Election
Les élections sont, par essence, un moment d’exception dans la vie d’un pays. Au-delà de leur caractère quasi rituel, elles représentent cet instant où chacun est invité à choisir, en toute conscience, un chemin à suivre et les hommes qui y conduiront. En d’autres termes, est ainsi confié le soin de décider des formes d’un avenir commun. La tension palpable dans de telles périodes, la solennité aussi de la consultation sont donc bien compréhensibles. Si le choc des ambitions n’y est pas évidemment pas étranger, d’autres enjeux apparaissent alors comme en filigrane. Choix de société, voies de développement, visions d’identité : c’est tout un destin qui se construit. Il y a ici comme un élément qui dépasse l’humain. Voici que, sur la base de programmes annoncés, de personnalités analysées, des hommes sont élus. Voici qu’au lendemain de la sélection, ils doivent pleinement assumer une charge que, parfois, ils n’ont jamais exercée et dans des conditions souvent imposées par des circonstances – économiques, politiques, sociales – sur lesquelles ils n’ont guère de prise. A quoi aura servi toute la passion électorale si sa concrétisation est si étroitement encadrée ?
Une idée est ici bien précieuse : la voix d’une collectivité qui s’exprime dans une consultation n’est pas constituée de la simple adition des opinions individuelles. Le vote même en fait une entité nouvelle dont le poids dépasse celui, cumulé, de ses membres. La tradition juive dénomme ce phénomène « force de la collectivité » et lui attribue un véritable pouvoir d’inspiration. Le (ou les) vainqueur(s) est/sont ainsi, d’une certaine façon, transfiguré(s). Ils accèdent à une dimension supérieure en incarnant une volonté et une confiance qui le(s) portent et le(s) dépassent.
Aurait-on pu imaginer que, dans les étapes de la vie publique, il y avait des sortes d’élan mystique ? Mais le peuple juif est familier de l’irruption du transcendant au cœur du monde et chaque Juif en assume sa part. Celle-ci se décline certes au fil de sa pratique des commandements de D.ieu, de son étude jamais achevée de la Torah. Elle se manifeste aussi en de tels moments, dans ces consultations souveraines où le mot volonté prend tout son sens. « Volonté », « souveraineté » : des mots qui, à l’oreille juive, désignent l’Absolu. Sachons les vivre au quotidien pour qu’enfin leur portée Divine ne soit plus cachée aux yeux des hommes.
La soumission aux nations
Le Talmud (Bra’hot 34b) enseigne : «Il n’y a aucune différence entre l’époque actuelle et le temps de Machia’h sauf (notre émancipation) de la soumission aux nations».
Le Baal Chem Tov donne une explication plus profonde de cette phrase : celui qui ne croit pas que la Providence Divine pénètre chaque aspect du monde est asservi par l’impureté qui dissimule la réalité de la création. C’est le sens de la «soumission aux nations». Mais, au temps de Machia’h, l’esprit d’impureté sera chassé de la terre. Alors la Providence Divine deviendra manifeste et chacun verra que tout provient de D.ieu.
(d’après Keter Chem Tov, sec. 607) H.N.
A’haré Mot
La lecture de la Paracha de cette semaine présente ce qui peut apparaître comme un paradoxe. Les passages qui ouvrent la lecture évoquent Yom Kippour, le jour le plus saint de l’année, le jour où le Peuple Juif «ressemble à des anges». Ce jour-là, «ils se purifient devant D.ieu».
Cependant, la conclusion de la lecture de la Torah nous met en garde : «Ne révèle pas la nudité de ton père ; ne révèle pas la nudité de ta mère… Ne te livre à aucune de ces abominations.» Apparemment, il ne s’agit pas de sujets dont il faudrait prévenir des anges ! Pourquoi donc ces sujets si antithétiques sont-ils inclus dans la même Paracha ?
La réponse à cette question est donnée en allusion dans le nom de la Paracha : A’haré, qui signifie «après» et dans son premier verset : «Et D.ieu parla à Moché après la mort des deux fils d’Aharon qui s’étaient rapprochés de D.ieu et étaient morts.»
Yom Kippour est le moment où chaque Juif «se rapproche de D.ieu». Néanmoins cette expérience ne doit pas se suffire à elle-même. Il nous faut, au contraire, nous concentrer sur ce qui se produira après. La façon dont nous nous rapprochons de D.ieu doit être liée aux jours et aux semaines qui suivent.
Les plus profondes aspirations de notre âme et les hauteurs les plus élevées de notre expérience religieuse doivent être liées aux réalités de notre existence matérielle. La spiritualité n’est pas une dimension ajoutée, supplémentaire, détachée de notre expérience quotidienne mais un moyen grâce auquel nous pouvons transformer notre vie ordinaire et l’élever. En fusionnant nos réalités matérielles et spirituelles, nous raffinons le monde, l’imprégnons de sainteté et le transformons en une résidence pour la Présence Divine.
C’est la raison pour laquelle nous lisons les passages concernant les relations interdites dans la Paracha de la Torah qui décrit le service des sacrifices de Yom Kippour et en fait, nous lisons ces mêmes passages l’après-midi-même de Yom Kippour.
Chacun de nous connaît des moments où notre cœur est bouleversé et où nous nous sentons plus en contact avec notre âme et avec D.ieu. Yom Kippour en est un exemple, c’est un jour où nous nous retranchons de toute préoccupation matérielle. Mais même alors, nos yeux doivent regarder vers le bas. La force spirituelle de ces moments et de ces jours particuliers doit être utilisée pour redonner de la vitalité à notre service divin de chaque jour et pour nous motiver à agir en accord avec les désirs divins même dans le contexte de situations où nous risquerions d’être tentés de suivre d’autres cheminements.
Kedochim
Cette Paracha renferme l’une des pierres angulaires du Judaïsme : «tu aimeras ton prochain comme toi-même».
Apparemment, cette injonction peut sembler impossible. Nous ne nous soucions réellement d’autrui que dans la mesure où nous percevons un dénominateur commun avec lui mais ce dénominateur commun n’affecte qu’une part limitée de notre personnalité. Il ne peut jamais nous pénétrer totalement car chacun d’entre nous est habité par une préoccupation personnelle fondamentale : il n’existe personne avec qui nous puissions nous identifier aussi profondément qu’avec nous-mêmes. C’est la raison pour laquelle, dans la mesure où nous maintenons cette forme d’égocentrisme, il n’y a aucun moyen d’aimer une autre personne autant que nous nous aimons nous-mêmes.
Il est possible, cependant, de redéfinir le sens de notre égo. Au lieu de nous concentrer sur notre «moi» profond, nous pouvons mettre en lumière cette étincelle divine que nous possédons, notre essence véritable et profonde. Et quand notre étincelle divine brille de toute sa lumière, elle nous permet d’apprécier qu’une même étincelle brille dans l’autre. Nous pouvons alors aimer autrui autant que nous-mêmes parce que lui et nous partageons une identité fondamentale.
Mais comment atteindre un tel niveau d’amour ? En regardant au-delà de nos préoccupations personnelles et matérielles et en nous concentrant sur le cœur spirituel qui existe en chacun. Aimer réellement l’autre signifie ne pas nous attarder sur ce qu’il peut faire pour nous ou sur la raison qui fait qu’il nous attire mais sur le potentiel divin qu’il possède.
C’est sur cette base que nous pouvons comprendre la raison pour laquelle Hillel, l’un des plus grands Sages du Talmud, déclare qu’aimer son prochain constitue «la Torah tout entière», le reste n’en étant qu’un simple commentaire.
Nos Sages réfléchissent sur cette déclaration car, bien que la Torah s’appesantisse sur les relations entre l’homme et son prochain, elle met également beaucoup de poids sur les relations entre l’homme et D.ieu.
Quel rapport peut-il exister entre aimer son prochain et l’observance du Chabbat, le respect des lois alimentaires ou de toutes les obligations rituelles du Judaïsme ?
Mais lorsque nous nous entraînons à dépasser nos préoccupations personnelles et aimons l’autre à cause de son essence divine, nous sommes alors capables d’apprécier l’enseignement d’Hillel. Car le but de chaque Mitsva de la Torah est de nous aider à voir au-delà de l’aspect matériel de notre existence et à en apprécier l’essence spirituelle.
Qu’est-ce que Lag Baomer (cette année jeudi 10 mai 2012) ?
Le 33ème jour du compte de l’Omer rappelle la Hiloula (décès) de Rabbi Chimone Bar Yo’haï qui avait demandé que cette date soit célébrée comme un jour de joie (puisqu’il y avait achevé de façon parfaite sa mission sur terre). Ce jour marque une pause dans la période de deuil instituée à cause d’une terrible épidémie qui avait frappé les disciples de Rabbi Akiba).
- On ne récite pas les prières de Ta’hanoune (supplications), même pas à Min’ha la veille (mercredi après-midi).
- Nombre de gens ont la coutume de se rendre sur le tombeau de Rabbi Chimone Bar Yo’haï à Mérone, près de Tibériade en Galilée ; on y procède à la première coupe de cheveux des garçons qui ont atteint l’âge de 3 ans depuis Pessa’h.
- On organise des réunions ‘hassidiques joyeuses.
- On a la coutume de manger des caroubes, en souvenir de ces fruits dont se nourrissaient Rabbi Chimone et son fils Rabbi Eléazar quand ils se cachaient dans une grotte pour échapper aux Romains. Certains ont aussi la coutume de manger des œufs durs dont la coquille serait devenue marron durant la cuisson.
- On donne davantage de Tsedaka (charité).
- Les enfants sortent et défilent tous ensemble fièrement dans la rue avec des drapeaux et des pancartes les encourageant à étudier la Torah et accomplir les Mitsvot : le but de la descente de l’âme dans le corps est de « marcher », d’avancer dans la vie. Ces défilés donnent chaleur et vitalité à l’étude formelle et prolongent l’enthousiasme des enfants dans leur éducation.
- Lag Baomer est un moment propice pour prier pour la naissance d’enfants et leur bonne éducation.
F. L. (d’après Hamitsvaïm Kehala’ha)
Avancez l’heure du mariage !
Le département religieux du Ministère israélien de l’Éducation avait organisé un concours national sur le modèle « Un écrivain est né ». Tous les élèves des classes élémentaires étaient invités à soumettre leurs récits ; le but évident de ce concours était de stimuler l’envie d’écrire chez les jeunes écoliers. Des milliers d’entre eux y participèrent et 22 d’entre eux furent sélectionnés dont 4 de la région sud.
Une des gagnantes était Ra’hel Benhamou, âgée de onze ans, qui fréquente l’école ‘Habad Uziel de Béer Cheva. Voici son récit, véridique :
La veille de son mariage, Nourit reçut une lettre du Rabbi. Nourit était orpheline : son père avait trouvé la mort lors de la Guerre des Six Jours en juin 1967.
- Je ne peux pas le croire ! murmura-t-elle, presque angoissée et paniquée quand elle reçut le télégramme (!) que lui avait envoyé le Rabbi. C’est impossible ! Un mariage, c’est un événement qui n’arrive qu’une fois dans la vie ! Je regrette presque d’avoir envoyé une demande de bénédiction ! D’un autre côté, si le Rabbi le demande, il faut obéir !
- Ma chérie ! la consola sa mère, tu sais que le Rabbi voit des choses que les gens normaux ne voient pas !
- Mais c’est impossible ! Nous avons déjà distribué les faire-part ! Comment pouvons-nous avancer l’heure de la cérémonie comme le Rabbi me le demande ? Dans l’invitation, il était précisé que la Houppa aurait lieu dans la soirée et le Rabbi me demande de la programmer dans l’après-midi !
- Tu as eu la chance de recevoir une réponse, et par télégramme en plus, ce qui est paraît-il très rare ! Tu dois obéir !
On était en pleine Guerre du Golfe, en 1991. Nourit venait d’une famille peu pratiquante mais son frère était devenu Loubavitch et l’avait encouragée à écrire au Rabbi chaque fois qu’elle devait prendre une décision importante ; le mariage était bien sûr la décision la plus importante de sa vie. Elle n’avait demandé qu’une bénédiction sans plus de précisions pour cette journée qui devait se dérouler le jeudi 9 Chevat mais le Rabbi avait répondu par un télégramme, ce qui montrait combien ce « détail » de l’heure de la cérémonie était urgent.
Le jour du mariage, Nourit et Chlomi avaient réussi à prévenir plus ou moins tous leurs invités et le mariage se déroula l’après-midi dans la plus grande joie malgré les fréquentes alertes alarmantes qu’on entendait parfois en cette période de guerre. Après la cérémonie, Nourit avait déjà oublié le stress du « détail » tant elle était occupée à sourire à tous ses invités, à les remercier de participer à sa joie et à les bénir en retour. Après la cérémonie, les invités se dispersèrent, le repas devait se dérouler dans une autre salle.
Environ une heure plus tard – exactement à l’heure et à l’endroit où aurait dû se passer la Houppa - le plus gros Scud de toute la Guerre du Golfe (lancé par les Irakiens) explosa… Ce qui aurait dû être un mariage aurait pu se terminer par une terrible tragédie… si le Rabbi n’avait pas demandé de toute urgence d’avancer l’heure de la cérémonie ! « Cela valait la peine d’avoir obéi au Rabbi ! » remarqua Nourit, les larmes aux yeux.
Avec le temps, Chlomi et Nourit se sont renforcés dans la pratique religieuse et leur foyer est devenu un exemple qui rayonne sur tout leur entourage.
Cette histoire est absolument véridique dans tous ses détails et je suis bien placée pour le savoir puisque Nourit est la sœur jumelle de mon père…
Rapporté par Haïm Baron
www.col.org.il
traduit par Feiga Lubecki