Comme d’habitude ?
L’homme s’est toujours posé la question du sens des choses. Question essentielle : ne concentre-t-elle pas toute l’interrogation sur sa place dans ce monde ? Il est vrai que, alors que les jours succèdent inlassablement aux nuits, que la vie quotidienne donne à chacun des réflexes quasi mécaniques, cette interrogation-là se fait lancinante. Ne sommes-nous pas conduits, par la pesanteur de notre environnement, par l’extrême formalisation de nos modes de vie, à reproduire plus qu’à imaginer, à faire les gestes et les actes toujours attendus en omettant de réfléchir à leur opportunité, leur pertinence ou, plus fondamentalement, leur légitimité. Tous les langages humains ont trouvé une expression merveilleuse pour désigner, et sans doute justifier, une telle manière de vivre. «Comme d’habitude» entend-on ainsi affirmer avec l’assurance de qui n’a rien à prouver. «Comme d’habitude» et tout est dit, nul besoin de préciser. La répétition d’une action, née on ne sait comment ni pourquoi, suffit donc à démontrer la nécessité de son existence et surtout de sa poursuite. Il n’y a, dès lors, jamais rien de nouveau ; tout est, décidément, affaire «d’habitude»…
C’est ainsi que, peu à peu, en viennent à se dessécher les actes les meilleurs. Tels des fleurs trop longtemps conservées, ils ont gardé les traces du temps de leur vivacité mais ont perdu ce qui les rendait si précieux : le frémissement d’une vie toujours en devenir. C’est ainsi que le sens se perd. Si tout est immuablement figé par l’habitude, si la vie avance sur un chemin irrémédiablement tracé par elle, où donc est la place de l’homme et à quoi servent ses efforts et ses aspirations ? Que peut-il subsister de l’espoir sans lequel aucun lendemain ne chantera jamais ? Enfermé dans la prison d’absurdité qu’il s’est lui-même construite, pris dans les filets de ses habitudes, l’homme ressent plus ou moins consciemment comme sa liberté n’est plus qu’un concept dénué de substance et, par conséquent, de portée.
Cependant tout homme possède une puissance infinie. Chacun peut décider de considérer lui-même et le monde d’un œil neuf. Mieux encore, chacun peut faire du monde un endroit éternellement neuf. En laissant l’habitude en arrière, en sachant que chaque chose rencontrée, chaque événement, chaque décision sont des éléments radicalement nouveaux parce que nous les faisons tels, nous pouvons leur donner un sens. Nous faisons ainsi que le monde avance dans une direction que nous lui choisissons. Brisant les chaines qu’une certaine conception de la vie voudrait nous imposer, nous pouvons construire des nouveaux édifices. Les actes ne s’expliquent alors plus par leurs précédents mais en tant qu’ils portent en eux un autre avenir. L’homme est enfin libre, de cette liberté qui inaugure les temps nouveaux, ceux de la Délivrance.
Elie l’annonciateur
Les prophètes ont annoncé que la venue de Machia’h sera précédée de celle du prophète Elie. C’est ainsi que nous lisons (Malachie 3:23) : “Voici que Je vous envoie Elie le prophète avant que vienne le jour de D.ieu grand et redoutable”. Une question se pose : quel est le rapport particulier entre Elie et cet événement ? Pourquoi est-ce précisément lui qui a été chargé de ce rôle d’annonciateur ?
On sait que le prophète Elie, selon le texte biblique, lorsque vint le moment de sa mort, quitta ce monde avec son corps. Les commentateurs expliquent ce prodige : Elie s’était tant spiritualisé au cours de sa vie physique que son corps pouvait entrer avec lui dans le domaine du spirituel. C’est précisément là le lien avec le temps de Machia’h. Dans cette nouvelle époque, le monde sera parvenu au plus haut de la spiritualisation et du raffinement au point que (Isaïe 40 :5) “toute chair verra que la bouche de D.ieu a parlé”. C’est ce niveau infini qu’Elie incarnait déjà en son temps.
(d’après Likouteï Si’hot, vol. II, p.610) H.N.
Beaalote’ha : Un chemin de lumière
Le but de l’éducation
Dans un verset unique, «éduque un enfant selon sa voie ; même quand il grandira, il ne la quittera pas», le roi Chlomo révèle plusieurs concepts fondamentaux concernant l’approche de la Torah concernant l’éducation.
Le but de l’éducation n’est pas simplement de transmettre des informations mais de modeler le caractère de l’élève (ou de l’enfant), de lui faire prendre un chemin qu’il pourra suivre sa vie entière.
Chaque enfant va emprunter «une voie», car la vie ne permet pas de rester immobile, dont les différentes étapes construisent une route. L’éducation doit préparer l’enfant à ces transitions pour ne pas qu’il soit pris par surprise. C’est là le but de l’éducation : lui donner une base de valeurs et de principes qui lui enseigneront comment envisager l’avenir, comment faire face et surmonter les défis de la vie.
Plus encore, ces principes éducatifs doivent être plus que des vérités intellectuelles ; ils doivent faire partie intégrante de la formation de l’enfant. C’est là le cœur de l’expérience éducative : intérioriser des idées et les intégrer, au lieu de simplement les comprendre abstraitement.
Quand un enfant reçoit une telle éducation, il est préparé à se mettre en route. Non seulement il possède alors un but, une direction et une force intérieure pour faire face aux défis mais il peut avoir l’initiative de les rechercher. Car la connaissance donne de la force et de l’énergie. Quand un enfant a appris des principes et des valeurs qui sonnent juste, il sentira une énergie naître en lui et il recherchera naturellement à l’exprimer dans des expériences de vie positives.
Encourager l’individualité
Capitale dans ce processus est la prise de conscience que chaque enfant possède «sa voie», sa propre nature. Comme le disait Rabbi Yossef Its’hak, le précédent Rabbi de Loubavitch, «chaque Juif possède individuellement une mission dans sa vie». Bien que nous partagions tous le but commun de transformer le monde en une résidence pour D.ieu, chacun d’entre nous possède des talents et des tendances individuels. Leur expression permet au but divin de se manifester dans des chemins différents, leur donnant ainsi une portée plus complète.
C’est la raison pour laquelle, un maître ne doit pas essayer de pousser tous ses élèves dans la même direction. Il faut plutôt qu’il apprécie les dons de chaque individu et cultive leur expression. Même lorsqu’on enseigne les vérités universelles de la Torah, le but ne doit pas être la conformité. Au contraire, il faut essayer de faire pénétrer, en chacun, ces vérités selon sa propre nature.
Des lampes étincelantes
La Sidra de cette semaine évoque ces idées. Elle commence par le commandement donné à Aharon d’allumer la Menorah dans le Sanctuaire. La Menorah symbolise le Peuple Juif, car le but de l’existence de chaque Juif est de disséminer la lumière divine dans le monde : «l’âme de l’homme est la lampe de D.ieu». Avec «la lumière de la Torah et la bougie des Mitsvot» notre peuple illumine le monde.
La Menorah s’élevait en sept branches qui représentent sept approches dans le service divin. Et pourtant elle était faite d’un bloc d’or unique, ce qui indique que les qualités différentes de chacun des membres du Peuple Juif ne le coupent pas de son unité fondamentale. La diversité ne mène pas à la division et le développement d’une véritable unité vient de la synthèse d’élans divers, chacun exprimant ses propres talents et sa propre personnalité.
Des efforts indépendants
Dans la transmission de l’ordre de D.ieu à Aharon d’allumer la Menorah, la Torah utilise l’expression : behaaloté’ha ète hanérote, ce qui signifie littéralement «quand tu feras monter les flammes». Rachi explique que cela signifie que le prêtre devait appliquer la flamme à la mèche «jusqu’à ce que la flamme s’élève toute seule» et brille d’elle-même.
Chacune des expressions citées exprime un concept fondamental.
«La flamme» : chaque personne est potentiellement «une lampe». Mais la flamme réalise ce potentiel, produisant une lumière qui irradie.
«S’élève» : Il ne faudrait pas nous satisfaire de notre niveau présent, quelque raffiné qu’il soit. Il faudrait plutôt chercher sans cesse à progresser, à atteindre un niveau plus élevé dans le service divin.
«D’elle-même» : Il nous faut intérioriser l’influence de nos maîtres jusqu’à faire nôtre leur lumière. La connaissance acquise doit permettre de «briller» de manière autonome.
Bien plus, il nous faut nous «élever tout seuls», c'est-à-dire que le désir de progresser devienne notre propre nature, même sans y être encouragé par autrui.
De la même façon, quand on enseigne, il faut avoir pour but que les élèves deviennent eux-mêmes «une flamme qui s’élève toute seule», une lampe indépendante qui répand la «lumière de la Torah» dans son environnement.
Aller de l’avant
Beaalote’ha ne constitue pas seulement le commencement de la Paracha mais c’est aussi son nom. C’est dire que les leçons que ce titre communique s’appliquent à la Paracha dans son intégralité et notamment à sa majeure partie qui décrit les préparatifs et les étapes initiales du voyage du Peuple Juif dans le désert. Le Baal Chem Tov explique que ces voyages reflètent celui qu’entreprend chaque individu dans la vie.
Le Peuple Juif ne resta pas au Mont Sinaï où il avait reçu la Torah et construit le Sanctuaire. Il prit avec lui la Torah et le Sanctuaire et se mit en voyage à travers le désert du monde. Par le même biais, allumer la lumière dans l’âme de l’homme, but de son éducation, doit lui permettre de prendre «sa lumière de la Torah» dans ses itinéraires à travers le monde. En répandant la lumière de la Torah au cours de son périple de la vie, chaque individu contribue à accomplir le but de l’existence, établir une demeure pour D.ieu dans le monde matériel.
Dans cette veine, les voyages du Peuple Juif dans le désert peuvent aussi s’interpréter comme une allusion aux voyages de notre peuple à travers les âges, mu par la réalisation de sa mission, la révélation de la lumière de Machia’h. C’est ainsi que nous serons réunis dans la construction du Beth Hamikdach où nous verrons à nouveau les prêtres allumer la Menorah.
Quelques lois sur le vol :
- Un employé doit veiller à ne pas gaspiller son temps quand il se trouve au travail. Les autres personnes doivent aussi éviter de lui causer de perdre du temps, par exemple avec des coups de téléphone intempestifs.
- On ne doit pas copier des programmes informatiques normalement en vente ; à plus forte raison, on ne peut ni les racheter ni les revendre.
- Celui qui a volé un objet doit le rendre dans le même état. S’il se contente de le rembourser, il n’a pas accompli son obligation, sauf si l’objet n’existe plus (a été volé ou endommagé). Si le propriétaire de l’objet est mort, on doit le rendre (ou le rembourser) aux héritiers.
- On ne doit pas lire le courrier adressé à quelqu’un d’autre.
- On ne doit pas faire du bruit aux heures normalement consacrées au sommeil afin de ne pas voler le sommeil des autres.
- On ne doit pas se pousser pour prendre une place devant quand les gens font la queue ou pour avoir une place assise dans un bus.
- Un employé doit se nourrir correctement et dormir suffisamment afin d’être opérationnel dans son travail par la suite.
F. L. (d’après Kosher Money – Rav Yoel Schwartz)
Non ! Non ?
- Excusez-moi, voudriez-vous mettre les Téfilines ?
- Non !
Rav Nissan Dubov avait une longue expérience. Combien de fois avait-il posé cette question ! Mais jamais on ne lui avait répondu avec autant de hargne, de colère même. Cette réponse «désagréable» l’avait déstabilisé.
«Bien sûr, ce n’était pas la première fois qu’on refusait ma proposition de mettre les Téfilines mais jamais je n’avais rencontré une réaction aussi sèche, aussi hostile. Cela me peina profondément. Peut-être n’avais-je pas été assez courtois ? Pas assez sympathique ? Peut-être l’avais-je offensé ? Quoi qu’il en soit, il me fallut du temps pour m’en remettre».
Rav Dubov continua ses incursions depuis Brooklyn à Manhattan à bord de ces camions appelés «Mitsva Tank», spécialement aménagés par les jeunes ‘Hassidim de Loubavitch afin d’aider les Juifs rencontrés dans la rue à mettre les Téfilines. Il n’avait pas d’emploi du temps fixe ni de trajet déterminé, il sautait juste dans le premier «Mitsva Tank» en partance.
Trois mois plus tard, un vendredi après-midi, il se retrouva «par hasard» avec la même «équipe» et sur le même trajet que la fois où il avait été si mal accueilli.
Des milliers de personnes arpentent les trottoirs de la cinquième Avenue mais Rav Dubov le reconnut immédiatement. De fait, il avait presque oublié l’incident même s’il lui restait un arrière-goût amer. Instinctivement, il voulut traverser la rue pour éviter de croiser à nouveau cet individu désagréable. Mais celui-ci l’avait déjà aperçu et se frayait la voie jusqu’à lui, certainement pour argumenter à nouveau.
Rav Dubov décida d’affronter la situation.
- Je vous ai cherché ! commença l’autre.
- Allons bon ! pensa Rav Dubov, s’efforçant de paraître neutre.
- Oui ! Je voulais vous remercier !
- Me remercier ? Je croyais que…
- Voyez-vous, je viens d’une famille orthodoxe, j’ai fêté ma Bar Mitsva et j’ai continué pendant un certain temps à mettre les Téfilines chaque jour. Mais depuis que je suis entré à l’Université, j’ai progressivement diminué ma pratique religieuse. Quand vous m’avez abordé l’autre jour, je savais exactement qui vous étiez – un Loubavitch – et ce que vous désiriez de moi – simplement que je mette les Téfilines encore une fois. Bien que vous ne m’ayez pas parlé sur un ton amical, votre question a raisonné clairement dans mes oreilles, dans mon cœur, dans ma conscience. C’est alors que je réalisai combien je m’étais éloigné de la tradition et, à ce moment-là, ma réaction s’est dirigé contre vous, comme pour me justifier.
Mais après cet épisode, j’ai résolu fermement de me reprendre en main, de remettre les Téfilines chaque jour et c’est ce que je fais depuis. Je n’ai pas raté un seul jour de semaine. Je vous dois d’une part mes excuses pour mon accès de colère et d’autre part toute ma gratitude pour m’avoir rappelé à mes obligations religieuses !
Cet incident m’a beaucoup touché, raconte Rav Dubov. Et j’ai remercié D.ieu de m’avoir donné un aperçu de Sa Providence Divine. Si je n’avais pas rencontré cet homme à nouveau, j’aurais continué à m’en vouloir d’avoir offensé quelqu’un !
Malka Touger
traduite par Feiga Lubecki