Transformons !
Depuis le début de cette grande période des deux mois d’Adar successifs, on a beaucoup parlé, avec juste raison, de l’importance et de la présence de la joie. Et sans doute y reviendra-t-on car il s’agit bien là du thème majeur du moment et sa puissance imprègne chacun des jours qui passent. Toutefois, il nous faut aller plus loin car les temps que nous allons vivre nous conduisent littéralement sur un autre plan.
Un verset de la Méguila, le livre d’Esther dont la lumière particulière est déjà présente, nous indique la voie : « Et tout fut transformé » nous dit-il. Certes, cela doit être d’abord lu dans le contexte des événements de Pourim. A Babylone, en exil, l’existence même du Peuple juif était en jeu, au-delà de la simple menace d’un danger imminent. Nous en étions à cette terrible situation où tout semblait perdu, où la seule conclusion possible semblait être celle de la tragédie ultime. Et brutalement, après une succession d’apparents accidents de l’histoire, ce qui devait déboucher sur le drame conduit à une victoire absolue. Ceux qui rêvaient de notre extermination sont balayés du monde des hommes et la vie reprend, vers de nouvelles hauteurs.
Tout cela résonne étrangement à nos oreilles, comme si c’était une épopée de notre temps qui était ainsi racontée. De fait, nous vivons, nous aussi, des temps où se pose parfois la question de l’avenir. Et cela est vrai tant au niveau collectif qu’au niveau individuel. Alors qu’autour de nous le monde rugit et que nous pouvons nous voir comme bien faibles en comparaison, le désespoir peut se faire sentir. Il pourrait ainsi monter peu à peu et nous faire oublier les vraies ressources de la vie. Vient alors le temps d’Adar et de son pouvoir. « Et tout fut transformé » dit le texte. Ces quelques mots recèlent un véritable message pour chacun. Qui que l’on soit, où que l’on vive, quelle que soit notre situation, tout peut toujours être transformé, et il n’existe pas d’exception à ce principe.
C’est dire que nous possédons la clé de notre vie. Nous ne sommes pas les jouets impuissants de forces qui nous dépassent mais les acteurs conscients qui façonnons notre existence jour après jour. Il suffit de vouloir et d’entreprendre pour que les choses « soient transformées » pour le bien. Avec ce double Adar, c’est véritablement un nouveau champ qui s’ouvre devant tous. Avançons-nous sur cet espace libre, nous y construirons des merveilles.
Une prière à voix haute
La ‘Hassidout explique (Torah Or, fin de Parchat Vayigach) que l’on dira la prière de la Amida à voix haute dans les temps messianiques.
L’origine de cet enseignement peut être retrouvé dans un texte du Zohar qui commente le verset décrivant la prière adressée par Rachel à D.ieu en faveur du peuple juif : « Une voix est entendue à Ramah ». Le mot « Ramah » est, en première lecture, un nom de lieu. Toutefois, il peut également être traduit par « à voix haute ». Le Zohar apporte alors son commentaire (I, 210a) : « cela fait allusion au monde futur. »
(d’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch,
Chabbat Parchat Vayigach 5746)
Ki Tissa
Chaque membre du Peuple juif reçoit l’injonction d’apporter la contribution précise d’un demi-chékel d’argent pour le Sanctuaire. Des instructions sont également données concernant la fabrication du bassin d’eau du Sanctuaire, de l’huile d’onction et des encens. Les artisans « au cœur sage », Betsalel et Aholiav sont chargés de la construction du Sanctuaire et une fois encore le peuple reçoit le commandement d’observer le Chabbat.
Moché ne redescend pas du Mont Sinaï quand le Peuple l’attend et celui-ci fabrique un veau d’or et l’adore. D.ieu propose alors de détruire cette nation pécheresse mais Moché intercède en sa faveur. Il descend de la montagne, portant les Tables de la Loi sur lesquelles sont gravés les Dix Commandements. Quand il voit le peuple danser autour de son idole, il brise les Tables, détruit le veau d’or et fait mettre à mort les principaux instigateurs. Il retourne alors vers D.ieu pour Lui dire : « Si Tu ne leur pardonnes pas, efface-moi du livre que Tu as écrit ».
D.ieu pardonne mais dit que le résultat de ce péché sera ressenti pendant de nombreuses générations. Au début, D.ieu propose de leur envoyer Son ange mais Moché insiste pour que D.ieu Lui-même accompagne Son peuple vers la Terre Promise.
Moché prépare de nouvelles Tables et, une fois de plus, il grimpe sur la montagne où D.ieu écrit de nouvelles Tables de l’Alliance. Sur la montagne, Moché perçoit également une vision des « treize attributs de miséricorde ». A son retour, le visage de Moché irradie d’une telle lumière qu’il doit le cacher derrière un voile qu’il n’enlève que pour parler à D.ieu et enseigner Ses lois au peuple.
A propos de la Paracha Ki tissa, se posent différentes questions. La Paracha commence par une énumération de détails concernant le service du Grand-Prêtre dans le Tabernacle (Michkan):
1. La taxe du demi-chékel utilisée pour financer les sacrifices collectifs
2. Le bassin d’ablutions, dernier des ustensiles du Tabernacle
3. L’huile particulière utilisée pour oindre les ustensiles et les prêtres
4. Les ingrédients de l’encens
5. La nomination de l’artisan chef qui façonnera le Tabernacle et ses revêtements
6. Enfin, le commandement de ne pas violer le Chabbat au cours de la construction du Tabernacle.
Puis, la Torah abandonne le sujet du Tabernacle et reprend le récit du Don de la Torah qu’elle a mis de côté à la fin de la Paracha Michpatim. Une brève description des Premières Tables de la Loi est tracée et nous sommes brutalement plongés dans l’épisode du veau d’or et de ses tragiques conséquences. Suit la réconciliation entre D.ieu et le peuple, négociée par Moché. Elle renferme quelques-uns des moments les plus mystiques de la Torah et culmine avec la révélation des Treize Attributs de Miséricorde Divine, le renouvellement de l’alliance et finalement la descente de Moché du Mont Sinaï avec les secondes Tables de la Loi.
Toute la Paracha semble ne pas être à sa place. La première partie, les derniers détails du Tabernacle, semble appartenir à la Paracha Terouma ou/et Tétsavé. Sa seconde partie, le veau d’or et ses conséquences, devrait venir après Yitro et Michpatim. Plus encore, en observant la suite du texte, nous constatons que les deux Parachiot suivantes (Vayakhel et Pekoudé) reviennent une fois de plus sur le sujet du Tabernacle, décrivant sa construction effective. L’histoire du veau d’or est donc extraite de son emplacement, comme suite du Don de la Torah, et insérée entre les instructions concernant la construction du Tabernacle et leur exécution. Pourquoi ?
Une clé de la réponse à ces questions se trouve dans le nom même de la Paracha : Ki Tissa. Ces mots sont les premiers du verset qui, traduit littéralement, signifie : « quand tu monteras les têtes des Enfants d’Israël ». Traduit habituellement par « quand tu feras le recensement des Enfants d’Israël », leur sens littéral implique que tout le contenu de la Paracha est un processus par lequel le Peuple Juif s’élève à des hauteurs nouvelles. En d’autres termes, après que le but de la Création ait été apparemment atteint par le Don de la Torah (Yitro et Michpatim) et l’édification du Tabernacle (Terouma et Tétsavé), des niveaux encore plus élevés restent à gagner.
La question la plus difficile de cette Paracha est peut-être : comment le Peuple juif, après avoir été témoin des dix plaies et de l’ouverture de la mer, après avoir reçu la Torah au mont Sinaï à peine quarante jours plus tôt, put-il commettre la faute du veau d’or ? Le Talmud interroge : « Israël n’était pas capable de commettre un tel acte ! » Sa réponse indique que « toute l’histoire était un décret de D.ieu afin de donner un précédent pour le pénitent ». En d’autres termes, D.ieu manœuvra le Peuple juif pour qu’il se livre à cette faute afin qu’il s’en repente et connaisse la douceur de la réconciliation.
Le paradoxe d’une faute est que le repentir permet de forger un lien plus profond avec D.ieu. Avant de pécher, l’individu se rappelle qu’il y a un D.ieu Qui lui demande de faire telle ou telle tâche, il n’a aucun problème pour s’en acquitter. Il grandit spirituellement dans sa relation avec Lui. Mais une fois qu’il faute, il se rend compte qu’aussi parfaite qu’ait pu être sa relation avec D.ieu, elle n’était ni assez solide, ni assez profonde pour l’en empêcher. Par son choix, il a montré que l’attrait de la faute l’a emporté sur son attachement à D.ieu.
Il lui faut donc plonger en lui-même pour trouver un lieu dans son âme où D.ieu signifie plus pour lui que le plaisir offert par cette défaillance. Cela s’appelle la Techouva (retour à D.ieu). Si elle est véritable, l’homme a désormais atteint un endroit en lui-même où sa relation à D.ieu est si forte qu’il ne commettra plus l’erreur pour laquelle il se repent. De toute évidence, plus la faute est sérieuse, plus grande est la Techouva requise et plus profond est le nouveau lien qui se crée entre lui et D.ieu.
Il est également évident que ce processus ne fonctionne que si l’individu pèche « accidentellement », comme s’il était dans un état de « folie ponctuelle ». C’est la raison pour laquelle D.ieu dut orchestrer l’accident du veau d’or dans lequel le Peuple juif tomba dans trois fautes essentielles : l’idolâtrie, l’adultère et le meurtre. En descendant dans les abîmes les plus profonds, le peuple put dès lors s’élever aux plus hauts niveaux de la réconciliation avec D.ieu. La révélation des Treize Attributs de Miséricorde le manifeste. D.ieu y affirme le fait que Son alliance avec le Peuple juif transcende la relation basée sur la seule obéissance aux commandements. Elle pave donc le chemin de la Techouva.
A cette lumière, la Paracha Ki Tissa renferme l’entière perspective de la création : elle commence avec la perfection originelle (le Tabernacle et les premières Tables de la Loi), se poursuit avec le drame de l’histoire (l’accident du veau d’or qui rejoue dans un certain sens la faute de l’Arbre de la Connaissance) et s’achève avec l’avant-goût de l’aboutissement messianique (le renouvellement de l’Alliance et les nouvelles Tables de la Loi) qui élèvera le monde à un niveau de perfection inconnu.
Cela explique pourquoi la Paracha commence par la taxe du demi-chékel. Il s’agit là d’un processus de Techouva : l’argent collecté finançait les sacrifices collectifs qui rachetaient les fautes du peuple. Les autres détails du Tabernacle nous indiquent que le but du Tabernacle, la résidence de la présence de D.ieu dans le monde et dans l’homme, est accompli dans le contexte de la Techouva. C’est aussi pourquoi Ki Tissa est intercalée entre les instructions concernant le Tabernacle et leur réalisation : son contenu constitue la dimension intérieure de ces instructions. Il convient donc que cela suive l’aspect extérieur de ces instructions et en précède la réalisation.
Cette dynamique d’une perfection lumineuse, chute et réconciliation, se reflète par de nombreux aspects dans la Torah et dans notre vie quotidienne. Notre journée commence par notre abandon total à la Volonté divine, par le « Modé Ani », prière que nous récitons dès notre réveil et dans laquelle nous nous soumettons totalement à Lui. Nous restons absorbés par la Divinité dans nos prières matinales et l’étude de la Torah. Puis nous vaquons à nos affaires profanes dans lesquelles nous ressentons des épreuves et des fluctuations dans notre conscience divine. A la fin de la journée, nous évaluons la force de notre lien avec D.ieu pour voir s’il doit être renforcé. Alors nous pouvons à nouveau nous soumettre à Lui, mais à un niveau supérieur que précédemment, au moment de la prière du coucher où nous nous remettons entre Ses mains.
La leçon de la Paracha Ki Tissa nous accompagne chaque jour de notre vie, nous concentrant constamment vers notre but ultime : la venue du Machia’h.
Comment célèbre-t-on son anniversaire ?
Il est important de connaître sa date de naissance selon le calendrier hébraïque ; pour cela se reporter aux divers sites internet qui proposent cette équivalence, comme par exemple www.bethloubavitch-anniversaire.fr
Le jour de l’anniversaire est un jour important car le Mazal, la chance, augmente.
- On réfléchit en ce jour aux progrès accomplis depuis l’année précédente (en particulier dans les domaines de l’étude de la Torah, la prière et les actes de bienfaisance) ; on décide de réparer ce qui doit l’être et on prend de bonnes résolutions.
- On réunit sa famille et ses amis (le jour-même ou un peu plus tard) pour se souhaiter Le’Haïm (à la vie), pour échanger des mots de Torah, pour prier ensemble et donner la Tsedaka.
- On augmente les dons à la Tsedaka.
- un homme sera appelé à la Torah le Chabbat qui précède son anniversaire ou le jour-même si c’est Chabbat par exemple.
- On récitera si possible par-cœur (sinon en le lisant) un Maamar de ‘Hassidout ou au moins une partie.
- On récitera tout le livre de Tehilim (Psaumes) ou, au moins une partie.
- On ajoutera un Hidour (embellissement) dans une Mitsva.
- On récitera la bénédiction de Chéhé’héyanou avant de manger un fruit nouveau.
Chaque personne a son anniversaire une fois dans l’année : c’est donc l’occasion de souhaiter Mazal Tov en particulier à des personnes qui n’ont pas de famille.
(d’après DIRECTIVES DU RABBI)
Un bouton et des timbres…
Au début des années 70, j’ai remarqué qu’un vilain bouton était apparu sous mon oreille. Apparemment, cela ne semblait pas dangereux mais bien visible et ce n’était vraiment pas esthétique. Une fois la Rabbanit ‘Haya Mouchka (l’épouse du Rabbi), pour laquelle je travaillais en tant que secrétaire, me demanda pourquoi je n’allais pas consulter un docteur. J’ai répondu que j’en avais vu un effectivement mais il me demandait 12.000 dollars pour son intervention. Comme je n’avais pas souscrit d’assurance, j’avais été obligé de refuser. Elle me conseilla alors d’aller consulter Docteur Richter : « C’est un de nos bons amis », précisa-t-elle. Désabusé je remarquai : « C’est un bon ami pour vous mais pas pour moi ! ».
Je pensais que l’affaire s’arrêtait là mais, deux jours plus tard, j’ai reçu un appel du secrétariat de Docteur Richter : on m’informait que j’avais un rendez-vous dans deux jours. Je remerciais la secrétaire mais expliquai que je ne disposais pas de la somme de douze mille dollars. Elle répondit que le docteur lui avait simplement demandé de me fixer un rendez-vous et qu’il n’avait pas parlé d’honoraires. Dubitatif, je me suis présenté au rendez-vous, le docteur m’a examiné et me fixa un rendez-vous pour l’opération une semaine plus tard. Je l’informais à regret que je n’avais pas l’argent et il répondit : « Ce n’est pas votre problème ! ». Je ne comprenais pas : « Qu’est-ce que cela veut dire ? La Rabbanit va payer pour moi ? Il n’en est pas question ! ». Le docteur me calma : « Pas du tout ! Celui qui est un ami de la famille du Rabbi est un ami à nous ! Et on ne prend pas d’argent d’un ami ! ».
La veille du rendez-vous, il se passa quelque chose d’intéressant. La Rabbanit me tendit un sac rempli de timbres de collection : à mon avis, il y avait là plusieurs milliers de timbres ! Elle me demanda : « La fille de Docteur Richter collectionne les timbres. Donnez-lui cela de ma part ! ». Bien entendu je me suis acquitté de cette mission ; auparavant, j’avais remarqué que ces timbres avaient été découpés de nombreuses enveloppes, celles que le Rabbi recevait du monde entier. Quelques mois plus tard, la Rabbanit me demanda si l’opération avait réussi, j’ai répondu que tout allait bien, D.ieu merci et j’ai profité de l’occasion pour déclarer, comme en passant : « Ma fille aussi collectionne les timbres… ».
Elle me jeta un regard étonné, comme si elle essayait de comprendre de quoi je parlais puis elle éclata de rire : « Ah j’ai compris ! Vous prétendez que votre fille qui n’a qu’un an et demi collectionne déjà les timbres… ».
Elle ne m’en parla plus. Mais quelques mois plus tard, elle me tendit un sac rempli de timbres : « Vous m’aviez annoncé que votre fille collectionnait les timbres, alors voilà de quoi augmenter sa collection… ». Maintenant j’avais la confirmation de ce que j’avais pensé : ces timbres provenaient bien du Rabbi ! Bien entendu, je les ai conservés précieusement.
Au fil des années, j’ai entendu plusieurs explications au fait que le Rabbi conservait les timbres des milliers de lettres qu’il recevait chaque jour :
1) Dans sa jeunesse, à Yekaterinoslav, le Rabbi avait amassé une très belle collection de timbres. Quand il sortit de Russie en 1928, ses parents qui étaient très pauvres furent contraints de vendre son album et l’argent qu’ils en retirèrent leur permit de survivre une demi-année ! Alors comment est-il possible de jeter les timbres à la poubelle ?
2) Quand le Rabbi et la Rabbanit quittèrent la France en 1940, ils n’étaient vraiment pas riches mais se servirent des timbres qu’ils avaient collectionnés pour soudoyer divers passeurs et policiers qui les aidèrent à franchir les frontières de l’Europe occupée pour accoster finalement aux Etats-Unis. Alors comment est-il possible de jeter à la poubelle des objets qui peuvent vous sauver la vie ?
3) La Hala’ha (loi juive) demande qu’on prononce une certaine bénédiction quand on voit un roi : si c’est ainsi, il convient de respecter les portraits de rois et reines qui figurent souvent sur les timbres.
Ces dix dernières années, j’ai décidé de consacrer ces timbres ainsi que ceux j’ai pu récupérer à l’époque sur les lettres que recevait le Rabbi pour les distribuer à des enfants qui s’engageaient à apprendre à parler yiddish. En effet, j’estime qu’il est important de pouvoir étudier les livres du Rabbi en version originale car aucune traduction ne peut la remplacer !
‘Haïm Barou’h Halberstam - Kfar Chabad N° 2043
Traduit par Feiga Lubecki