Editorial
Sur le chemin des hauteurs Comment passer de sommet en sommet sans jamais redescendre dans la vallée? Comment fait-on pour rester sur les hauteurs en dépit de la pesanteur naturelle du monde? Malgré les apparences, ce n’est pas une question d’alpiniste. C’est celle que se pose chaque Juif au seuil du mois de Nissan. Voici que nous venons de vivre Pourim et son allégresse avec une exaltation particulière et, déjà, c’est le grand air de la liberté qui résonne à nos oreilles. Le mois de Nissan va commencer. Ses promesses sont belles et nombreuses et nous savons qu’elles seront tenues. Deux moments d’excellence se succèdent ainsi sans qu’une longue transition nous permette un passage progressif. D’un sommet à l’autre, nous sommes bien invités à vivre sur les hauteurs. Il ne faut certes pas s’en plaindre mais où est le secret de l’élévation constante? Peut-être tient-il en un mot: la recherche? C’est en effet le temps de l’effort où, dans chaque maison, on entreprend de retrouver le ‘Hamets où qu'il soit pour l’éliminer avec le plus grand zèle. Cette élimination de tout produit levé présente un aspect ménager: il faut faire concrètement disparaître cet élément de nos maisons avant la fête de Pessa’h. Mais elle a aussi un sens spirituel: il faut rechercher le ‘Hamets qui se trouve en son coeur et effacer l’obstacle au service de D.ieu qu’il constitue. C’est bien ainsi que l’on réalise l’oeuvre la plus ambitieuse: être digne de la fête passée et se préparer à l'être pour celle qui vient. Et cet effort n’est pas une chute, il est un nouveau chemin que l’on trace. Il est comme un pont lancé entre les hauteurs. Il suffit de l’emprunter. Déjà retentit le chant de la libération. N’est-il pas le prélude à celui, ultime, que Machia’h nous apportera?
H. Nisenbaum
Etincelles de Machiah
Le secrets de la TorahMachia’h enseignera à tout Israël le sens profond de la Torah. C’est ainsi
que toutes les raisons des commandements qui y sont aujourd’hui
cachées seront alors révélées. Un verset (Cantique des Cantiques 1:2) y
fait allusion en ces termes: “Il m’embrasse des baisers de sa bouche”. Rachi le
commente ainsi: “C’est une promesse de D.ieu qu’Il apparaîtra de nouveau (au
peuple juif ) pour lui expliquer les raisons secrètes et les mystères cachées”.
Cela ne peut signifier que, lors de sa venue,Machia’h enseignera les dimensions
révélées de la Torah car Moïse et tous les Sages seront présents pour le faire. Il
est donc clair que c’est son aspect le plus profond qu’il aura la charge de transmettre
à tous.
(d’après Likouteï Torah,Tsav, p. 17a) H.N
Vivre avec la Paracha
Le rejet. C’est l’un des outils les plus puissants que possède notre société pour régler et canaliser les comportements indésirables. Enfants, nous savions qu’une mauvaise conduite attirerait le risque d’un regard désapprobateur des parents, et peutêtre le bannissement dans notre chambre. Adultes, le sceptre de l’emprisonnement pèse sur les criminels potentiels et sert d’arme dissuasive contre toutes sortes de comportements contraires à la loi. Mais jusqu’à quel point un isolement est-il efficace pour empêcher le crime, et peut-être et surtout, peut-il réveiller un sentiment de regret chez le coupable? Les psychologues et les sociologues réévaluent cette vieille méthode comme réponse au crime. Le bannissement et l’emprisonnement peuvent, certes, écarter le criminel du sein de la société, limitant ainsi les risques d’un comportement répréhensible et dangereux pour le reste d’entre nous. Néanmoins, une fois qu’il a été séparé de la communauté, le coupable n’entrevoit pas de motivations pour se réadapter aux normes comportementales de la société en général. En l’isolant, nous le coupons en effet de la civilisation. Notre rejet n’est peutêtre pas stimulant pour qu’il s’améliore mais plutôt une invitation à plonger encore plus bas dans le monde infernal du crime. La Torah possède également un système répressif d’isolement pour certains délits. Tsaraat était une affliction ordonnée par D.ieu qui s’abattait sur un individu coupable de propos diffamatoires envers son prochain. Etant déclaré impur, le lépreux était renvoyé des trois campements. (Dans le désert les Juifs étaient divisés en trois campements. Le camp le plus saint était le Ma’hané Ch’hinah où était érigé le Michkan (le Tabernacle). Il était entouré du Ma’hané Leviya où résidaient tous les membres de la tribu de Lévi. Enfin s’étendait le Ma’hané Israël où étaient installés tout le reste du Peuple d’Israël. Quand ils s’installeraient en Israël, c’est hors des limites des villes que les lépreux seraient renvoyés). Le lépreux ainsi rejeté en dehors des trois camps était gardé reclus de tout le reste de la société. Sa punition correspondait à son crime. Ses paroles assassines avaient entraîné conflits et désunion entre les gens, sa punition était donc un retranchement forcé de la communauté. Et pourtant, il est important d’observer le processus par lequel le lépreux était déclaré impur. Celui qui découvrait une tache suspecte sur sa peau devait être examiné par un sage érudit. Si ce dernier déterminait que la tache avait en effet tous les symptômes de la Tsaraat, il était alors présenté au Cohen qui le déclarait impur. Le Cohen pouvait totalement ignorer tous les détails des lois concernant la Tsaraat, cependant l’individu ne pouvait être déclaré impur avant que le Cohen ne le déclare tel. Même si le Cohen ne faisait que se faire écho du sage érudit, c’est son statut et non celui de l’érudit, qui finalisait la situation de l’individu. Il est surprenant de constater que la Torah donne la responsabilité de la déclaration d’impureté au Cohen. En effet, le Cohen lui-même se distinguait par un statut particulier de pureté. Il accomplissait les tâches les plus spirituelles et les plus raffinées dans le Saint Temple et était enjoint de ne se souiller en aucun cas par une impureté rituelle. Pourquoi donc lui revenait-il, spécifiquement à lui, le rôle de déclarer cet homme impur ? Cette responsabilité obligatoire du Cohen jette la lumière sur la position de la Torah quant à l’isolement social comme punition et dissuasion pour les méfaits. En dehors de son service dans le Temple, le Cohen avait pour fonction de servir d’intermédiaire, de "canal", pour les bénédictions du Peuple Juif. Les Cohanim ont conservé ce rôle tout au long de l’histoire juive par leur bénédiction de la "prière des Cohanim" dans les synagogues... Avant de commencer cette prière, ils récitent une bénédiction qui se conclut par les mots: "...Qui nous a ordonné de bénir le Peuple Juif, avec amour". Si le Cohen sent qu’il manque d’amour, ne serait-ce que pour l’un des membres de la communauté, il est obligé de s’écarter et de s’interdire de prononcer la bénédiction sacerdotale. Seul le Cohen, connu comme "un homme de bonté" a l’autorité de déclarer quelqu’un impur, ce qui a pour conséquence le bannissement du camp du Peuple Juif. La déclaration du Cohen est basée sur l’opinion du sage érudit, parfaitement versé dans les myriades de lois concernant les conditions de la peau et leur statut rituel; néanmoins, c’est le Cohen qui donne l’avis décisif sur les sujets d’impureté. Le coeur du Cohen débordant d’amour pour son prochain ne se permettra pas de faire une telle proclamation légèrement. Il sera pleinement conscient de la force de ses paroles et ne laissera aucune opportunité pour tenter de trouver une échappatoire, une disculpation, pour tenter d’innocenter un juif. Mais si, après tous ses efforts, il est incapable d’empêcher la déclaration du mot "impur", nous pouvons avoir la certitude que, de la même façon, il n’épargnera aucun soin pour faciliter la purification du lépreux. L’isolement et le rejet sont des moyens pratiquement inefficaces pour améliorer le comportement criminel, en l’absence d’un critère absolu: l’amour. Une fois que l’individu se sent complètement rejeté de sa société, il perd la plus grande source de motivation et d’encouragement pour mener une vie entière et productive. Le Cohen est là pour nous enseigner que même lorsque nous censurons et que nous condamnons un comportement inadéquat, nous ne devons jamais perdre de vue notre rôle essentiel: tendre une main pour venir en aide et encourager chaque membre de la société, quel que soit son statut. Un individu qui peut prononcer une condamnation sur un autre être humain doit soigneusement examiner son propre coeur. Ceux qui manquent d’amour et de compassion sont incapables d’arriver à une conclusion vraie concernant le statut d’autrui. Au lieu de cela, ils n’arriveront qu’à les éloigner davantage par des attitudes implacables et critiques. En fait, celui qui n’est pas apte à rendre quelqu’un "impur" mais le fait néanmoins, se rend coupable de diffamation, la faute même qui fait encourir la punition de Tsaraat. L’isolement s’applique à une catégorie de gens, ceux qui sont incapables de tolérer et accepter les autres. Ceux qui se sentent inaptes à aller vers chaque membre de la communauté et les rapprocher devraient prendre eux-mêmes du recul et éveiller un sentiment de clémence dans leurs coeurs, éviter de blesser avec le dard de leur amertume et de leurs condamnations. Aucun mot ne peut exprimer l’influence profonde, l’impact énorme que nous pouvons exercer sur toute la société lorsque nous gardons notre coeur ouvert à tous, avec gentillesse et compassion. Le Cohen, un homme de bonté, nous guide pour atteindre ce niveau raffiné de sensibilité. C’est cette forme d’amour inconditionnel qui pourra effacer la cause première de notre long exil. Car l’exil est un état de conflit et de disharmonie, où nous sommes émotionnellement coupés les uns des autres et même de notre propre intériorité. Quand en toute conscience, nous tentons d’invoquer en nous-mêmes un sentiment de véritable acceptation et d’amour pour tous les individus, nous libérons nousmêmes et la société en général du piège de l’isolement et de la rupture. Ainsi, la prochaine fois que vous rencontrez quelque forme d’imperfection que ce soit dans un autre être humain, ne vous détournez pas. A la manière du Cohen, regardez au-delà de la faute extérieure, sondez l’âme. Votre regard bienveillant et votre coeur aimant accompliront bien plus que les condamnations les plus sévères. Ces petits actes d’unité et d’acceptation ont la force de changer le paysage de notre société, de la transformer d’une jungle froide et malveillante en un lieu où la paix, la sérénité et l’harmonie régneront.
Le Coin de la Halacha
Comment élimine-t-on le 'Hamets cette année?Jeudi soir 21 avril, après la tombée de la nuit (21h40, heure de Paris), on pro-cède à la recherche du ‘Hamets: on dispose dix petits morceaux de pain (enveloppés chacun dans un papier) dans la maison. On prononce la bénédiction:
"Barou’h ata Ada-nay Elo-hénou Méle’h Haolam Achère Kidechanou Bemitsvotav Vetsivanou Al Biour
‘Hamets" puis, à la lumière d’une bougie (en cire, de préférence), on ramasse avec une cuillère en bois les dix morceaux de pain qu’on dépose dans une enveloppe. A l’aide d’une plume, on balaie les éventuelles miettes de ‘Hamets. Dans l’enveloppe, on dépose aussi la plume et la cuillère en bois. On récite alors "Kol
‘Hamira".
Vendredi matin, avant 12h15, on brûle l’enveloppe et ce qu’elle contient en ayant l’intention par cela d’annuler tout ‘Hamets qui se trouverait encore par inadvertance en sa possession.
On n’aura laissé dans la maison que le ‘Hamets nécessaire pour le repas de vendredi soir et de samedi matin, en l’occurrence des ‘Halot (ou "pitot"). Le repas sera servi dans la vaisselle de Pessa’h et on aura soin de manger la ‘Halla à l’écart, de façon à ce que des miettes de pain ne tombent pas sur la table de Pessa’h.
Samedi matin, l’office commencera plus tôt que d’habitude afin que les fidèles puissent consommer la ‘Halla du repas de Chabbat avant 11h20. On éliminera les éventuelles miettes dans les toilettes. Puis on prononcera le second
"Kol ‘Hamira".
Comme il est interdit Chabbat de préparer la cuisine pour les jours suivants, on ne commencera à préparer le Séder qu’après la sortie de Chabbat, c’est-àdire 21h44. Pour cela, on aura pris soin de procéder dès vendredi aux prépara-tifs du Séder.
Vendredi soir, on allumera les bougies de Chabbat avant 20h33; samedi soir, on allumera les bougies de la fête après 21h44 avec les deux bénédictions: "Barou’h
Ata Ado-nay Elo-hénou Méle’h Haolam Achère Kidechanou Bemitsvotav Vetsivanou Lehadlik Ner Chel Yom Tov" et "Barou’h Ata Ado-nay Elo-hénou Méle’h Haolam Chéhé’héyanou Vekiyemanou Vehigianou Lizmane Hazé".
Dimanche soir, on allumera les bougies après 21h46 avec les mêmes bénédictions que la veille. Et on commencera le compte des jours de l’Omer.
F. L.
De Recit de la Semaine
Se fatiguer pour une MitsvaAlors que Rabbi Yossef Yts’hak Schneersohn, très jeune, avait été nommé à la tête de la Yechiva Tom’hei Tmimim de Loubavitch, son père, Rabbi Chalom Dov Ber supervisait attentivement tout ce qui se passait dans cette institution qu’il avait fondée. Un jour, un jeune homme demanda à être admis à la Yechiva. Bien qu’il fût doué et capable d’étudier, le comité était gêné par ses manières rudes et une certaine vulgarité qui se reflétait sur son visage. Rabbi Chalom Dov Ber lut attentivement le rapport. Après mûre réflexion, il demanda qu’on accepte le jeune homme mais précisa qu’il serait nécessaire de surveiller ses progrès. Roch ‘Hodech Tévet, le Rabbi se rendit à l’étranger. Deux mois plus tard, aux alentours de Roch ‘Hodech Adar commençait le tri du blé pour la préparation de la farine nécessaire à la fabrication des Matsot Chmourot. Rabbi Chalom Dov Ber écrivit à son fils, en lui enjoignant de confier à ce jeune homme les travaux les plus durs. Il lui demandait également de le tenir au courant des progrès de ce garçon. Rabbi Yossef Yts’hak suivit à la lettre les instructions de son père. C’est ainsi que le jeune homme fut chargé de trier le blé, d’apporter les meules, de moudre le grain à la main, de porter les sacs les plus lourds. Durant deux semaines, ce garçon ne connut aucun moment de repos mais tout était organisé de façon à ce qu’il ne se rende pas compte qu’il "bénéficiait" d’un traitement spécial. Dès son retour, Rabbi Chalom Dov Ber demanda à son fils un rapport. En général, à Loubavitch, les étudiants ne demandaient pas "pourquoi". Ils agissaient selon ce qu’on leur conseillait. La Yechiva était basée sur quatre piliers: la vérité, l’amour du prochain, la loyauté et la dévotion. Chaque étudiant était considéré comme un fils. L’amour entre les disciples était remarquable. La loyauté et la dévotion des étudiants envers leurs professeurs et vice-versa étaient absolues. Ce n’est que grâce à une telle conduite que la Yechiva put récolter des fruits aussi merveilleux. La veille de Pessa’h, en plus de toutes les autres tâches que chacun devait effectuer, le jeune homme fut aussi chargé de rechercher le ‘Hamets (les moindres miettes de pain) dans la synagogue, les bureaux et la Yechiva, ce qui l’empêcha de se coucher avant deux ou trois heures du matin. Dès sept heures du matin, il devait être à son poste, dans le local réservé à la cuisson des Matsot: il était chargé de cachériser les fours pour la dernière fournée. La veille de Pessa’h, alors que tout le travail avait été terminé, Rabbi Yossef Yts’hak l’appela pour lui recommander d’étudier en profondeur le "Maamar" (discours ‘hassidique) basé sur le verset "Durant six jours, tu mangeras des Matsot". Le lendemain, donc après la veillée du Séder, il devait venir à sept heures du matin pour étudier ce "Maamar" avec Rabbi Yossef Yts’hak dans son bureau. Bien entendu Rabbi Yossef Yts’hak était parfaitement au courant que ce jeune homme était chargé du service à table pendant le Séder, c’est-àdire qu’il devait servir les convives et tout nettoyer après le repas: ce qui signifiait qu’il n’aurait pas terminé avant deux ou trois heures du matin. Rabbi Yossef Yts’hak désirait savoir à quel point ce jeune homme tenait à l’étude de la ‘Hassidout. Sept heures du matin: le garçon arriva, répéta le "Maamar" qu’il avait étudié à fond, selon ses capacités. Il étudia ainsi avec Rabbi Yossef Yts’hak jusqu’à huit heures. Le Rabbi rapporta tout cela à son père, Rabbi Chalom Dov Ber qui exprima sa satisfaction: "Grâce à D.ieu, nous avons planté un arbre... Cela pourra prendre encore du temps mais finalement, il s’épanouira et développera de nombreuses branches et de beaux fruits qui, à leur tour, produiront d’autres fruits..." À l’issue des huit jours de fête, lors du "repas de Machia’h" qui fut servi aux élèves, Rabbi Chalom Dov Ber se tourna vers son fils et lui dit: "Yossef Yts’hak! Regarde ce que peut accomplir la sueur qui résulte d’une Mitsva! Le visage de ce jeune homme a complètement changé: la vulgarité a disparu et il a maintenant vraiment l’apparence d’un Juif digne de ce nom!" Haya Shuchat N’shei Chabad Newsletter
Traduite par Feiga Lubecki