Semaine 18

  • A’hareï Mot - Kedochim
Editorial

Leçons d’harmonie

Et si l’on parlait d’harmonie ? Et si, tout à coup, le temps était venu de la sérénité active ? Si le temps était enfin là où l’homme pourrait être en accord profond avec lui-même, avec ses semblables, avec son environnement, avec l’ensemble du cadre prodigieux de nos actions quotidiennes : la création divine ? N’est-ce pas là qu’un rêve vain, une aspiration éternellement inassouvie pour l’homme enchaîné à la grossièreté du monde matériel, alourdi par sa propre matérialité mais dont l’âme est toujours sur un chemin d’envol, comme attirée par le sublime ? Difficile de résoudre une telle contradiction… Pourtant, c’est là l’enjeu des semaines qui passent.
De fait, en cette période de l’année où nous assistons, témoins enthousiastes, à la renaissance de la nature ou, mieux, à la résurgence soudaine de toutes ses forces que l’hiver avait étouffées, voici qu’en nous-mêmes un processus similaire se met en marche. Le monde nous paraît en quelque sorte plus grand, à la mesure de nos appétits physiques presque insatiables. Il y a là, sans doute, de quoi soulever en chacun quelques interrogations. L’homme serait-il soumis, impuissant, aux grands cycles saisonniers ? Ne mérite-t-il pas un sort plus noble que celui de simple objet d’évolutions qui le dépassent ? C’est justement alors que, partout, retentit le chant de l’étude : les Pirkei Avot – les «Maximes des Pères» – sont au rendez-vous et ils désignent la voie de l’humain. On a tôt fait de dire qu’il s’agit d’un texte de « morale » dont nos Sages ont instauré la lecture chaque Chabbat de la période. Il va bien au-delà de cette considération, pourtant loin d’être négligeable. Ce que ce texte enseigne, c’est d’abord que l’homme – créature divine – peut se lier au Divin. Il nous dit que, en chaque aspect de la vie, il y a une manière d’Etre qui donne sens à l’existence. Il affirme que le progrès personnel et collectif est possible et que la liberté – absolue, sans aliénation – est à la portée de celui qui désire la conquérir de toute son âme.
Y a-t-il harmonie plus prodigieuse ? Si l’homme accepte d’être lui-même et non ce qui lui est dicté par la pesanteur des choses, il ouvre un chemin et y amène une lumière. Il devient ainsi porteur de paix, facteur d’un changement essentiel. Alors que nous vivons un moment de l’histoire où les vociférations des barbares peinent à soulever la colère des civilisations, oublieuses, indifférentes ou timorées, l’harmonie – pouvoir individuel et puissance collective – réapparaît dans sa pleine grandeur. Les Pirkei Avot : un texte à étudier… pour la Vie.

Etincelles de Machiah

L’amour du prochain : une atmosphère nouvelle
«Tu aimeras ton prochain comme toi-même» (Lev. 19 : 18). C’est là un commandement qui incombe, depuis toujours, au peuple juif. Les Pirkei Avot nous l’enseignent également sous cette forme : «Sois des disciples d’Aharon : aime la paix, poursuis la paix, aime les créatures et approche-les de la Torah».
Cette idée est particulièrement essentielle en notre temps alors qu’approche la Délivrance qui nous fera sortir de cet exil, conséquence d’une haine fratricide. Il nous appartient aujourd’hui de passer à l’étape suivante, de sentir, dès à présent, l’atmosphère nouvelle d’amour du prochain qui apparaîtra avec la venue de Machia’h. En la vivant maintenant, alors que nous sommes encore en exil, nous hâterons l’avènement du nouveau temps.
(D’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch
Chabbat Parachat Matot Massei 5751) H.N.

Vivre avec la Paracha

A’haré Mot-Kedochim : «Vous serez saints parce que Moi, l’Eternel votre D.ieu, Je suis saint.»

Le verset qui ouvre la seconde des deux Parachiot lues cette semaine, contient certaines des leçons les plus importantes pour notre vie. Il dissipe des mythes essentiels à propos de D.ieu. Il nous enseigne le sens du véritable amour. Il découvre notre immense potentiel. Il nous donne la force et l’inspiration pour changer le monde.

Le verset est d’une simplicité trompeuse : «Vous serez saints, parce que Moi, l’Eternel votre D.ieu, Je suis saint.» Mais cette seule déclaration porte en elle des significations multiples, comme l’illustre un curieux Midrach.
Le Midrach déclare : quand le verset nous ordonne «soyez saints» nous pourrions être amenés à penser que nous, êtres humains, pouvons être aussi saints que D.ieu Lui-même. C’est pourquoi le verset spécifie : «car Moi, l’Eternel votre D.ieu, Je suis saint». Ma (celle de D.ieu) sainteté est au-dessus (c’est-à-dire plus grande) de votre sainteté (humaine). »
Qu’essaie de nous dire le Midrach ? En premier lieu, pourquoi considérerions-nous que les êtres humains peuvent être aussi saints que D.ieu ? Et quel est le but de l’emphase mise ici sur le fait que nous ne sommes pas saints ? Le verset nous dit d’imiter la sainteté de D.ieu et de sanctifier notre vie. Dans ce contexte optimiste et motivant, quel intérêt y a-t-il de nous rappeler que nous ne pouvons être aussi saints que D.ieu, en opposition exacte avec l’intention du verset qui compare notre sainteté à celle de D.ieu ?
En fait, le Midrach ne doit pas être lu comme une question et une réponse mais plutôt comme l’établissement d’un fait : «vous devez être saints» signifie en fait égaler la sainteté de D.ieu. Et la force de parvenir à ce niveau de sainteté est (comme poursuit le verset) «car Moi, l’Eternel votre D.ieu, Je suis saint» et J’ai la capacité de vous communiquer Ma sainteté, à vous, êtres humains.
La raison en est, et c’est là que les choses prennent un nouveau tour, parce que «Ma sainteté au-dessus est (dérivée) de votre sainteté». Quand nous, êtres humains, sanctifions notre vie, nous sanctifions, par le même biais, D.ieu. Non seulement pouvons-nous être aussi saints que D.ieu mais nous pouvons réellement provoquer la sainteté de D.ieu ! Les implications portent très loin.
Notre perspective conventionnelle sur les relations humaines avec D.ieu est linéaire : D.ieu est le Créateur et nous sommes les créatures. D.ieu est «le Père tout puissant dans les cieux» et nous sommes des mortels sur terre. D.ieu donne et nous recevons. Nous sommes des sujets et D.ieu est le Roi.
En fait, pourtant, notre relation avec D.ieu est beaucoup plus complexe. Quel intérêt y aurait-t-il eu à créer des êtres humains qui seraient des créatures dépendantes qui ne font que prendre ? D.ieu créa l’être humain à «l’image divine» comme un «partenaire» égal dans la création. D.ieu choisit d’avoir une relation complète avec nous, une de ces relations «qui donne et qui prend». Nous donnons autant, voire plus, que nous ne recevons.
En fait, nos Sages nous disent que les bonnes actions des Justes sont plus importantes que la création de D.ieu du ciel et de la terre. La raison en est que D.ieu crée la matière à partir de l’esprit et nous créons l’esprit à partir de la matière.
Oui, nous avons la force de sanctifier D.ieu dans cet univers ou l’inverse. «Aime D.ieu» est interprété comme signifiant «fais que D.ieu soit aimé par les autres». Nous, hommes, sommes les représentants de D.ieu sur terre. En tant qu’enfants de D.ieu, notre comportement fait en sorte qu’Il paraît bon ou mauvais. Quand nous agissons de manière exemplaire, nous obtenons que D.ieu soit aimé par tous ceux qui nous observent, nous et l’image divine à l’intérieur de nous.

Ainsi tels sont les messages puissants de ce verset :
1. D.ieu, comme figure puissante de «Père» dans les cieux «attendant de nous frapper avec la foudre» et nous, comme sujets impuissants n’est rien d’autre qu’un mythe. D.ieu n’existe pas dans un endroit et nous dans un autre. Nous sommes liés. Nous dépendons de D.ieu pour la vie, la santé et toutes les bénédictions. Sa présence consciente et la sainteté de l’univers dépendent (pour ainsi dire) de nous. Nous avons la force de sanctifier D.ieu et de Le faire aimer par les peuples, ou tragiquement l’opposé.

2. Cette relation complexe de partenariat est le modèle optimal du véritable amour. Le véritable amour implique la vulnérabilité. Il ne s’agit pas de contrôle mais de complémentarité, de nous lier avec un partenaire, dans une relation mutuellement dépendante.

3. Et quel est notre potentiel ? Nous avons la force d’être comme D.ieu ! En nous donnant Sa sainteté, Il nous a dotés de la capacité d’être divins. Bien plus, la sainteté d’En Haut dépend de nous. Nous contrôlons le destin de la présence de D.ieu dans la vie. «Soyez saints» nous parle de notre potentiel infini. Nous avons la force de ne pas simplement être de bons êtres humains et de faire de notre monde un lieu meilleur mais de sanctifier D.ieu, de rendre immortel le mortel et de changer à tout jamais le monde.

4. Finalement, «soyez saints» est notre mot d’ordre pour transformer l’univers. Nous avons été chargés d’une immense responsabilité et d’un énorme don. Nous, êtres humains, sommes les seuls à pouvoir changer le cours de l’histoire.

Et tout cela dans un simple verset…

Le Coin de la Halacha

Quelle est «la voie médiane en or» préconisée par nos Sages ?

- On ne doit aspirer qu’aux objets essentiels ; on doit travailler juste suffisamment pour obtenir ce qui est nécessaire dans la vie.
- On ne doit ni poursuivre la richesse ni rester oisif. On doit regarder les autres avec bienveillance et passer son temps libre à étudier la Torah.
- On ne sera ni avare ni prodigue mais on utilisera son argent de façon sensée, on distribuera l’argent pour les causes charitables et on prêtera de l’argent à son prochain.
- On ne sera ni triste ni trop gai mais on sera content de peu et on agira avec amitié. On s’éloignera au maximum de l’orgueil et on se conduira avec humilité (qui n’est pas de l’auto-flagellation).
- On s’éloignera au maximum de la colère même quand on estime qu’elle serait justifiée.
- La parole est d’argent, le silence est d’or. On évitera toute parole inutile ou, pire, malfaisante ; on s’efforcera de parler au maximum de Torah. On évitera de prononcer des vœux et de s’abstenir de ce qui est permis par la Torah. On ne s’infligera pas de mauvais traitements, on ne s’imposera pas des jeûnes supplémentaires, on veillera à sa santé, à sa propreté, à son aspect extérieur. On évitera toute conduite qui pourrait être mal interprétée ou pire, faire croire à des actions répréhensibles.
(A suivre)

F. L.
(d’après Junior Code of Law de Rav Dr. Nissan Mindel)

De Recit de la Semaine

Un réceptacle pour la bénédiction

Il y a un an, un de mes proches parents tenait un stand dans une exposition quand un homme d’affaires s’approcha de lui :
- Vous avez l’air d’être un ‘Hassid de Loubavitch ! -
C’est exact ! répondit-il.
Et mon cousin sortit de son porte-feuille une photo du Rabbi qu’il montra à son interlocuteur. Celui-ci – pour toute réponse – en sortit également une de sa poche : «Je vais vous raconter une histoire ! Il y a quatre ans, mon épouse est tombée malade. Les médecins suspectèrent aussitôt une maladie très grave. Nous ne savions plus que penser. Nous avons décidé de nous adresser à l’émissaire du Rabbi de Loubavitch dans notre ville et de lui demander conseil. Il répondit : «Prenez l’avion pour New York et allez vous recueillir devant la tombe du Rabbi au Ohel, 226 Francis Lewis Boulevard à Queens. Demandez au Rabbi sa bénédiction pour une guérison rapide et complète !»
J’acceptai immédiatement la suggestion du jeune émissaire rabbinique. Il continua : «La bénédiction du Rabbi a besoin d’un réceptacle pour la contenir. Engagez-vous à accomplir une Mitsva (bonne action, commandement de D.ieu) qui attirera cette bénédiction !» J’acceptai cela également. Avant de le quitter, je demandai au jeune rabbin : «Au fait, pourquoi votre Beth ‘Habad (centre communautaire) est-il situé dans un endroit aussi étroit ? Vous seriez sûrement plus à l’aise dans des locaux plus vastes et mieux adaptés à vos multiples activités : une école juive, un Mikvé (bain rituel), une salle de conférence, un gymnase, une cour de récréation, une bibliothèque…»
Il sourit et admit : «Effectivement nous sommes un peu serrés ici. Nous envisageons d’acheter un terrain non loin de là mais cela nous reviendrait à deux millions de dollars et nous ne disposons pas de ce budget ! Pourtant cela nous aurait permis aussi de construire une salle de fêtes, une crèche…»
J’ai regardé le rabbin droit dans les yeux, j’avais compris : «Je ne dispose pas de cette somme mais je peux vous avancer 10.000 dollars pour vous permettre de réserver le terrain et je vais vous aider à monter un comité de soutien. Je suis sûr que d’ici deux ans, nous aurons réussi à réunir les deux millions de dollars nécessaires !
Abasourdi par la bonne nouvelle, le jeune rabbin reprit rapidement ses esprits : «Quand vous irez au Ohel pour demander une bénédiction pour la santé de votre épouse, mentionnez ce à quoi vous vous êtes engagé maintenant et cette initiative sera le réceptacle idéal !»
Je me suis rendu au Ohel, conclut l’homme d’affaires. Là, j’ai prié de tout mon cœur pour la santé de mon épouse. Et j’ai mentionné ce que j’avais promis, comme l’émissaire du Rabbi me l’avait suggéré. Quand je suis rentré chez moi, j’ai accompagné ma femme chez le médecin : il ne restait plus aucune trace de ses terribles symptômes. Cela fait maintenant trois ans qu’elle a retrouvé la santé.
Et je vous invite à venir admirer le magnifique Beth ‘Habad que notre jeune rabbin a fait construire…

Rav Leibl Groner
L’Chaim n°1076
traduit par Feiga Lubecki

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