Samedi, 1er novembre 2014

  • Le’h Le’ha
Editorial

 Et la base de notre vie ?

L’année est à peine commencée et notre souvenir des fêtes est encore pleinement vivant. Sans doute est-ce un moment privilégié pour revenir aux bases de notre existence, retrouver avec assurance les éléments fondamentaux qui la soutiennent. Il y a ici comme un instant qui tient du miracle où tout paraît possible. Et si la décision stratégique à prendre était celle de l’étude de la Torah ? Se pénétrer de la sagesse et de la connaissance Divines, faire un avec elles : par l’étude, cela cesse d’être un rêve.

Mais l’ambition n’est-elle pas trop grande ? Alors que les préoccupations de la vie quotidienne nous emplissent bien souvent le cœur et l’esprit, remettre l’étude à la place centrale qu’elle doit tenir pour chacun peut sembler une gageure. Cependant le peuple juif est ainsi fait que les défis ne sont pas pour lui choses nouvelles, son histoire continue d’en porter témoignage. Il sait fixer les priorités et ne confond pas l’essentiel et l’accessoire. Car c’est bien de cela qu’il s’agit : l’étude apporte à chacun la force d’avancer autant qu’elle donne à penser et comprendre. Elle est si précieuse que nul ne peut s’en exempter. Et aussi, elle offre au cœur du monde un espace de véritable liberté et d’incomparable plaisir.

Du point de vue de l’étude, nous vivons une époque qu’on pourrait qualifier de bénie. Certes, les grands Sages qui firent le judaïsme ne vivent plus parmi nous mais leurs enseignements sont accessibles à tous. Les cours ouverts à tous les publics, de tous niveaux, les traductions en français se sont multipliés et il n’existe plus guère d’obstacle devant la volonté de celui qui veut apprendre et connaître. Il faut seulement aujourd’hui ne pas en créer par ses propres choix. Quand le monde alentour propose d’oublier, il faut se souvenir. Quand il suggère d’ignorer, il faut rechercher le savoir. Et quand il invite à des plaisirs éphémères, il faut choisir l’éternité.

On surnomme le peuple juif, «peuple du Livre». C’est un beau nom. Bien plus encore, peut-être est-ce une invitation... 

Etincelles de Machiah

 La lumière et le réceptacle

L’enseignement du Baal Chem Tov est la sagesse Divine qu’il a révélée et transmise en héritage à chaque Juif. C’est pourquoi il a un lien étroit avec la venue de Machia’h.

Machia’h est un « lumière essentielle » ; l’enseignement du Baal Chem Tov – la ‘Hassidout – est le réceptacle de cette lumière immense.

(D’après Likoutei Dibourim vol. 2 p. 572) 

Vivre avec la Paracha

 Lé’h Le’ha

Un célèbre cardiologue se rendit un jour chez le Rabbi.

«Vous devez consacrer vos soins à traiter les gens en bonne santé, pas seulement les malades, lui dit le Rabbi.

- Dois-je améliorer ce que le Tout-Puissant a fait ? demanda le médecin.

- Oui, répondit le Rabbi. Un profane, et a fortiori un médecin, doivent être capables d’améliorer ce que le Tout-Puissant a fait. 

- Me demandez-vous de rendre l’homme parfait ? renchérit le médecin.

- Non, répondit le Rabbi. Rendre les hommes parfaits est le travail de Machia’h. Mais chaque personne doit améliorer quelque peu sa vie et celle de ceux qui l’entourent ».

Comme va l’illustrer ce qui suit, chacun d’entre nous a entre les mains la mission d’  «améliorer quelque peu» notre part de ce monde. Et bien souvent nos missions sont toutes entremêlées, si bien qu’en avançant, nous entraînons les autres avec nous.

Le nom de la Paracha de cette semaine, Lé’h Le’ha, rappelle le premier commandement qu’adressa D.ieu à Avraham. Lé’h signifie «va» et le’ha, «pour toi». D.ieu lui signifiait de partir, de quitter sa terre natale et la maison de son père, de sortir du cocon d’une existence protégée et de tracer son propre chemin dans le monde.

Nos Sages interprètent le second mot, le’ha, comme signifiant «pour toi-même». Rachi explique qu’un tel voyage était rempli de dangers et qu’il y avait un risque qu’Avraham perde tout ce qu’il possédait. C’est pourquoi D.ieu lui promit que ce voyage serait tout à son avantage. Sa fortune, sa famille et sa réputation s’en trouveraient accrues.

Rabbi Moché Alchi’h en offre une interprétation plus profonde. Lé’ha signifie «vers toi-même». En voyageant de par le monde, Avraham traçait le chemin de la découverte de lui-même. Le but de son voyage vers Erets Israël, sa descente en Egypte, son retour à la Terre et toutes ses errances avaient pour dessein de lui permettre de comprendre sa propre identité et d’exprimer ses qualités dans son environnement.

L’histoire d’Avraham n’est pas simplement une page d’un livre d’histoire. Bien au contraire, comme l’enseignent nos Sages, «les actes de nos pères sont un signe pour leurs enfants». Avraham était un homme unique, un homme qui enseigna à un monde, qui ne voulait pas l’écouter, la foi en D.ieu.

Mais nous sommes tous des hommes et des femmes uniques. Le Baal Chem Tov enseignait que D.ieu aime chaque Juif avec l’amour que des parents témoignent à un enfant unique, né dans leur âge avancé. Tout comme Il ordonna à Avraham d’entreprendre un voyage vers son for intérieur et l’y dirigea, D.ieu, avec une patience pleine d’amour, guide chacun d’entre nous dans son propre voyage de la vie. Par un réseau de buts imbriqués les uns dans les autres, Il nous dirige vers une destination commune : celle de nous révéler à nous-mêmes et de révéler aux autres les potentiels divins uniques qui nous ont été attribués.

Le Baal Chem Tov nous enseigne que tout ce qu’entend ou voit un homme doit lui servir d’enseignement dans sa relation avec D.ieu. Puisque tout ce qui arrive dans ce monde est contrôlé par la Providence Divine et que l’homme «n’a été créé que pour servir son Créateur», il en découle que chaque événement ou entité qu’il rencontre a pour but de l’aider à progresser dans sa relation avec D.ieu.

C’est dans ce but que D.ieu nous conduit, depuis le berceau, pas à pas et au travers d’expériences diverses, pour nous permettre de découvrir et d’exprimer notre potentiel divin inné.

Quand Avraham se mit en route, il prit avec lui «les âmes qu’il avait faites à ‘Haran» : les gens qu’il avait motivés à le rejoindre dans sa mission.

Cela également nous sert de leçon. Le voyage de l’homme à travers la vie n’a pas comme propos d’être une randonnée solitaire dans des rochers montagneux escarpés ou dans des déserts. Mais au contraire, D.ieu nous mène à travers un monde où nous rencontrons d’autres hommes avec lesquels nous échangeons, donnons et recevons. Car eux aussi font le même voyage, même s’ils n’empruntent pas la même route.

Quand un homme commence à apprécier ces concepts, il peut optimiser ses opportunités dans la vie et faire des expériences plus heureuses et plus fructueuses. Il n’est plus encombré par la peur ou les soucis car il prend conscience qu’à chaque moment, une main attentive le guide, le dirige vers des rencontres destinées à le faire grandir et agrandir sa contribution au monde.

Perspectives

En tant que descendants d ‘Avraham, nous sommes tous au beau milieu d’un voyage similaire. Nous voyageons vers Erets Israël, nous préparant nous-mêmes et le monde en général à l’ère où nous retournerons sur la Terre, conduits par Machia’h.

Nous nous rendons, tout comme notre Patriarche Avraham,  vers «la terre que Je te montrerai». Car la nature du cheminement de notre peuple à travers les générations est d’unir tous les élèves de l’histoire parce qu’elle est d’origine divine, une chronique qu’aucun homme ne pourrait concevoir ou prévoir par la logique.

Et en nous identifiant à ce processus, nous développons une appréciation unique de ce que nous sommes véritablement. «Je (c’est-à-dire, D.ieu) te révélerai (c’est-à-dire, le tréfonds spirituel que chacun possède en lui)».

En considérant ce voyage comme notre voyage personnel et en acceptant le rôle qui nous y est imparti, chacun d’entre nous peut s’élever au-delà de ses préoccupations personnelles et imprégner sa vie d’un sens universel, dans sa nature elle-même. En aspirant à parvenir à ce but, nous comprenons plus profondément ce que nous sommes réellement

Le Coin de la Halacha

 Quand donne-t-on son prénom à un enfant ?

Il est d’usage dans toutes les communautés juives d’annoncer publiquement le nom du garçon au moment de sa Brit Mila (circoncision). Bien que cette coutume ne soit pas mentionnée dans le Talmud (et bien que certains personnages bibliques aient été nommés dès leur naissance), le Midrach Pirké DeRabbi Eliézer mentionne que Moché (Moïse) a d’abord été circoncis au huitième jour puis que ses parents l’ont appelé Yekoutiel (par la suite, la fille du Pharaon l’a appelé Moché).

Il est devenu habituel de ne pas annoncer le prénom de l’enfant avant sa Brit Mila – bien qu’on ait l’habitude de faire bénir la mère et l’enfant devant le Séfer Torah le plus rapidement possible – donc avant la Brit Mila.

Le livre Hessed leAvraham mentionne : « On a la coutume de ne pas annoncer le prénom de l’enfant jusqu’après la Brit Mila car alors l’impureté a disparu. Alors peut résider sur l’enfant le secret de l’âme… ». Le prénom juif est le canal par lequel transite la vitalité de l’âme sainte qui commence chez l’enfant avec la première Mitsva qu’on lui fait accomplir.

Même si la Brit Mila doit être retardée pour raisons de santé, il convient de ne pas annoncer le prénom avant la cérémonie.

Le père nomme sa fille dès qu’il est appelé à la lecture de la Torah (lundi, jeudi, Chabbat, Roch ‘Hodech…). Il convient d’offrir un repas à la famille et / ou la communauté en l’honneur de la naissance d’une fille.

F.L. (d’après Pinat Hahala’ha – Rav Yossef Ginsburgh)

Le Recit de la Semaine

 Je ne comprends pas votre question…

J’ai été élevé dans une famille pratiquante où tout était enseigné avec des claques et des coups. Après cette expérience, j’en avais plus qu’assez du judaïsme et je stoppais toute pratique, excepté Yom Kippour. Quand nous nous sommes mariés, mon épouse insista pour respecter la Cacherout mais c’était son initiative et non la mienne. En général, j’étais très sceptique et même négatif quant à l’observance d’une Mitsva ou d’une autre.

Au début des années 70, alors que je me trouvais en seconde année de droit à l’Université du sud de la Californie, un vendredi soir, je me rendis avec mon épouse au cinéma à Westwood mais il n’y avait plus de place. Puisque nous avions déjà payé une place de parking, nous nous sommes promenés dans le quartier et nous avons atterri au Beth ‘Habad où j’ai rencontré Rav Baruch Shlomo Cunin. Grâce à lui, je me suis un peu réconcilié avec le judaïsme et j’ai même mis les Téfilines plusieurs fois. Je n’ai pas introduit de changement majeur dans ma vie mais je suis devenu un peu plus réceptif.

Après l’obtention de mes diplômes, nous avons entrepris un voyage d’agrément en Europe et, au cours de notre visite en Grèce, nous avons subi un terrible accident de voiture. Ma femme a eu le dos brisé et est devenue à moitié paralysée ; quand elle a pu être transférée au Cedars Hospital de Los Angeles, Rav Cunin était présent et nous attendait. Il conseilla vivement à ma femme d’écrire au Rabbi, ce qu’elle fit. Elle reçut immédiatement une réponse avec une bénédiction. Le Rabbi insista que le fait d’allumer les bougies de Chabbat était vital pour sa guérison et qu’elle devait respecter scrupuleusement cette Mitsva. Donc ma femme commença à allumer les bougies de Chabbat.

Puis elle fut transférée dans un centre de rééducation et nous avons oublié d’emporter des bougies de Chabbat. Juste après cela, sa jambe droite enfla terriblement et elle subit une rechute. Mais elle se rétablit et après cela, s’assura de ne plus jamais manquer un allumage.

Au bout de six mois, elle termina sa rééducation et put se déplacer à l’aide de béquilles. Elle souhaitait vraiment aller voir le Rabbi et, bien que les médecins l’aient découragée d’entreprendre un si long voyage, nous y sommes allés. C’était en 1973.

Alors que nous attendions à l’extérieur du bureau du Rabbi, quelqu’un m’indiqua que je devais écrire une note au Rabbi avec ma question. Mais je n’avais rien à demander ; en ce qui me concernait, je me contentais d’accompagner ma femme et d’assister à l’entrevue. Mais on insista pour que j’écrive, alors j’écrivis : « Si D.ieu est si grand, pourquoi insiste-t-Il sur de si petits détails ? ». J’avais écrit cela parce que je devais absolument écrire quelque chose mais le fait est que cela m’avait toujours un peu irrité : tous ces détails et ces pratiques minutieuses… Il semblait que D.ieu était en colère si vous mettiez une cuillère « viande » dans un pot de fromage et je n’avais jamais compris pourquoi.

Le Rabbi nous salua, nous demanda nos noms et, de suite, déclara : « Je ne comprends pas votre question ! ». Moi, j’estimai que j’avais été assez clair et je commençai donc à répéter ma phrase en yiddish, pensant que le Rabbi avait peut-être du mal avec l’anglais. Mais le Rabbi m’interrompit au milieu de ma phrase. Il leva sa main et expliqua : « Ce n’est pas pour D.ieu ! C’est pour nous ! D.ieu veut que nous soyons proches de Lui et telle est la voie qu’Il nous indique ! ».

Au fur et à mesure que le Rabbi parlait, tout devenait plus clair pour moi : D.ieu désirait la proximité d’une relation. Pour la première fois, je comprenais : ce n’est pas que D.ieu veut nous intimider et nous effrayer ! Il nous montre la voie vers Lui et c’est comme s’Il nous disait : « Si tu suis ce chemin, tu Me trouveras ! ».

Pour moi, c’était une révolution complète. Je n’avais jamais compris le judaïsme dans cette perspective. Pour moi, l’accent était toujours mis sur ce qui est interdit, comme si D.ieu exigeait la soumission et non l’amour, comme si je devais me comporter de manière à éviter la colère de D.ieu et Sa punition. Je n’avais jamais vu le judaïsme sous cet angle positif : D.ieu nous aime et souhaite que nous nous rapprochions de Lui.

Cette nouvelle façon de voir m’intrigua vraiment. Je ressentais soudain l’impression d’avoir été toutes ces années dans une pièce obscure et le Rabbi avait allumé la lumière pour moi. Je me souviens avoir ressenti très fortement que j’avais rencontré une des plus grandes personnalités du monde. Après cela, j’entamais une longue correspondance avec lui parce que je voulais en connaître bien davantage et il répondait toujours à mes questions.

Moins d’un an plus tard, ma femme tomba enceinte. Elle écrivit au Rabbi qui répondit avec une bénédiction pour « une grossesse normale et facile, avec la naissance d’un enfant en bonne santé en son temps ». Entre-temps, tous les médecins qu’elle avait consultés lui avaient conseillé de ne pas garder le fœtus, insistant qu’à cause de sa blessure, elle n’avait pas la capacité de mener une grossesse à son terme. Mais elle ne les écouta pas : elle avait une confiance totale dans la bénédiction du Rabbi.

Quand arriva le moment de l’accouchement, le travail se fit très lentement. Au bout de treize ou quatorze heures, le médecin décida d’effectuer une césarienne. Mais en voyant sa déception, il décida d’attendre encore un quart d’heure.

Quand il revint et l’examina, il n’en crut pas ses yeux : la dilatation était complète et notre fils put naître tout à fait normalement ! 

Par la suite, il me demanda une copie de la lettre du Rabbi et il hocha la tête : « Vous ne pouvez pas apprécier le miracle auquel nous avons assisté pace que vous n’êtes pas médecin et vous ne pouvez pas comprendre le problème. Vous ne savez pas ce qui s’est passé pendant ces quinze minutes mais c’était vraiment un miracle hors du commun ! ».

Nous avons eu finalement trois fils et deux filles. Pour chaque grossesse, le Rabbi envoyait la même bénédiction et chaque fois tout se passa bien.

J’ai pu constater que D.ieu est un D.ieu d’amour plutôt qu’un D.ieu de punition grâce à ce que le Rabbi m’a enseigné.

David Stauber – South California – JEM

Traduit par Feiga Lubecki

 

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