Les actrices du changement
Le 22 Chevat, qui tombe ce Chabbat, fait partie de ces dates que personne ne peut ni ne veut ignorer. C’est un de ces jours de l’année qui paraissent marqués avec une telle force sur le calendrier que celui-ci en paraît différent, moins instrument de mesure du temps qu’expression du cœur des hommes. 22 Chevat : c’est ce jour-là que la Rabbanite ‘Haya Moucka, l’épouse du Rabbi de Loubavitch, quitta ce monde. On a coutume de le noter : le jour où un Tsaddik, un Juste – ou une Tsidkanite – quitte ce monde doit être en soi relevé. Ne nous est-il pas enseigné que ce jour est celui où ses actions arrivent à leur degré suprême et que son départ physique doit d’abord se comprendre comme une élévation ? N’est-il pas encore précisé qu’alors le Tsadik en question «se trouve dans ce monde plus que de son vivant» dans la mesure où il a dépassé les limites naturelles de la matière ? N’est-il pas enfin souligné qu’il ne cesse d’agir dans les mondes spirituels et ainsi «réalise des délivrances sur la terre» ? Le bref rappel de ces idées aurait suffi à faire de ce jour un temps différent des autres, à vivre d’une manière plus pleine et, sans rechercher le paradoxe, plus vivante. Mais ce jour est aussi celui que les femmes qui, au côté de leur mari, sont les émissaires du Rabbi aux quatre coins du monde, ont choisi pour se réunir chaque année à New York. Elles ont un nom collectif : les Chlou’hot – les déléguées. Qui dira l’héroïsme au quotidien de ces femmes qui ont choisi une vie loin du confort rassurant des communautés juives établies ? Qui dira leur action, elles qui, épouses, mères de famille, sont aussi animatrices de communautés, enseignantes, directrices d’institutions qu’elles ont créées et bien d’autres choses encore. Dans les villes, petites ou grandes, de Russie ou de l’Amérique profonde, dans les métropoles d’Europe ou d’Asie, en Afrique ou en Océanie, souvent loin des leurs, elles sont présentes et leur enthousiasme déplace des montagnes d’indifférence et abat toutes les murailles de la froideur et de l’oubli de soi. Elles sont les Chlou’hot et leur vitalité redonne vie à la vie. A toute grande action, il faut une source d’inspiration puissante. Elles ont choisi de se réunir le 22 Chevat et la Rabbanite ‘Haya Mouchka est leur exemple. Peu avant son départ de ce monde, la Rabbanite eut l’occasion de dire ce mot : «Rien n’appartient en propre au Rabbi, lui et tous ses biens sont aux ‘Hassidim». C’est là bien plus qu’une devise ; c’est une vision du monde, fondement d’un mode de vie. Les Chlou’hot le savent. Animées de cette conscience, et du sens de leur responsabilité, elles changent le monde, lui apportant, peu à peu, cette lumière qui, très prochainement, en fera, par la venue de Machia’h, la résidence annoncée de la Présence Divine.
Haim Nisenbaum
Concrètement, l’attente
Dans son Michné Torah, Maïmonide (Hil’hot Mela’him, chap. 11) expose les lois relatives à Machia’h. Il y souligne notamment une double nécessité : «Crois en lui…, attend sa venue». Il a déjà été indiqué qu’il ne s’agit pas là d’une simple répétition ayant valeur d’insistance mais que, au contraire, de nombreux sens peuvent y être trouvés. Ainsi, «attendre sa venue» implique une attitude active qui va au-delà de la simple foi en la réalité des prophéties le concernant. Il en résulte qu’apparaît ici une obligation spécifique : celle d’étudier les lois qui portent sur Machia’h. (d’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch) H.N.
Yitro : Oui et non !
Dans ce monde, c’était des fiançailles, comme il est écrit : «Je t’engage à Moi à tout jamais» (Hochéa 2 : 21), et D.ieu leur donna la lune seulement, comme il est écrit : «la nouvelle lune sera pour vous…» (Chemot 12 : 2). Mais aux jours de Machia’h, il y aura le mariage, comme il est écrit : «Ton époux, ton Créateur» (Yichayahou 54 : 5), et alors D.ieu leur donnera tout, comme il est écrit : «Et le sage brillera comme l’éclat des cieux et celui qui a dirigé la multitude dans le droit chemin, comme les étoiles, à tout jamais» (Daniel 12 :3). (Midrach Rabbah Chemot 15 :30) Nous habitons une réalité définie par deux états fondamentaux. Une chose est ou n’est pas, elle est manifeste ou implicite, en mouvement ou statique, positive (chargée d’énergie) ou négative (déchargée d’énergie). Le phénomène le plus complexe est lui-même la somme de différents degrés de présence ou d’absence. Après que tout ait été dit et fait, tout se réduit à la convergence des nombreux «oui» et des nombreux «non». Le «non» délimite les paramètres d’une chose, établissant ce qui n’est pas et les «oui» remplissent l’espace de ces paramètres avec l’essence de ce qu’une chose est. (Pour donner un exemple : un morceau de bois rouge de deux mètres n’est pas long de trois mètres, n’est pas vert, bleu ou jaune, n’est pas du métal, de la pierre, etc. Les «ne… pas» forment les frontières du morceau de bois, marquant ses limites et ce qui le distingue des autres objets. Par contre, ce qu’il est : du bois, rouge, long de deux mètres, etc., se réfère à ce qui est à l’intérieur de ces frontières, à la qualité et à la nature de ce morceau de bois). Cette nature double de la création est le reflet du fait que la Torah, le plan que «D.ieu regarda pour créer le monde » (Zohar) possède un aspect positif et un aspect négatif. «Je suis l’Eternel votre D.ieu», le commandement positif fondamental, est complété par : «vous n’aurez pas d’autres dieux devant Moi», l’essence de toutes les interdictions divines. «Aime ton prochain comme toi-même» est la contrepartie positive de «Tu ne haïras pas ton frère dans ton cœur». La Torah commande de créer la vie et interdit de la détruire. Elle enjoint d’aider les nécessiteux et interdit de les presser de rembourser leurs dettes. Elle instruit de manger du pain non levé, lors de la fête de Pessa’h et interdit toute consommation de levain pendant sa durée, etc. L’institution du mariage, telle qu’elle est définie et légiférée dans la Torah, inclut également un composant positif et un composant négatif. Selon la Loi de la Torah, le mariage consiste en deux étapes distinctes. D’abord viennent les kiddouchine («consécration», appelés également «éroussine – engagement») : le fiancé donne à la fiancée un objet de valeur. En retour, la fiancée se consacre à lui, ce qui a pour effet qu’elle est «interdite au reste du monde». A partir de ce moment-là, dissoudre les kiddouchine requiert un guet (acte de divorce), comme pour un mariage à part entière. Cependant, le but d’un mariage n’est pas d’interdire l’un des partenaires au reste du monde mais d’accomplir une union entre deux personnes. C’est la fonction des nissouine («mariage»), réalisés par la ‘houpah (dais nuptial), le yi’houd (isolement du couple) et les chéva bra’hot («sept bénédictions») qui unissent les deux époux. En d’autres termes, les kiddouchine définissent les paramètres de la relation, créant un espace dans lequel elle peut exister, tandis que les nissouine remplissent cet espace de la substance de la relation elle-même. Comme nous l’avons dit, les kiddouchine et les nissouine constituent deux phases distinctes du processus du mariage. En fait, à l’origine, les kiddouchine avaient lieu plus tôt. La fiancée continuait alors à vivre chez ses parents. Le couple se préparait pour les nissouine qui se tenaient un an plus tard. (Au cours des siècles récents, les tribulations de l’exil ont porté atteinte à la stabilité de la vie juive et ont soudain causé la dispersion des communautés juives. Il a été considéré peu raisonnable de créer un lien de mariage entre un homme et une femme qui ne vivraient pas ensemble. C’est ce qui explique la pratique contemporaine de faire les nissouine immédiatement à la suite des kidouchine, une seule cérémonie célébrant les deux étapes du mariage). Nos Sages nous disent qu’au mont Sinaï, lorsque D.ieu Se révéla et nous donna la Torah, nous nous consacrâmes à Lui en tant que Sa fiancée. Il ne s’agit cependant que de l’étape des kiddouchine dans notre mariage. Notre union avec Lui ne sera complète qu’à l’Ere de Machia’h, où D.ieu et Israël s’uniront dans les nissouine. Cela ne veut pas dire que notre relation avec D.ieu, aujourd’hui, ne se situe qu’exclusivement dans le domaine du négatif. Comme nous l’avons vu, notre engagement à Lui comprend des commandements positifs tout comme des commandements négatifs. Mais aujourd’hui, nous ne sommes capables que d’établir les paramètres de cette relation et nous n’en réalisons pas la substance essentielle. Aujourd’hui, notre relation à D.ieu se définit par notre engagement à Lui, par nos aspirations à s’unir à Lui mais nous ne faisons pas réellement l’expérience de cette union. Pendant trente-trois siècles, nous avons créé l’espace de notre mariage avec D.ieu et avons défendu ses frontières avec zèle. Nous Lui sommes restés fidèles face à toutes les cultures qui ont tenté de nous séduire. Nous avons établi notre identité comme Son peuple, consacré à Lui seul. Maintenant, nous sommes prêts pour la véritable cérémonie, pour une véritable expérience du Divin, la vérité la plus profonde de notre vie.
Quelles sont les trois Mitsvot essentielles de la femme ?
Les femmes sont astreintes à toutes les Mitsvot négatives de la Torah. Elles sont aussi astreintes à toutes les Mitsvot positives ; cependant, elles sont dispensées des Mitsvot positives qui ne peuvent être accomplies que dans un temps bien précis (exemple : le jour, avant ou après une certaine heure…). Ainsi les femmes sont dispensées de prier à heure fixe ou de mettre les Téfilines. Les femmes sont par contre tenues d’accomplir les Mitsvot positives du Chabbat (écouter le Kiddouch, se reposer…) car celles-ci ont été données sur le mont Sinaï en même temps que les Mitsvot négatives. Le Talmud (Yerouchalmi Chabbat chapitre 2 Hala’ha 6) indique que trois Mitsvot sont réservées en priorité aux femmes juives : les lois de pureté familiale, celles de la Cacherout et celle de l’allumage des bougies avant Chabbat et les fêtes. Du fait que les femmes sont plus souvent à la maison et s’occupent plus particulièrement de ces trois domaines, elles sont naturellement responsables de ces Mitsvot fondamentales qui régissent la vie juive de toute la famille. La pureté familiale et les lois de Tsniout (discrétion et pudeur) font de sa maison un sanctuaire à l’abri des vents extérieurs et des idées de la rue. Ce foyer est bâti sur des bases solides et fidèles. Les bougies de Chabbat répandent la lumière dans la maison et ont la capacité de faire oublier les soucis de la semaine. La femme, la jeune fille et la petite fille qui allument les bougies font régner la joie, la sainteté et la paix dans le foyer. En respectant les lois de la Cacherout, la femme juive veille à la bonne santé physique et spirituelle des membres de sa famille. L’hospitalité pratiquée avec le sourire amène la bénédiction dans la subsistance et le confort de toute la famille. F. L. (d’après Hali’hot Bat Israël – Rav Yitshak Yaakov Fuks)
22 Chevat
Madame Edith Block et son mari (Zal) se trouvaient en vacances à l’hôtel en Floride, peu de temps après la disparition de la regrettée Rabbanite ‘Haya Mouchka, le 22 Chevat 1988. Durant le repas de vendredi soir, une femme ‘hassidique s’approcha de leur table : «Je vois que vous êtes des ‘Hassidim de Loubavitch. Je suis absolument bouleversée par le départ de ce monde de la Rabbanite Schneerson ! Je voudrais vous raconter une histoire qui m’est arrivée personnellement avec elle. Nous sommes des ‘Hassidim de Bobov et avons miraculeusement survécu à la Shoah. Nous étions un groupe de jeunes femmes qui ne parvenions pas à avoir d’enfants. Nous étions les seules survivantes de familles autrefois nombreuses et, bien entendu, nous étions très peinées de cette situation. Nous avons demandé toutes ensemble des bénédictions au Rabbi de Bobov mais sans résultats. L’une d’entre nous décida alors d’aller demander une bénédiction au Rabbi de Loubavitch car elle avait entendu de nombreuses histoires extraordinaires sur le Rabbi qui réalisait des miracles. Environ dix d’entre nous avons décidé de la suivre. Nous savions que le Rabbi habitait sur President Street, non loin de la demeure du Rabbi de Boston. Nous avons attendu dans la rue : nos pieds commençaient à geler et aucune d’entre nous n’osait frapper à la porte du 1304 President Street. Soudain, une voiture s’est arrêtée devant nous ; la conductrice en est sortie et nous a demandé si elle pouvait nous aider. Étonnées, nous avons hésité, balbutié mais finalement nous lui avons expliqué la raison de notre petit rassemblement devant la maison du Rabbi. La dame a sorti un calepin de son sac et nous a demandé nos noms. Puis elle nous donna l’adresse d’un médecin spécialisé dans les problèmes d’infertilité à Manhattan en nous recommandant de lui téléphoner d’ici quelques jours. J’ignore ce qui arriva aux autres dames de notre groupe, nous habitions chacune dans un autre quartier. Je ne peux vous raconter que ce qui m’est arrivé personnellement. Quelques jours plus tard, j’appelai le bureau de ce médecin et la secrétaire m’informa que le prochain rendez-vous n’était possible qu’un an plus tard car le médecin était très occupé. J’éclatai en sanglots et la secrétaire me demanda alors de répéter mon nom puis d’attendre quelques minutes. Elle revint et m’informa qu’en fait, un rendez-vous avait été retenu pour moi par «Madame Schneerson» la semaine suivante ! C’est alors que je compris que la dame rencontrée sur President Street n’était autre que la Rabbanite ‘Haya Mouchka, que son mérite nous protège. Grâce à ce médecin, j’ai pu mettre au monde une fille. Et cette fille unique m’a donné dix petits enfants !» Mrs Henya Laine – Collive Traduite par Feiga Lubecki