à droite, puis au milieu puis à gauche et réalisai que j’avais été capable de le faire sans éprouver aucune gêne ! Et depuis ce moment, mes douleurs de dos ont disparu tout aussi subitement qu’elles étaient apparues ! Je n’ose pas penser à ce que je serais aujourd’hui si je n’avais pas lu cette lettre du Rabbi recommandant de vérifier mes Téfilines !
Dr Matan Yehoshua Sadovnik
Traduit par Feiga Lubecki