Lundi, 28 septembre 2020

  • Yom Kippour
Editorial

 Le secret de Yom Kippour

Tout a sans doute été dit sur Yom Kippour : sa grandeur et sa solennité, sa noblesse et sa subtile douceur et le fait que chacun sache y trouver sa place. Pourtant, on ne se lasse jamais de redire le caractère particulier de cette journée. On la garde au fond de soi comme un souvenir vivant, une chose que l’on chérit parce qu’ancienne et précieuse et qui sait, en même temps, avoir toute la vigueur du présent et l’enthousiasme de l’avenir. Et cette année, elle se découpe avec encore plus de clarté sur le fond morose de l’époque. Pourquoi donc Yom Kippour est-il ce jour qui ne se détache d’aucune conscience ?

De fait, à Yom Kippour, chacun ressent comme un appel profond, qui le touche plus qu’il ne saurait le dire. C’est un appel qui le traverse de part en part, se saisit de lui et l’entraîne dans ce grand voyage du jour. L’appel vient de loin : c’est l’essence du Créateur qui s’adresse à lui, souligne la mystique juive. Mais, alors qu’il est fait ainsi référence à l’Infini, cette voix pénètre jusqu’au niveau – pour ainsi dire intimiste – de l’essence individuelle de la créature. Peut-être approche-t-on le secret du moment : l’Infini s’unissant au fini, D.ieu à l’homme ? Est-ce un hasard si les Sages du Talmud qualifient cette journée de « jour unique de l’année » comme si, finalement, c’est d’une unité surprenante et bouleversante qu’il était alors question ?

A l’époque où le Temple se dressait sur sa colline, à Jérusalem, ce jour était celui où, pour la seule fois de l’année, un homme, le Cohen Gadol – le grand-prêtre – entrait dans l’endroit le plus saint qui ait jamais existé en ce monde : le saint des saints, au cœur même du Temple. Il y priait, demandant à D.ieu qu’Il accorde à tous une année de vie et d’abondance. En ce lieu et en ce moment où le plus haut niveau du spirituel apparaissait, c’est de vie quotidienne qu’il était ainsi question. Car c’est ainsi que vont les choses. De même que le monde ne doit pas gêner ou obscurcir le spirituel, le spirituel ne doit pas faire oublier le monde ou en détourner. C’est dans le monde et dans chaque seconde de la vie que l’on s’attache à D.ieu et Yom Kippour sait réunir ces deux pôles de toute existence humaine. Voilà qui lui donne une puissante signification en ces temps d’incertitude : se lier à D.ieu, c’est aussi apporter à tout et à tous vie et pérennité.

C’est aussi pourquoi on n’en sort pas inchangé. On sait que D.ieu pardonne les fautes commises et que la vie reprend sur des bases nouvelles. L’unité essentielle ressentie en ce jour nous conduit au-delà de nous-mêmes et ce dépassement nous mène à une réalité meilleure et plus sereine que celle que nous avons vécue jusqu’ici. En des temps difficiles, c’est là une certitude précieuse. Pour une année bonne et douce.

Etincelles de Machiah

 Connaître D.ieu

Bien qu’il y ait des différences entre le grand et le petit, cependant quand il s’agira, après le venue de Machia’h, de « Me connaître » - c’est-à-dire de percevoir l’Essence de D.ieu – tous seront égaux. Le texte de la prière le proclame en ces termes : « Il est immuable et met au même niveau le petit et le grand ».

 (d’après Séfer Hasi’hot 5748, vol. I, p.220)

Vivre avec la Paracha

 Yom Kippour : Attention ! Votre extase doit être tempérée

La lecture de la Torah que l’on fait à Yom Kippour évoque le service du Grand Prêtre, dans le Temple, lors de ce jour le plus saint de l’année. Elle commence par les mots : « L’Eternel parla à Moché après la mort des deux fils d’Aharon, quand ils s’approchèrent devant D.ieu, et ils moururent ».

Quelle relation peut bien avoir ce verset initial avec notre service personnel de Yom Kippour ? L’examen attentif du « péché » qui conduisit à la mort prématurée de Nadav et Avihou répond à cette question.

Le Tabernacle avait été inauguré par une révélation Divine à laquelle avait assisté la nation entière. Le Peuple juif avait alors poussé un soupir de soulagement collectif, réalisant que D.ieu leur avait entièrement pardonné le péché du Veau d’Or. A ce moment historique et saint, les deux saints fils d’Aharon furent saisis d’une extase divine. Leur élévation spirituelle les fit se précipiter dans le Saint des Saints avec une offrande d’encens et là, leur âme fut saturée de Divinité et s’échappa pour être absorbée dans le Saint Feu qui jaillit pour accueillir ces âmes pures.

Alors que d’autres religions, toutes axées sur la poursuite de spiritualité, auraient récompensé un acte si imprégné de sainteté, le Judaïsme, quant à lui, considère « de travers » leur acte. Les élévations spirituelles sont exaltantes et inspirantes mais elles ne constituent pas la raison pour laquelle nous avons été créés. Nous avons été créés pour imprégner de Divinité notre environnement matériel, et ce, par les Mitsvot, actions apparemment très concrètes. Toute élévation spirituelle qui ne se concrétise pas, par la suite et matériellement, dans la vie quotidienne est certes enivrante mais elle reste virtuellement inutile.

Quelle leçon importante à garder en tête le jour de Yom Kippour !

« Les affaires sont les affaires » ne peut tout simplement pas avoir de sens après Yom Kippour. Le but suprême de ce jour saint, le jour où nous sommes comparés à des anges vêtus tout de blanc, est de donner du sens et de la sainteté aux « affaires » de tous les jours.

Comment pénétrer dans le Saint des Saints

A ‘Hanouccah, nous allumons la Menorah et à Pessa’h, nous mangeons de la Matsa. Mais de quoi s’agit-il à Yom Kippour ?

Bien qu’il y ait un certain nombre d’interdits associés à ce jour le plus saint de l’année, manger, boire, porter du cuir, se laver, etc., Yom Kippour est principalement associé à la prière, aux longues prières qui occupent presque toutes les heures de la fête.

Il est intéressant d’observer que la prière est à peine mentionnée dans les commandements bibliques à propos de Yom Kippour. Au lieu de cela, la Torah consacre un chapitre entier à la procédure du service de Yom Kippour dans le Temple, un service comparable à ceux d’aucune autre fête, en termes de longueur, de difficulté et de détails. Le point central de ce service était la convergence entre les éléments les plus saints du temps, de l’espace et de l’être vivant. Le jour le plus saint de l’année, la personne la plus sainte, le Grand Prêtre, pénétrait le lieu le plus saint de la terre, le Saint des Saints dans le Sanctuaire, là où il allait prier pour le bien-être de tous ses frères et assurer leur pardon.

Aujourd’hui, nous n’avons plus de service dans le Temple, au lieu de cela, nous prions. Avec nos prières, nous tentons de reconstituer, en termes spirituels, le service du Temple et espérons ainsi produire le même effet, obtenir le même pardon que ceux que nous assuraient ces célébrations.

Chaque Juif est un Temple potentiel pour D.ieu et chaque individu est le Grand Prêtre qui officie dans son Temple personnel. Le but de la prière de Yom Kippour est d’accéder au Saint des Saints de son Temple privé.

Et le jour de Yom Kippour, nous est accordée cette possibilité d’accéder à ce lieu normalement hors de la portée de notre conscience. Ainsi nous ravivons notre relation avec D.ieu pour l’année à venir et suscitons en Lui un effet réciproque. Il Lui est rappelé que cette relation avec nous fait aussi partie de ce qu’Il est. Il ne peut nous oublier pas plus que nous ne pouvons L’oublier. Et ainsi, quelles que soient les transgressions de l’année précédente, D.ieu accorde à Ses enfants le pardon et les inscrit dans le Livre de la vie et de la prospérité.

*  *  *

(Le Rabbi, lors d'un discours prononcé la veille de Yom Kippour 5747-1986, mit l'accent sur le fait que le service de Yom Kippour révèle concrètement en nous la Ye’hida, c’est-à-dire notre union absolue avec l’étincelle Divine, éternellement parfaite, que chacun d’entre nous possède.)

En discutant du thème de la Révélation de « Celui Qui est Un et Unique en Haut » dans le monde temporel, nous observons que nous pouvons réfléchir aux outils de la technologie moderne, que nous utilisons dans un rassemblement, pour amplifier et transmettre instantanément le son, d’un lieu à un autre. Il apparaît ainsi une analogie significative avec la révélation de la Divinité dans le monde.

Cette technologie peut relier tous les Juifs de par le monde et réaliser concrètement le fait que « toutes les tribus d’Israël étaient unies. »

Dans notre cas, ce phénomène est extrêmement instructif.

Ici le Juif voit le potentiel de révéler l’infinie puissance de Celui qui est Un dans le monde, précisément dans la matérialité du monde (...) par le biais de la reproduction de la « Parole de D.ieu ».

Cela inclut également des mots d’encouragement qui peuvent être transmis et entendus partout dans le monde, instantanément. Et ils unissent tous les Juifs qui les entendent (…)

Cela accroît également notre potentiel de recevoir d’encore plus grandes bénédictions.

Que le Saint Béni soit-Il accorde à chaque Juif Gmar Ve’hatimah Tova, dans tous les domaines, spirituels et matériels.

Puisque nous désirons que les bénédictions de D.ieu s’expriment dans les différents aspects de nos besoins, il nous faut réellement prier et délimiter les bénédictions précises pour lesquelles nous invoquons D.ieu.

On a la coutume de citer ces bénédictions dans l’ordre de l’Aleph Beth.

Que ce soit une année de Orah (lumière)

Une année de Bera’ha (bénédiction)

Une année de Guilah (joie)

Une année de Ditsa (joie exubérante)

Une année de Hod veHadar (splendeur et gloire)

Une année de Vaad Tov (rassemblement heureux)

Une année de Zè’hiot Guedolot (grands mérites)

Une année de ‘Hayim Tovim VeArou’him (une bonne et longue vie)

Une année Tova (bonne)

Une année de Yi’houd (unité), « le peuple uni pour affirmer Ton unité » (Sidour) : quand les Juifs vivent une véritable unité, ils peuvent alors arriver au niveau du véritable Ahavat Israël (amour du prochain).

L’unité influencera le monde matériel et nous aurons une année de
Kalkala (abondance matérielle). D.ieu nous donnera également les forces et les qualités nécessaires pour accomplir ces bonnes résolutions et pour absorber toutes Ses bénédictions, à commencer par la bénédiction de la paix et de la Torah.

Cela nous mènera à une année de Limoudim (étude de la Torah), avec une vigueur et une diligence renouvelées, et en même temps, une année élevée, où nous dominerons avec la main levée.

Une année de Nissim Guedolim (grands miracles), plus grands encore que ceux que nous avons vécus à la Sortie d’Égypte.

Et que dès le début de l’année, puissions-nous voir un Simane Tov (un signe favorable) en même temps que Siyata DiChmaya (l’aide Divine).

Cela donnera à tous les Juifs une année de Oz (force) et une année de Pédout (délivrance) jusqu’au niveau de « délivre mon âme en paix ». Cela viendra avec la véritable et complète Rédemption.

Une joyeuse année de Tsahala (exultation))

Une année de Tsidkato (bienveillance du Saint Béni soit-Il) parce que ce sera une année où nous serons Komémiout (nous aurons la tête haute) et une année de Sim’ha (bonheur), « et une joie éternelle sur leur tête » (Yichayahou 35 :10).

Cela conduira à une année de Tehila (louange), « que ma bouche soit emplie de Ta louange » (Tehilim 71 :8)).

Tout cela sera associé à : « Alors votre bouche sera pleine de rire » (Tehilim 126 :2) au moment de la véritable et complète Rédemption.

Bénédictions du Rabbi, veille de Yom Kippour 5747 (1986)

Le Coin de la Halacha

 Que fait-on à Yom Kippour ?

(cette année lundi 28 septembre 2020)

Dans la semaine qui précède Yom Kippour, on procède aux  Kapparot : on fait tourner autour de sa tête trois fois un poulet vivant (ou un poisson, ou une somme d’argent multiple de 18) en récitant les versets traditionnels ; puis on donne le poulet (ou le poisson ou la valeur monétaire) à une institution charitable.

La veille de Yom Kippour (cette année dimanche 27 septembre 2020), on a coutume de demander au responsable de la synagogue du gâteau au miel, symbole d’une bonne et douce année. Jusqu’à la fin du mois de Tichri, on ne récite plus de Ta’hanoun (supplications).

Il est d’usage que les hommes se trempent au Mikvé (bain rituel), si possible avant la prière de Min’ha. On met les vêtements de Chabbat. Après la prière de Min’ha, on prend un repas de fête, sans poisson ni viande, mais avec du poulet. Après le repas, les parents bénissent les enfants et leur souhaitent d’aller toujours dans le droit chemin. Le jeûne de Yom Kippour commence à 19h19 (en Ile-de-France).

Après avoir mis des pièces à la Tsedaka, les femmes mariées allument au moins deux bougies avant 19h19 (en Ile-de-France), (les jeunes filles et petites filles allument une bougie) et récitent les deux bénédictions suivantes :

1) « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Lehadlik Nèr Chel Yom Hakipourim » - « Béni sois-Tu, Eternel, notre D.ieu, Roi du monde, qui nous a sanctifié par Ses Commandements et nous a ordonné d’allumer la lumière de Yom Kippour ».

2) « Barou’h Ata Ado-naÏ Elo-hénou Mélè’h Haolam Chéhé’héyanou Vekiyemanou Vehigianou Lizmane Hazé » - « Béni sois-Tu, Eternel, notre D.ieu, Roi du monde, qui nous a fait vivre, qui nous a maintenus et nous a fait parvenir à cet instant ».

Il est d’usage d’allumer également une bougie qui dure au moins vingt-cinq heures et sur laquelle on récitera la bénédiction de la « Havdala » à la fin de la fête. On allume aussi des bougies de vingt-cinq heures à la mémoire des parents disparus.

On enlève les chaussures en cuir et on met des chaussures en toile ou en plastique. Les hommes mariés mettent le grand Talit et le « Kittel » (vêtement rituel blanc).

Pendant tout Yom Kippour, on récite la deuxième phrase du Chema Israël (« Barou’h Chem… ») à voix haute. Il est interdit de manger, de boire, de s’enduire de crèmes ou de pommades, de mettre des chaussures en cuir, d’avoir des relations conjugales et de se laver (sauf si on s’est sali ; de même, on se lave les mains pour des raisons d’hygiène). On passe la journée à la synagogue. Toutes les interdictions de Chabbat s’appliquent à Yom Kippour.

Ce lundi matin, on ne récite pas la bénédiction : « Cheassa Li Kol Tsorki » (« Qui veille pour moi à tous mes besoins ») car on ne porte pas de vraies chaussures.

Les malades demanderont au médecin et au Rabbin s’ils doivent jeûner ou non.

A la fin du jeûne (20h22 en Ile-de-France), on écoute - si possible - la sonnerie du Choffar.

Après Yom Kippour, on se souhaite mutuellement « Hag Saméa’h ». Si possible, on prononce la bénédiction de la lune. On récite la prière de la Havdala, on se lave les mains rituellement et on se rince la bouche. Durant le repas qui suit le jeûne, il est d’usage de parler de la construction de la Souccah et, si possible, on construit effectivement la Souccah tout de suite après le repas.

Le Recit de la Semaine

 Yizkor, que D.ieu se souvienne de Babouchka Perla !

Got’s Nommen

Il y a trois mois, nous avons enterré une femme de 90 ans à Zhitomir (Ukraine). Malgré tout ce que cette femme avait enduré, elle était restée ferme dans ses convictions et son attachement au judaïsme.

Il y a 18 ans, le lendemain de Yom Kippour, elle avait surgi en larmes après l’office du matin dans notre synagogue de Zhitomir, vraiment bouleversée !

L’un d’entre nous s’est approché d’elle et lui a gentiment demandé quel était son problème : avait-elle des soucis d’argent ? S’était-elle disputée avec quelqu’un ? Avait-elle mal supporté le jeûne la veille ?

Non, son problème était différent, c’était un problème auquel nul d’entre nous n’avait jamais été confronté…

« Comment ai-je pu oublier Got’s Nommen ? » se désespérait-elle.

(Got’s Nommen - en yiddish : le Nom de D.ieu : c’est ainsi qu’on appelle le lendemain de Yom Kippour, quand les Juifs sont encore sous l’influence du Nom Ineffable de D.ieu qu’on entendait dans le Temple le jour de Yom Kippour).

On voyait sur elle qu’elle en avait le cœur brisé. Mais pourquoi était-ce si important ? Ce jour était-il si spécial ?

« Ma mère m’avait toujours appris que le lendemain de Yom Kippour, il faut se lever tôt pour aller à la synagogue, expliqua-t-elle dans un yiddish délicieusement ancien. Et voilà que je réalise que j’ai raté la prière ! »

Le Chalia’h (émissaire du Rabbi) présent tenta de la consoler en récitant avec elle quelques chapitres de Tehilim (Psaumes).

« Ma mère m’avait expliqué que, le lendemain de Yom Kippour, le mauvais penchant vient accuser les Juifs : ‘Voilà ! Ils ne viennent prier qu’un seul jour dans l’année et, le lendemain, la synagogue est vide ! C’est pourquoi il faut venir tôt à la Choule le lendemain de Yom Kippour, ce jour qu’on appelle Got’s Nommen !’ ».

Telle était la cause des larmes de Grand-Mère Perla, la doyenne de la communauté de Zhitomir (Ukraine) que nous enterrons aujourd’hui, 3 Tamouz 5780, un jour avant qu’elle ne célèbre ses 90 ans. Elle avait traversé le siècle avec ses guerres et ses révolutions, elle avait survécu à tous ceux qui avaient voulu éteindre toute trace de judaïsme en Union Soviétique, elle avait vécu souffrances et privations, dans une quasi clandestinité pour respecter des Mitsvot et elle se désolait de n’être pas venue spécialement tôt pour prier le lendemain de Yom Kippour ! L’éducation que sa mère lui avait donnée avait été si évidente, si puissante qu’elle pleurait encore maintenant comme une petite fille de ne pas s’être rappelée de ce détail.

De cet épisode incroyable, on peut déduire combien cette femme et tant d’autres Nechamot, d’âmes juives qui avaient vécu dans ces conditions terribles, étaient habitées d’une foi pure qui force le respect. C’est vraiment un récit digne du Baal Chem Tov !

Perla avait habité dans la maison où avait grandi celui qui devint le grand poète israélien Bialik. (Il y a quelques années, on avait achevé dans cette maison l’écriture d’un Séfer Torah à la mémoire d’un proche parent de Bialik).

Il n’y avait pas d’eau courante dans sa maison et tous les mercredis, elle allait puiser l’eau pour nettoyer sa demeure en l’honneur du Chabbat.

Alors même qu’elle approchait des 90 ans et qu’elle craignait d’allumer du feu, elle tenait à garder la tradition et allumait symboliquement le vendredi soir deux lumières électriques. Durant tout le Chabbat, elle veillait scrupuleusement à ne manger que des ‘Hallot ou du pain cuit dans un four allumé par un Juif - non sans s’être préalablement lavé les mains de façon rituelle.

Elle possédait un Ma’hzor (livre de prière pour les jours de fêtes juives) et le feuilletait chaque jour.

Un jour on lui demanda si l’observance des Mitsvot avait représenté pour elle un grand effort ; elle raconta :

« C’était à Pessa’h. Encore avant la guerre. Il n’y avait pas d’école juive en Union Soviétique d’alors. Je suis arrivée à l’école laïque, affamée et faible parce que depuis quelques jours, il n’y avait rien à manger à la maison. Une de mes camarades s’en est aperçue et m’a gentiment proposé un petit pain frais, si appétissant !

J’avais très faim et j’étais sur le point d’accepter quand je me suis souvenue que c’était Pessa’h et qu’on n’a pas le droit de manger du ‘Hametz (levain). J’ai donc, évidemment, refusé le petit pain malgré cette faim insupportable… »

Elle avait dit « évidemment », car, pour elle, ce n’était même pas une question, ce n’était même pas un sacrifice, c’était évident, voilà tout !

Perla veillait sur les enfants des Chlou’him et racontait avec simplicité qu’elle récitait chaque jour des Tehilim pour leur protection. A la synagogue, elle distribuait des noix à tous les enfants et, à ‘Hanouccah, elle qui était pourtant loin d’avoir assez d’argent pour elle-même leur donnait du « ‘Hanouccah Gelt », les pièces que les parents donnent traditionnellement aux enfants en l’honneur de la fête.

Tous les jours de fête - et, bien sûr, spécialement le jour de Got’s Nommen - elle arrivait tôt à la synagogue. Pour Chavouot, elle n’oubliait pas d’apporter à l’avance des fleurs car elle se rappelait que, dans son enfance, on décorait ce jour-là la synagogue avec des fleurs.

A la synagogue, elle s’asseyait le plus près possible de la Me’hitsa et écoutait attentivement chaque mot de la prière. A la fin de l’office, elle s’approchait avec émotion de l’arche sainte et priait en versant des larmes.

Perla, Grand-Mère courage, vous étiez le symbole, l’exemple vivant d’une Nechama (âme) pure, lumineuse et sincère. Nous nous souviendrons toujours de vous comme la « Babouchka Perla » de la communauté de Zhitomir.

Et, en ce jour de Yom Kippour, nous pensons à vous ainsi qu’à toutes les Babouchkas qui se sont dévouées corps et âme pour transmettre le judaïsme aux générations suivantes - quelles que soient les circonstances et malgré toutes les difficultés. Certainement, de là-haut, vous bénissez votre communauté et tous ceux que vous avez connus et encouragés à votre manière, avec tant d’évidence, dans le chemin de la Torah.

Mendel Wilhelm - Zhitomir

Traduit par Feiga Lubecki