Samedi, 24 décembre 2022

  • Mikets
Editorial

 Un monde de lumière

Voici le temps de la lumière croissante ! En effet, nous sommes entrés de plain-pied dans la fête de ‘Hanouccah et celle-ci présente une caractéristique littéralement prodigieuse. La célébration s’exprimant au travers de la lumière, celle-ci, outre ses qualités propres, ne fait que grandir et se multiplier. La constatation a été faite depuis longtemps : alors que, dès le premier soir de ‘Hanouccah, elle brillait fièrement au sommet du chandelier, quand le deuxième soir est venu, elle n’a plus paru suffisante. La veille, elle avait parfaitement accompli son œuvre mais, un jour plus tard, il fallait aller plus loin. Et cela se reproduit de soir en soir et c’est ainsi que la lumière ne cesse de se multiplier jusqu’au dernier soir de la fête où elle illuminera sans partage le ciel de nos consciences.

Alors que nous pouvons penser vivre des temps obscurs, l’exemple qui nous ainsi donné est essentiel. Aucune obscurité, la plus épaisse soit-elle, ne peut tenir devant la moindre lumière, aussi petite qu’elle soit. C’est bien dans la nature des choses : les ténèbres ne sont jamais une donnée éternelle. Elles peuvent paraître l’emporter et même grandir au-delà de toute mesure, mais elles sont condamnées par la clarté qui monte. Il faut ainsi être pénétré de cette vérité : la lumière est victorieuse de fondation. Il nous appartient cependant de susciter sa croissance avec une rapidité accélérée. Il nous appartient ainsi de ne pas nous contenter de ses premiers acquis et de faire en sorte que, de victoire en victoire, nous allions jusqu’à l’accomplissement ultime.

Tout ceci n’est pas qu’une leçon d’optimisme. C’est une véritable attitude de vie qui nous est proposée. Savoir toujours regarder plus loin, imaginer sans cesse que, même si beaucoup a été fait, tout peut encore progresser et que c’est un monde meilleur dans l’absolu qui se tient au-devant de nous. ‘Hanouccah nous délivre là un message précieux : l’effort nous conduit plus haut et plus loin. Loin d’être un objectif inaccessible, un monde de lumière nous attend, c’est le lieu de vie des hommes. Il est fait de nos espoirs et de nos actions, à nous de le bâtir.

Etincelles de Machiah

 Comme le lever du soleil

C’est un verset explicite dans la Torah : « Par Ma vie, la gloire de D.ieu emplira toute la terre ». D.ieu promet qu’à la fin, le jour viendra où Sa gloire emplira le monde entier. Nous devons y croire avec la même foi que nous mettons à croire au lever du soleil chaque matin. Car, à la fin, le Royaume des Cieux sera établi. Mais il nous appartient d’attendre avec impatience ce jour.

(D’après Midbar Kdémot du ‘Hida)

Vivre avec la Paracha

 Mikets

L’emprisonnement de Yossef prend fin lorsque le Pharaon rêve de sept vaches grasses avalées par sept vaches chétives puis de sept épis de blé pleins avalés par sept épis maigres. Yossef interprète ces rêves comme signifiant que sept années de richesse seront suivies de sept années de famine et il conseille au Pharaon d’engranger des provisions durant les années de plénitude. Le Pharaon nomme Yossef gouverneur de l’Egypte. Yossef épouse Asnath, la fille adoptive de Poutiphar et ils ont deux fils, Menaché et Ephraïm.

La famine se répand dans la région et seule l’Égypte possède de la nourriture. Dix des frères de Yossef viennent s’approvisionner en grains en Égypte. Le plus jeune frère, Binyamine reste à la maison, Yaakov craignant pour sa sécurité.

Yossef reconnaît ses frères mais ce n’est pas réciproque. Il les accuse d’être des espions et exige qu’ils reviennent accompagnés de Binyamine, pour prouver la véracité de leurs dires. Il garde Chimone en otage. Plus tard, les frères découvrent que l’argent payé pour leurs provisions leur a été mystérieusement restitué.

Yaakov accepte d’envoyer Binyamine à la condition que Yehouda en prenne la responsabilité personnelle et éternelle. Cette fois-ci, Yossef les accueille chaleureusement, libère Chimone et les invite à un festin chez lui. Mais alors, il cache son gobelet en argent, censé avoir des pouvoirs magiques, dans le sac de Binyamine. Quand les frères se mettent en route pour repartir, le matin suivant, ils sont poursuivis, fouillés et arrêtés quand le gobelet est découvert chez Binyamine. Yossef leur offre la liberté en échange de Binyamine qu’il gardera comme esclave.

Le champ et la rive du fleuve

« Le Pharaon dit à Yossef : ‘Dans mon rêve, je me tiens sur la rive du fleuve. Et voici que sept vaches sortent du fleuve…’ » (Beréchit 41 :17-18)

« Yossef fit un rêve et il le raconta à ses frères… ‘Nous rassemblions des gerbes dans le champ…’ » (Beréchit 37 : 5-7)

Deux rêveurs : Yossef et le Pharaon

Tous deux entrevoient le futur dans leurs rêves mais avec une différence significative. Yossef rassemble activement les morceaux de sa vie, réunissant ses tiges et les liant pour qu’elles forment un tout complet. En revanche, le Pharaon est un témoin passif de sa destinée.

Nombreux sont ceux qui sont séduits par les attraits de la vie du Pharaon. « Nous nous souvenons du poisson que nous mangions gratuitement en Égypte » (Bamidbar 11 :5) grommelèrent les Enfants d’Israël après que D.ieu les eut arrachés des entraves et d’une forme de sécurité de l’esclavage. La vie est comme un repas gratuit, dans l’Égypte du Pharaon, bien que vous ne soyez pas libres de choisir, et a fortiori de composer, le menu. Il n’y a pas de choix dans votre vie mais pas non plus l’anxiété et la responsabilité qu’impliquent ces choix. Vous ne faites que vous tenir sur la rive du fleuve pendant que les vaches et les années se suivent et se dévorent mutuellement.

La vision du Pharaon peut représenter l’utopie de chaque esclave mais on ne tire aucune satisfaction et aucun accomplissement de ce poisson gratuit. Ce n’est que dans la tâche ardue des travaux du champ de la vie que la liberté essentielle peut se découvrir : la liberté de réaliser, la liberté de créer.

Les rêves du Pharaon et l’interprétation de Yossef

Le début de la Paracha évoque les rêves du Pharaon et l’impossibilité pour ses conseillers de lui en apporter une interprétation satisfaisante. Yossef fut alors convoqué et lui put les interpréter dans un sens qui donna satisfaction au Pharaon.

Les commentateurs posent un certain nombre de questions concernant l’interprétation de Yossef. La pensée, que sept belles et grasses vaches et sept épis de blé pleins, bons symbolisaient sept années d’abondance alors que sept autres vaches malsaines, émaciées et sept épis de blé desséchés représentaient sept années de famine, semble évidente.

Les belles vaches bien grasses sont la conséquence directe d’une plénitude d’herbe et de grains : symbole très clair d’une période d’abondance. Et bien évidemment, les vaches amaigries dénotent un manque de nourriture et les graines racornies, un manque d’eau.

En outre, le Pharaon vit dans son rêve que les vaches sortaient du Nil, dont les inondations annuelles pourvoyaient l’Égypte en eaux nécessaires pour l’irrigation et la culture. Puisque les vaches grasses et les grains pleins apparurent les premiers, il est logique qu’une période d’abondance précéderait une période de famine. Enfin, le fait que les vaches et les épis fûssent au nombre de sept indiquait clairement sept années de croissance.

Pourquoi donc les sages de l’Égypte ne réussirent-ils pas à comprendre quelque chose de si évident ? Pourquoi le Pharaon fut-il si enthousiasmé par la réponse de Yossef qu’il le nomma vice-roi ?

Une autre question se pose encore : dès que Yossef eut interprété les rêves, il s’empressa d’ajouter : « Et maintenant le Pharaon doit chercher un homme avec de la vision et de la sagesse et lui faire assumer la charge de l’Égypte. » (Beréchit 41 :33). Qu’est-ce qui l’engagea à continuer et à donner un conseil ? Le Pharaon ne lui avait demandé que d’interpréter les rêves et non de le conseiller sur les affaires d’Etat !

La difficulté à interpréter les rêves résultait du fait que « sept autres vaches malsaines et amaigries sortirent du Nil et se tinrent près des vaches déjà sur la rive du fleuve. » (41 :3) Si les sept vaches maigres symbolisaient sept années de famine suivant sept années de plénitude, pourquoi les deux groupes de vaches se tenaient-elles « ensemble » sur la rive ?

Les sages égyptiens en avaient donc conclu que la plénitude et la famine auraient lieu en même temps.

Mais l’approche de Yossef était différente. Il interpréta correctement le rêve comme signifiant que sept bonnes années seraient suivies de sept années de famine. Quant à savoir pourquoi les vaches étaient ensemble sur la rive, il répliqua que cela signifiait que quelqu’un devrait être nommé en Égypte pour veiller à ce que les grains des sept années d’abondance soient stockés pour les années de famine qui allaient suivre. Et c’est pour cela que les vaches étaient ensemble.

Quand des initiatives sont prises au début des sept années de richesse pour assurer qu’il y aura à manger pendant les sept années de famine, les deux groupes de vaches se rejoignent. De la même façon, durant les sept années de famine, les sept années d’abondance se font profondément ressentir.

C’est la raison pour laquelle le Pharaon fut si impressionné par la réponse de Yossef. Il ne s’agissait pas tant de son aptitude à interpréter les rêves que celle d’expliquer la juxtaposition des sept vaches grasses et des sept vaches maigres.

A un niveau plus spirituel, les rêves du Pharaon et l’interprétation de Yossef servent de prémices à la descente du Peuple juif en exil. C’est, en effet, le statut de leader de Yossef (qu’il gagna grâce à son interprétation) qui allait susciter les circonstances qui conduiraient Yaakov et sa famille en Égypte. Ces rêves et leur interprétation servent donc de parabole pour l’exil.

Au cours d’un rêve, il est possible que se réunissent deux opposés. L’exil est donc comparé à un rêve car durant l’exil, « les vaches grasses » (le désir d’être bon et saint) et « les vaches maigres » (le désir d’agir de façon fâcheuse) peuvent résider chez un même individu et presque simultanément.

En engrangeant des provisions durant les périodes de bien spirituel, l’on évite la famine spirituelle et l’on est constamment béni de toutes sortes de bonnes choses.

Le Coin de la Halacha

 Les femmes et jeunes filles ont-elles l’obligation d’allumer la ‘Hanoukia ?

Réponse : Les femmes et jeunes filles ont subi de terribles restrictions durant l’occupation gréco syrienne.

Par ailleurs, la victoire militaire fut en grande partie due à l’action héroïque d’une femme, Yehoudit. C’est pourquoi les femmes et filles ont l’obligation d’assister à l’allumage des lumières de ‘Hanouccah par un homme. Dans le cas où il n’y a pas d’homme (ou garçon de plus de treize ans) pour être acquittées, elles allumeront leurs propres lumières de la fête.

Que doit faire celui qui rentre chez lui très tard le soir de ‘Hanouccah ?

Normalement, on doit allumer les lumières de ‘Hanouccah de façon à « publier le miracle », donc quand les gens sont réveillés.

On peut allumer les lumières de ‘Hanouccah en principe toute la nuit, à condition que quelqu’un soit éveillé dans la maison. Si tout le monde dort, il faudrait normalement réveiller au moins une personne.

Cependant, celui qui allume sa ‘Hanoukia alors que plus personne n’est éveillé ne sera pas réprimandé pour cela.

Comment agissent les élèves d’un internat ?

Selon certaines opinions, ils sont considérés comme membres d’une même famille et doivent donc allumer chacun leur ‘Hanoukia dans le réfectoire ; s’ils le désirent, ils peuvent avoir la « Kavana », l’intention de ne pas se rendre quitte et allumer leur ‘Hanoukia dans leur chambre à coucher qui est considérée comme leur véritable demeure.

D’autres décisionnaires tranchent qu’ils doivent a priori allumer leur ‘Hanoukia dans leur chambre à coucher.

Enfin, certains décisionnaires séfarades estiment que les pensionnaires d’un internat sont rendus quitte de leur obligation d’allumer du fait que leur père allume chez lui à la maison en pensant à eux.

Si on allume la ‘Hanoukia en public, dans une synagogue ou une fête, doit-on prononcer les bénédictions ?

De nombreux décisionnaires tranchent qu’il faut allumer la ‘Hanoukia avec les bénédictions dans tout endroit où des Juifs se réunissent, que ce soit lors d’une fête, un restaurant, un mariage etc… afin de rendre le miracle public.

Même si on assiste à un allumage public, on doit allumer sa ‘Hanoukia avec les bénédictions une fois qu’on est rentré chez soi.

 (d’après Rav Yossef Ginsburgh)

Le Recit de la Semaine

 Le changement a commencé le soir de ‘Hanouccah…

Pendant un certain temps, je me rendais en stop tous les matins depuis le sud jusqu’à Jérusalem. Une fois, un étudiant embarqua dans la même voiture et nous avons bavardé. Il travaillait dans le high-tech pour la compagnie Intel. Quand il apprit que j’étais un émissaire du Rabbi de Loubavitch, il me raconta une histoire que je n’avais sûrement jamais entendue et qui était arrivée à un de ses maîtres, le professeur Erane Chor de l’Université Ben Gourion de Béer Chéva. Il me raconta :

« C’est une personnalité reconnue, chef du département d’ingénierie mécanique, sollicitée par les grandes compagnies internationales telles que Volkswagen et d’autres. Un jour, je suis arrivé avant le début des cours et j’ai eu l’occasion de lui poser une question qui m’intriguait : pourquoi veillait-il à ne manger aucun produit animal et à ne se nourrir que de plantes ? Il sourit et accepta de me répondre : c’est grâce au Rabbi de Loubavitch !

« En 1984, ce professeur avait eu droit à une année sabbatique qu’il avait choisie de passer à Manchester, en Angleterre. Bien entendu, il ne s’était pas reposé sur ses lauriers et avait continué de s’investir dans ses recherches. Vers la fin de l’année, alors qu’il avait achevé avec succès encore un projet important, l’université locale prépara pour lui une soirée d’adieu avec remise d’un prix honorifique. Mais soudain, venus de nulle part, des maux de tête apparurent. Au début, le professeur n’y attacha pas trop d’importance mais ils s’aggravèrent au point qu’on dut annuler toute la cérémonie et qu’il fallut l’hospitaliser : il était très faible mais surtout inquiet car on ne parvenait pas à déterminer la cause de ces douleurs et aussi de l’augmentation inexpliquée des globules blancs dans son sang. Toutes sortes de traitements furent proposés mais en vain. Et le moral du professeur était au plus bas. La fête de ‘Hanouccah approchait mais cela ne l’impressionnait pas : il ne la célébrait pas quand il habitait en Israël, alors à l’étranger encore moins !

Par contre, pour les élèves de la Yechiva Loubavitch de Manchester, ‘Hanouccah était l’occasion de rendre visite aux Juifs hospitalisés : le bureau des infirmières leur avait fourni une liste des patients. Quand le professeur vit arriver ces deux jeunes garçons en costume noir, chapeau et barbe naissante, sa première réaction fut la surprise mais aussi l’énervement. Cependant, il était un homme courtois et ne voulut pas les renvoyer a priori : persuadé que la direction de l’hôpital ne permettrait pas qu’on allume des bougies, il fut étonné d’apprendre que les jeunes gens avaient obtenu la permission d’y procéder avec les patients. Il s’exécuta donc de bonne grâce et alluma les bougies devant sa fenêtre sous leur direction.

Le lendemain, ils revinrent ! Justement au moment où il prenait son repas. Ils attendirent patiemment qu’il termine, l’aidèrent à allumer puis discutèrent avec lui. Petit à petit, la conversation dévia sur les questions de cacherout. Les garçons insistaient sur l’influence de l’alimentation sur la santé, physique et mentale et, pour le professeur, c’était là des questions auxquelles il n’avait jamais trop réfléchi. Sans qu’il réalise ce qui arrivait, il accepta que les garçons commandent pour lui des repas cachères apportés par un traiteur agréé par l’hôpital. Mais quand le repas arriva, il était froid et vraiment peu appétissant. Déçu et affamé, le professeur dut se contenter de manger quelques salades et des fruits. Intérieurement, il maudissait presque les jeunes gens qui l’avaient persuadé de manger cachère.

Le lendemain matin, comme d’habitude, l’infirmière procéda à une prise de sang. Une heure plus tard, le médecin en charge arriva et annonça, à son grand étonnement, qu’il y avait une nette amélioration. Le soir, le repas cachère arriva : froid et misérable. Une fois de plus, le professeur dut se contenter de fruits et légumes mais cette fois, sa déception s’accompagnait d’un début d’espoir que sa situation médicale s’arrange. Effectivement, le lendemain matin, la prise de sang s’avéra encore plus encourageante ; les maux de tête et les différents malaises avaient diminué et, au bout de deux jours, le professeur put rentrer chez lui.

Là il se remit à manger normalement et les douleurs revinrent… Il pensa retourner à l’hôpital quand il reçut un coup de téléphone de l’équipe médicale : on avait trouvé la source de ses problèmes ! De fait, il avait développé une allergie à certaines bactéries présentes dans les produits issus du monde animal. C’est pourquoi les jours où il s’était contenté de fruits et légumes, les résultats des prises de sang avaient été encourageants. « Si vous n’aviez pas cessé de manger ces produits animaux, nous n’aurions jamais pu trouver la solution ! ».

Depuis ce jour, le professeur Chor surveille attentivement son alimentation mais aussi remercie ces jeunes gens dont l’entêtement à lui faire allumer les bougies de ‘Hanouccah et à respecter les lois de la cacherout lui avait été si bénéfique : « Le Rabbi m’a véritablement sauvé la vie par l’intermédiaire de ses fidèles émissaires ! ».

Mena’hem Zigelbaum – Sipour Chel ‘Hag

Traduit par Feiga Lubecki