Chavouot : à la base de tout
Inutile, sans doute, de décrire ce sentiment que chacun éprouve : cette semaine culmine avec un Chabbat qui précède immédiatement le grand rendez-vous du Don de la Torah, la fête de Chavouot, que nous attendions depuis la célébration de Pessa’h et à laquelle, d’année en année, l’univers est suspendu. Semaine d’attente et d’intense préparation, elle se déroule, nous emportant dans son sillage. C’est que cette année présente une particularité notable : elle nous invite à vivre trois jours de sainteté d’affilée, le Chabbat puis les deux jours de fête qui suivent sans interruption. Ce rythme exceptionnel fixe, comme de manière inébranlable, ce qu’il incarne. Et cela est d’autant plus précieux que c’est de la fête de Chavouot qu’il s’agit.
De fait, il est souvent observé que, contrairement aux autres grandes célébrations du calendrier juif, Chavouot ne présente pas de commandement spécifique. Certes, c’est un jour de fête et, par conséquent, tout travail y est interdit. Certes encore, se rendre à la synagogue en son premier jour pour y écouter la lecture des Dix commandements dans la Torah est un acte spirituellement essentiel. Mais nous n’y trouvons rien qui la différencie spécialement, un équivalent de la Matsa de Pessa’h, du Chofar de Roch Hachana ou du Loulav de Souccot. Tout se passe comme si ces jours, pourtant si centraux, devaient apparaître, au premier regard, semblables à des journées ordinaires.
C’est justement là que tient la réponse à cette interrogation. Toutes les fêtes qui jalonnent l’année portent leur message. Et chacun est indispensable à la vie juive. Mais, au préalable, il est nécessaire de poser la base de l’ensemble. Or, cette base ne peut pas être limitée à un domaine, elle doit servir de fondement à tous. C’est précisément le rôle de Chavouot : elle se présente comme ce qui nous permettra ensuite de développer notre vie et notre action. N’est-elle pas l’apparition de la Volonté Divine dans le monde, le jour où la Loi donne aux hommes le cadre de leur existence ?
Il est clair qu’après Chavouot le monde n’est plus le même. A présent, il est le lieu où les actions des hommes ont un véritable poids ; elles transforment les choses et portent loin les espoirs humains. Nous sommes les descendants de cet événement. Vivant ce don au présent, nous lui donnons expression concrète tous les jours. C’est pourquoi cette fête de Chavouot ne nous laissera pas inchangé. Elle nous fait le cadeau de la conscience. A nous de nous en saisir.
La joie comme clé
On raconte, à propos d’un des Maîtres de la ‘Hassidout polonaise, que, lorsqu’il était encore un jeune enfant, il demanda une pomme à son père. Celui-ci refusa de lui donner le fruit. L’enfant était intelligent ; il prononça la bénédiction requise sur la pomme et obligea ainsi son père à la lui donner pour lui éviter de l’avoir dite en vain.
Nous vivons une situation semblable. Lorsque les Juifs se réjouissent, dès à présent, de la venue de la Délivrance avec une confiance absolue dans le fait que D.ieu enverra très bientôt le Machia’h, cette joie même « conduit » D.ieu à répondre favorablement à leur attente. Il ne s’agit pas là de forcer la décision divine mais d’accomplir Sa volonté avec la plus grande joie.
(d’après Likoutei Si’hot, vol. XX, p.384)
Chavouot : Se préparer au Don de la Torah
Le Midrach déclare que le Peuple juif dormit toute la nuit avant le Matan Torah (le Don de la Torah). Il explique que les Juifs se comportèrent ainsi parce que « le sommeil de Atsérèt (Chavouot) est doux et que la nuit est courte. » De plus, il poursuit : « Cette nuit-là, même le pourtana (une espèce d’insecte qui pique) ne les piqua pas. »
Il conclut en indiquant que lorsque D.ieu vint à l’aube et trouva le peuple endormi, il Lui fut nécessaire de les réveiller. Tel est donc le sens de la question de D.ieu : « Comment se fait-il que Je sois là [pour donner la Torah] et qu’il n’y ait personne ici ? J’ai appelé et personne n’a répondu. »
Nos Sages nous informent que lorsque les Hébreux entendirent que, cinquante jours après leur départ d’Égypte, ils recevraient la Torah, ils furent emplis d’un désir intense d’arriver à ce jour. Ils commencèrent donc à compter les jours qui restaient jusqu’au Don de la Torah.
Si l’on réfléchit à l’enthousiasme extrême qui les habitait sept semaines avant l’événement, l’on peut facilement envisager à quel summum étaient arrivés leur aspiration et leur flamme, la nuit précédant l’événement. Dans ces conditions, comment est-il possible qu’ils aient dormi cette nuit-là et, a fortiori, d’un sommeil si profond ?
Cela nous conduit à l’inévitable conclusion que lorsqu’ils allèrent se coucher, cette nuit-là, ce n’était certainement pas parce qu’ils ne pensaient plus à la Torah. Bien au contraire, s’assoupir leur servait, dans un certain sens, à la recevoir.
Une autre preuve que ce sommeil était une forme de préparation à recevoir la Torah se déduit du miracle qui se produisit puisqu’aucun pourtana ne vint les déranger pendant qu’ils dormaient.
Il nous faut donc comprendre comment ce sommeil profond constituait-il une préparation pour recevoir la Torah.
Rabbi Chnéor Zalman de Lyadi écrit que, quelque profonde que soit la compréhension de l’âme de la Divinité et quelque qu’entière que soit son union avec Elle, quand elle est « habillée » dans un corps, cela ne peut en aucune mesure être comparé au niveau de son attachement à D.ieu avant qu’elle ne descende dans un corps et n’en soit encombrée. Tout simplement parce que le corps est incapable d’expérimenter une telle sainteté.
Quand une personne dort, une grande partie de son âme quitte son corps et monte En Haut. L’âme de celui qui dort peut donc atteindre de plus hauts niveaux d’élévation spirituelle que lorsqu’il est en état de veille.
C’est la raison pour laquelle les Juifs allèrent dormir juste avant Matan Torah : ils voulaient que leur âme atteigne de sublimes élévations spirituelles. Ils pensaient que ce serait la meilleure préparation possible pour cette Révélation extraordinaire qu’ils étaient sur le point de recevoir d’En haut, au moment du Don de la Torah.
Malgré leur bonne intention, D.ieu fut insatisfait du fait qu’ils soient allés dormir car ils auraient dû se préparer différemment.
Le Matan Torah possédait une particularité exclusive. Après la Révélation sinaïtique, l’accomplissement des Mitsvot allait permettre de raffiner et d’élever à la sainteté les objets et le monde matériel en général, ce qui n’était pas le cas auparavant. C’est d’ailleurs très précisément par l’implication dans la matérialité et le raffinement du corps et de l’environnement que l’on pouvait désormais atteindre l’union avec l’Essence Divine, quelque chose que ne pouvait accomplir l’âme seule.
Depuis, le Matan Torah sert de guide et de stimulation pour le service spirituel de l’âme dans un corps. Il s’ensuit que la préparation pour le Don de la Torah aurait dû suivre le même processus : non pas fuir la corporalité mais au contraire rester complètement dans le cadre et le confinement d’un corps physique pour accomplir son service spirituel.
[Ndt : C’est la raison pour laquelle, nous veillons, la première nuit de Chavouot, en guise de « réparation ».]
Une voix qui ne cesse pas
En ce qui concerne la voix par laquelle D.ieu donna la Torah, elle est décrite dans le verset comme « une grande voix qui ne cesse pas » (Devarim 5: 19). Le Midrach propose trois explications de ce verset :
- La voix ne s’exprimait pas seulement en Langue Sainte (l’hébreu) mais elle se divisait en sept langues et puis dans les langages des soixante-dix nations.
- La voix ne cessa pas mais elle est continuelle. En effet, ce sont ces mêmes flux de la voix qui donna la Torah qui seront révélés par la suite aux Prophètes et aux Sages.
- La voix n’avait pas d’écho.
Pourquoi le Midrach nous donne-t-il ces trois commentaires apparemment si différents les uns des autres ?
Les nations non-juives ont l’injonction d’observer les 7 lois noa’hides qui se divisent à leur tour en de nombreux commandements dérivés. Il est de fait que, lorsque cela est possible, les Juifs doivent les aider à les observer.
Pour que nous puissions réaliser que les lois des nations sont également connectées au Don de la Torah, le Midrach nous informe que la voix fut divisée en soixante-dix langages des nations du monde. Et leurs commandements virent le jour parce que D.ieu les donna également à Moché au Mont Sinaï.
Nos Sages nous informent également que les Juifs furent exilés parmi les nations pour élever les parcelles de sainteté qui s’y trouvent. Cela se produit en utilisant leurs langues à des fins spirituelles.
Le Midrach nous enseigne que c’est précisément la voix de la Torah qui est descendue et a revêtu les langues des nations pour qu’elles soient utilisées pour la Torah. C’est ainsi que la « voix » des nations devient la voix de la Torah.
« Ano’hi (Je) », le premier mot des Dix Commandements est un acronyme, nous dit le Talmud, de la déclaration Divine ; « J’ai écrit et placé [dans la Torah] Mon âme et Mon essence elles-mêmes. »
L’on pourrait faire l’erreur de penser que cela ne s’applique qu’aux Dix commandements alors que les parties de la Torah qui ont été révélées plus tard, et tout particulièrement celles qui l’ont été par les Prophètes ou les Sages des générations suivantes, n’ont pas la même importance spirituelle.
C’est pour cela que le Midrach nous dit que la voix qui a donné la Torah ne cesse jamais, elle continue dans la voix des Prophètes et des Sages de la Torah. Car chaque aspect doit être révélé à un moment propice et par le biais de la personne propice.
La Révélation qui accompagna le Don de la Torah pénétra toute la création si bien qu’à propos de la « voix » qu’utilisa D.ieu pour donner la Torah, il est déclaré : « Le son de D.ieu donnant la Torah parvint des quatre directions, tout comme d’en haut et d’en bas. » Plus encore, le son pénétra même la matière inanimée.
Le Midrach ajoute donc que la voix ne faisait pas d’écho. Car l’écho provient du fait que les ondes sonores ne sont pas absorbées par un objet et rebondissent. Puisque le son de D.ieu donnant la Torah pénétra toute la terre, il était impossible qu’elle soit renvoyée par écho.
Cela est dû au fait que, comme l’indique le mot « Ano’hi », D.ieu révéla Sa quintessence essentielle en donnant les Dix commandements, tout comme Il imprégna la Torah de Son essence. Puisque D.ieu est l’entité unique, réellement infinie, il s’en suit qu’au moment de la Révélation sinaïtique, rien ne fut imperméable à cette Révélation qui pénétra la matière brute.
Un écho, symbole de quelque chose qui aurait été rejeté ou impénétrable par la voix de la Torah, était littéralement inconcevable.
Que fait-on à Chavouot ?
On a coutume de se couper les cheveux la veille de Chavouot, donc cette année le vendredi 3 juin 2022.
Dans de nombreuses communautés, on a la coutume de décorer la synagogue et sa maison avec des fleurs, en souvenir du don de la Torah, quand le désert et le mont Sinaï se sont couverts de fleurs.
Vendredi 3 juin 2022, on allumera avant 21h 29 (en Ile-de-France) une bougie de quarante-huit heures (ou mieux : soixante-douze heures) pour pouvoir aussi allumer les bougies du dimanche soir. Puis les femmes allumeront les deux bougies de Chabbat (les jeunes filles et les petites filles allumeront une bougie), en récitant la bénédiction :
« Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Lehadlik Nèr Chèl Chabbat Kodech » - (« Béni sois-Tu Eternel, notre D.ieu, Roi du monde, qui nous as sanctifiés par Ses commandements et nous as ordonné d’allumer les bougies du saint Chabbat ».
Samedi 4 juin 2022, après 22h 53, les femmes, les jeunes filles et les petites filles allumeront leurs bougies de la fête à partir de la bougie de 48 ou 72 heures allumée la veille du Chabbat et réciteront les bénédictions :
1) « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Achère Kidéchanou Bémitsvotav Vetsivanou Lehadlik Nèr Chèl Yom Tov » - (« Béni sois-Tu Eternel, notre D.ieu, Roi du monde, qui nous as sanctifiés par Ses commandements et nous as ordonné d’allumer les bougies du jour de fête ».
2) « Barou’h Ata Ado-naï Elo-hénou Mélè’h Haolam Chéhé’héyanou Vekiyemanou Vehiguianou Lizmane Hazé » - (« Béni sois-Tu Eternel, notre D.ieu, Roi du monde, qui nous as fait vivre, exister et qui nous as fait parvenir à ce moment »).
(La bénédiction de la Havdala sera incluse dans le Kiddouch du repas de fête : on se contentera de regarder les bougies allumées (sans les bouger) pendant qu’on récite la bénédiction : « Boré Meoré Haèch ». On ne récitera pas la bénédiction « Boré Miné Bessamim » sur les épices).
Il est de coutume de veiller la première nuit de Chavouot et de lire le Tikoun de Chavouot, cette année la nuit du samedi 4 au dimanche 5 juin 2022.
Tous, hommes, femmes et enfants, même les nourrissons, se rendront à la synagogue dimanche matin 5 juin 2022 pour écouter la lecture des Dix commandements. On marque ainsi l’unité du Peuple juif autour de la Torah, et on renouvelle l’engagement d’observer ses préceptes.
On a l’habitude de prendre un repas lacté avant le vrai repas de viande le dimanche midi.
Dimanche 5 juin, après 22h 49, les femmes, jeunes filles et petites filles allumeront leurs bougies à partir de la bougie de 48 ou 72 heures et prononceront les mêmes bénédictions que la veille.
Lundi matin 6 juin 2022, on récite, pendant l’office du matin, la prière de Yizkor en souvenir des disparus : on donnera de l’argent à la Tsedaka pour leur mérite après la fête.
La fête se termine lundi soir 6 juin 2022 après 22h 55 (en Ile-de-France) et l’on récite la prière de la Havdala (sans bougie et sans épices).
Rappelons qu’on ne récite pas la prière de Ta’hanoun (supplications) depuis Roch ‘Hodech Sivan (mardi 31 mai) jusqu’au samedi 12 Sivan (11 juin 2022).
L’apprenti-tailleur
(Chavouot est l’anniversaire du décès de Rabbi Israël Baal Chem Tov.)
Deux ‘Hassidim étaient en route vers Medziboz ou plutôt vers Rabbi Barou’h de Medziboz. L’épaisse forêt cachait presque la lumière du soleil et, de partout, on entendait les cris des bêtes sauvages, nombreuses dans cette région.
Soudain, un des ‘Hassidim aperçut une bougie allumée au loin. C’était étrange et, malgré leur fatigue et leur hâte d’arriver auprès de leur Rabbi, ils décidèrent d’aller voir de près de quoi il s’agissait. Ils découvrirent alors, à leur grande surprise, un tombeau sur lequel une bougie brûlait apparemment sans se consumer. Sur la pierre tombale étaient gravés les mots : « Ici repose Moché fils d’Amram qui lutta contre son penchant encore davantage que Yossef Hatsadik » !
Cette tombe au milieu de la forêt avec cette étrange épitaphe les intrigua. Ils récitèrent quelques chapitres de Tehilim (Psaumes) pour l’élévation de l’âme du défunt et délimitèrent des signes pour retrouver cette tombe par la suite. En arrivant à Medziboz, ils racontèrent cela à leur Rabbi qui demanda à visiter lui-même cette tombe.
En arrivant à l’endroit signalé, Rabbi Barou’h fut lui aussi très étonné et décida d’enquêter dans les villages alentours, peut-être un paysan local aurait-il pu expliquer de qui il s’agissait. Avec ses ‘Hassidim, il interrogea les passants mais personne n’avait jamais entendu parler de ce Moché fils d’Amram enterré, solitaire, au milieu de la forêt.
Finalement, quelqu’un leur suggéra d’aller se renseigner auprès d’un très vieil homme dans un des villages, peut-être se souviendrait-il de cet épisode. Rabbi Barou’h et ses ‘Hassidim trouvèrent la maison du vieil homme, un non-juif alité, visiblement faible et gravement malade.
Quand celui-ci aperçut Rabbi Barou’h, il tenta de se redresser en toussant : « N’est-ce pas que vous êtes le petit-fils de Yisrolik ? (C’est ainsi que les gens appelaient Rabbi Israël ben Eliézer, surnommé le saint Rabbi Baal Chem Tov). Pourquoi êtes-vous venu ici ? »
Surpris d’être ainsi reconnu par ce non-juif, Rabbi Barou’h lui demanda s’il pouvait lui expliquer le mystère de cette tombe perdue au milieu de la forêt.
- Oui, bien sûr ! C’était il y a très longtemps. Dans notre village, habitait un riche seigneur qui avait l’habitude de faire coudre ses costumes chez un tailleur juif du village de Medziboz. Quand il avait beaucoup de travail à faire exécuter, il demandait au tailleur de lui envoyer son apprenti, Moché, qui restait un ou deux jours chez lui pour procéder à toutes les réparations.
Cet homme riche avait une fille qui ne trouvait pas à se marier. Or, Moché était d’aspect agréable et son caractère plaisait beaucoup au propriétaire et à son épouse qui décidèrent de le prendre pour gendre. Quand Moché arriva, comme d’habitude, pour passer deux jours chez eux, ils lui proposèrent d’épouser leur fille.
Moché refusa fermement d’en entendre parler : « Je suis juif et je ne peux pas épouser une femme qui ne l’est pas ! ». Déçu, le riche propriétaire ne s’avoua pas vaincu et tenta de persuader Moché qu’en épousant leur fille, il serait riche pour le reste de sa vie et n’aurait plus à travailler dur pour gagner sa vie, il n’aurait plus à craindre les pogromes, il serait accepté dans les réceptions de la noblesse locale… Mais Moché restait déterminé.
Le propriétaire n’avait pas l’habitude qu’on lui résiste ainsi et se mit en colère. Il fit emprisonner le jeune homme en lui « conseillant » de bien réfléchir. Mais pour Moché, il n’y avait absolument rien à réfléchir, c’était non. La jeune fille en éprouva une terrible déception, refusa de s’alimenter et de sortir. Un jour, les parents entrèrent dans sa chambre mais elle était morte de chagrin. Ils déversèrent leur peine et leur colère sur Moché qu’ils accusèrent d’avoir causé sa mort.
Furieux, le propriétaire fomenta un plan cruel : « Ton châtiment sera de la rejoindre dans la mort ! ». Il appela quelques brigands qui s’acharnèrent sur Moché puis jetèrent sa dépouille dans le tombeau de la jeune fille !
Entretemps, le tailleur s’inquiéta de l’absence prolongée de son apprenti. Interrogé, le propriétaire affirma que Moché avait achevé son travail, qu’il avait été payé et était reparti. Le tailleur crut à son alibi et le mystère demeura complet.
A cette époque, continua le vieil homme malade, j’étais un jeune berger et il m’arrivait de dormir dans les pâturages. Une nuit, votre grand-père, Yisrolik me réveilla et me demanda de l’accompagner. Il m’a guidé vers le cimetière et, ensemble, nous avons extrait la dépouille de Moché. Je l’ai portée jusqu’à la forêt et, là, nous l’avons enterré. Yisrolik me promit alors que, grâce à la bonne action que j’avais accomplie avec lui, je vivrais très vieux. Il m’a aussi annoncé qu’un jour, son petit-fils (qu’il me décrivit en détails et c’est pour cela que je vous ai tout de suite reconnu) viendrait et je devrais lui raconter l’histoire de Moché, l’apprenti tailleur, avant de quitter ce monde ! ».
Le vieil homme soupira et poussa son dernier souffle. Il avait accompli la mission que lui avait confiée le Baal Chem Tov.
Levi Shaikevitz
Si’hat Hachavoua N° 1455
Traduit par Feiga Lubecki