Ni grisaille ni tempête
Affaire de climat ou de période ? Le temps semble se partager entre grisaille et violence. De fait, au trop pesant gris du ciel répondent les formes diverses d’une sorte de violence sociale de moins en moins discrète. Il est vrai que la morosité atmosphérique n’engage pas à un dynamisme positif. Pourtant, un pas est franchi, dans un domaine comme dans l’autre, quand il y a avis de tempête. Or, voici que des vents destructeurs ont, de-ci de-là, commencé à souffler. Et les médias, comme les réseaux sociaux, toujours à l’affût des catastrophes, savent nous dire, avec force détails, l’étendue des dégâts. N’a-t-on pas parfois le sentiment que tout cela a un effet sur les attitudes morales et que c’est le même type de souffle qui s’élève dans la sphère sociale détruisant sur son passage ce que les hommes ont sagement cultivé ?
C’est ainsi que, dans le monde global, certains ne trouvent pas d’autre moyen d’expression que la violence et la destruction de biens publics. Dans la sphère communautaire, d’autres affirment qu’ils sont légitimes à rejeter des Juifs qui leur semblent « insuffisants ». Ils estiment avoir fait œuvre utile ; n’ont-ils pas rappelé la « loi » ? Les mots ont au moins autant de puissance que les tornades dévastatrices, ils détruisent à la même échelle. Il existe une idée que le peuple juif cultive depuis bien longtemps ne serait-ce que parce qu’elle est une condition de sa survie : celle de l’amour de l’autre et, plus essentiellement, celle de l’unité profonde de tous. Cela implique savoir ne pas prononcer de jugement ou, si on s’aventure à le faire, y mettre à tout le moins de la compréhension et de l’empathie. Cela veut dire que l’autre n’est pas plus loin de soi qu’une partie de soi-même et que, même si on ne l’approuve pas, cette proximité ne disparaît jamais. Cela veut dire enfin qu’on ne peut classer les gens, en particulier qu’on ne connaît pas, en catégories préétablies, en accepter certains et en refuser d’autres.
Ces notions concernent le monde entier mais sans doute le peuple juif avec encore plus d’acuité. Notre histoire nous les a apprises et la Torah nous les a enseignées. Ecartons donc les déchainements d’hiver. Il suffit que le bon sens – de l’autre – l’emporte.
La lumière et le réceptacle
Décrivant le temps de Machia’h, le prophète Isaïe (11 : 9) enseigne : « Et la terre sera pleine de la connaissance de D.ieu comme l’eau couvre la mer. »
Les ‘hassidim ont expliqué ainsi ce verset : les eaux de la mer recouvrent tout ce qui s’y trouve de façon parfaitement égale mais, à l’endroit où existe un trou, il y a plus d’eau.
De même pour les dévoilements qui se produiront dans les temps messianiques : tout se révèlera en tout de façon égale mais il y aura des degrés à l’infini dans la façon dont on recevra ces révélations. Et ces degrés dépendent de l’effort spirituel d’aujourd’hui, pendant le temps de l’exil.
(D’après les Maamarim Haketsarim de l’Admour Hazakène p. 141)
Vayéra
Délaissant la Présence Divine venue lui rendre visite, trois jours après sa circoncision, Avraham se précipite pour accueillir trois invités. Ils ne sont autres que trois anges à l’apparence humaine. L’un annonce que, dans un an, Sarah, encore stérile, mettra au monde un enfant. Sarah en rit.
Avraham plaide pour la survie de la ville impie de Sodome dont un autre ange lui a annoncé la destruction.
Deux des trois anges se rendent à Sodome pour sauver Loth, le neveu d’Avraham, et sa famille. La femme de Loth est transformée en pilier de sel pour avoir enfreint l’interdiction de regarder en arrière la ville en feu.
Les deux filles de Loth (pensant qu’elles et leur père sont les seuls survivants dans le monde entier) l’enivrent et l’une d’entre elle sera enceinte. Les deux fils qui naîtront de cet épisode seront les ancêtres des nations de Moav et d’Amon
Sarah est prise en otage par Avimélé’h mais il la libère après les avertissements divins qui lui sont apparus en rêve.
Yits’hak (« il rira ») naît et est circoncis à huit jours. Avraham a cent ans et Sarah quatre-vingt-dix ans.
Hagar et Ichmaël sont bannis de chez Avraham et errent dans le désert. D.ieu entend le cri du jeune garçon mourant et lui sauve la vie en montrant un puits d’eau à sa mère.
D.ieu teste le dévouement d’Avraham en lui commandant de sacrifier son fils sur le mont Moriah (le mont du Temple), à Jérusalem. Yits’hak est lié et placé sur l’autel et Avraham lève son couteau. Une voix se fait alors entendre du Ciel et lui ordonne d’arrêter. Un bouc, emprisonné par ses cornes dans des buissons, est offert à la place.
Avraham apprend la naissance d’une fille, Rivkah, chez son neveu Bethouël.
Le secret de la fertilité
Avraham et Sarah étaient célèbres pour leur philanthropie et leur bonté. Leur tente était ouverte des quatre côtés pour pouvoir accueillir des invités provenant de toutes les directions. A l’âge de quatre-vingt-dix-neuf ans, Avraham se circoncit, selon l’injonction Divine. Trois jours plus tard, trois anges lui rendirent visite, l’informant que son épouse de quatre-vingt-neuf ans, Sarah, aurait un enfant.
Ils lui dirent : « Où est Sarah ton épouse ? » « Et il dit : Voici, elle est dans la tente » (Beréchit 18 :9).
Le mot Elav, « lui », s’écrit avec trois nekoudot (« points ») sur le sommet des lettres : le Alèf, le Youd et le Vav. Ces lettres forment ensemble le mot « Ayo » qui signifie : « Où est-il ? ». Rachi le commente en disant que non seulement les anges demandèrent à Avraham où se trouvait Sarah mais ils questionnèrent également Sarah : « Où se trouve Avraham ? » Les anges nous enseignent ici l’importance de s’enquérir de nos hôtes.
La tente du mérite
Le commentaire Keli Yakar pose une question de bon sens à propos de ce verset : pourquoi les anges avaient-ils besoin de demander à Avraham où se trouvait Sarah ? Ils ne sont liés ni au temps ni à l’espace. Ils savaient donc a priori où elle était. Par ailleurs, ils venaient de parler à Avraham. Pourquoi devaient-ils demander à Sarah : « ayo », où est Avraham ? » Le Keli Yakar explique que ces questions ne concernaient pas le lieu où se trouvaient Avraham et Sarah mais ils demandaient quel mérite ils possédaient pour mériter le miracle d’une telle naissance, à leur âge avancé.
Avraham répondit : « beohel », « dans la tente ». « Le mérite est dans la tente. » Avraham et Sarah avaient une grande tente, ouverte de tous les côtés, pour recevoir des invités. Les voyageurs qui traversaient le désert aride, torride et dangereux y trouvaient une oasis de sécurité et de la nourriture. Avraham et Sarah eux-mêmes partaient à la rencontre de ces hôtes pour les recevoir. Et tout cela dans la perspective unique de répandre la conscience qu’il y a « un D.ieu dans le monde ici-bas. » C’est par le mérite de cette hospitalité que D.ieu bénit Avraham et Sarah d’un enfant.
La vie d’un Tsadik
Le Zohar dit que lorsque l’âme d’un Tsadik quitte ce monde, il est encore plus proche de nous que durant son vivant. Cela tient au fait que la vie du Tsadik n’est pas une vie de chair, comme nous le percevons ordinairement, mais une dimension différente de la réalité, purement spirituelle. Rabbi Chnéor Zalman explique dans le Tanya que : « c’est une vie de foi, de crainte et d’amour », amour de D.ieu et de la Torah. Les lettres Alèf, Youd et Vav sont les premières lettres de ces trois mots : Emouna (foi), Yir’a (crainte), veAhava (et amour). Ces trois qualités transcendent la nature de la vie et de la mort. Par leur intermédiaire, les Tsadikim ont la possibilité de voyager à travers tous les mondes pour aider les hommes, leur donner abri et confort et les rassasier dans tous leurs besoins.
C’est ainsi que les points sur le Alèf, le Youd et le Vav font allusion au fait que les anges signifiaient à Avraham : « Nous reconnaissons que toi et Sarah êtes tous deux des Tsadikim. Votre foi, votre crainte et votre amour de D.ieu et de Ses commandements, complets, ont fait de vous une oasis de vie éternelle pour tous. C’est pourquoi D.ieu vous bénira d’un bien extraordinaire. Ta femme donnera naissance à Yits’hak, le premier enfant juif. Tu seras le père de la nation juive et cela durera éternellement. »
Ce concept est renforcé par la valeur numérique des lettres du mot Ayo : dix-sept. Dix-sept est équivalent à Tov, « le bien ». Le bien est l’essence du Tsaddik, le Juste parfait.
Qu’est-ce qu’une Mezouza ?
La Mezouza est constituée d’un parchemin écrit à la main avec une encre spéciale par un Sofère (scribe) ; enroulé, ce parchemin est protégé (d’un film plastique ou d’un étui décoré) puis fixé sur le linteau de chaque porte (sauf les salles d’eau).
Sur le parchemin sont écrits les deux premiers paragraphes du Chema Israël - rappelant l’unité de D.ieu et le principe de la punition et de la récompense.
« Chaque fois qu’il entre ou qu’il sort, le Juif se souvient grâce à la Mezouza de l’Unité de D.ieu et est entraîné à L’aimer et à se réveiller de toutes ses erreurs. Il réalisera que rien d’autre que D.ieu n’est éternel et immédiatement il se conduira de façon droite » (Rambam Hil’hot Mezouza 6 : 13).
Hommes et femmes sont tenus de poser (ou de faire poser) des Mezouzot cachères à chacune des portes puisque cette Mitsva ne dépend pas du temps et, de plus, apporte longue vie et protection.
Même s’il n’y a pas de porte, il faudra fixer une Mezouza s’il y a « la forme de la porte ».
Les lois de la fixation d’une Mezouza sont parfois complexes et il convient de demander l’avis d’une autorité rabbinique compétente : à quelle hauteur exacte la placer et de quel côté.
On n’achètera une Mezouza qu’auprès d’organismes certifiés.
L’encre peut parfois s’effacer et il est donc recommandé de faire vérifier régulièrement ses Mezouzot.
(d’après Chemirat Mitsvot Hayom)
Et la bénédiction continue…
Je me suis rendue en audience privée auprès du Rabbi de Loubavitch au printemps 1990. Je lui demandai entre autres une bénédiction pour ma sœur qui, mariée depuis quelques années, n’avait toujours pas d’enfants. Les nombreux spécialistes qu’elle avait consultés l’avaient assurée sans ménagement qu’elle n’avait pratiquement aucune chance de mettre au monde des enfants.
Le Rabbi accorda sa bénédiction et ajouta que ma sœur devrait fixer des Mezouzot aux portes de sa maison. Je n’avais pas révélé au Rabbi que ma sœur n’en avait aucune chez elle mais, apparemment, il le savait.
Comme je me trouvais à Brooklyn, je me rendis à quelques mètres de la grande synagogue du Rabbi, entrai dans un magasin de Judaïca, calculai combien de Mezouzot seraient nécessaires pour la maison de ma sœur et les lui envoyai en express. Elle et son mari les fixèrent immédiatement à toutes leurs portes avec la bénédiction adéquate – comme indiqué sur le prospectus.
Un an plus tard – presque jour pour jour après mon entrevue avec le Rabbi – ma sœur mit au monde un premier enfant et, deux ans après, un deuxième. Inutile de décrire la joie de toute la famille devant ces miracles auxquels les meilleurs médecins lui avaient conseillé de ne pas rêver…
De nombreuses années ont passé mais la bénédiction miraculeuse n’a jamais quitté la famille.
Mon beau-frère fut l’une des premières victimes lors des attaques du 11 septembre 2001 contre les tours jumelles à New York. Il se trouvait là quand le World Trade Center s’écroula sous le crash des avions. Toute communication téléphonique dans ce quartier de Manhattan était pratiquement impossible. Le chaos était tel que, pendant plusieurs jours, personne ne fut capable ni de dénombrer avec précision les victimes ni de les identifier. Ma sœur était affolée et terriblement angoissée comme le reste du monde. Finalement, elle apprit que son mari avait survécu et était soigné à l’hôpital. C’est là que nous avons appris ce qui s’était passé et que nous avons constaté que la bénédiction continuait.
Mon beau-frère se souvint avoir aperçu un objet qui allait s’abattre sur lui et ce fut la dernière chose dont il eut conscience avant de s’évanouir. Quand il se réveilla des heures plus tard, il apprit qu’un pompier lui avait sauvé la vie en le poussant hors de la trajectoire de l’objet qui aurait pu définitivement le tuer.
Pourquoi lui ? Pourquoi le pompier avait-il eu le réflexe de le pousser lui plutôt que d’autres personnes alentour ?
Nous apprîmes par la suite que ce pompier avait un enfant dans la même classe que mon neveu. Le pompier s’était souvenu avoir vu mon beau-frère lors des réunions de parents d’élèves et fêtes enfantines. Dans l’affolement de l’attentat – alors que tout se passait si vite, qu’il y avait tant de mort et de destruction dans les débris des deux tours – le pompier avait eu le réflexe de sauver une personne qu’il avait déjà eu l’occasion de croiser dans sa vie, le père d’un camarade de classe de son propre fils. Instinctivement, il s’était souvenu de son enfant et avait agi aussi rapidement que possible pour sauver celui qui n’était pas un total inconnu pour lui.
L’enfant qui était dans la classe du fils du pompier n’était autre que l’enfant du miracle, né grâce à la bénédiction du Rabbi qui aime chacun et voit en lui la lumière qu’il peut apporter dans le monde. Cet enfant était né après que ses parents aient accompli la Mitsva de la Mezouza, ce parchemin fixé aux portes de nos maisons et de nos chambres pour nous protéger constamment – que nous soyons à l’intérieur ou à l’extérieur.
Raconté par Sofya Tamarkin - Chabad.org
Traduit par Feiga Lubecki