Question de sens
Au lendemain de la fête de Chavouot, du Don de la Torah, il nous faut regarder autour de nous avec une profondeur nouvelle. De fait, le monde a changé dans son essence. Pourrait-il en être autrement lorsqu’on sait que vient à peine de passer le jour où D.ieu S’est révélé à Sa création, lui faisant le cadeau infini de Sa sagesse ? Et pourtant, voici que, bien vite et avec une efficacité redoutable, la routine quotidienne a repris sa pleine place. Voici donc que tout notre environnement, notre cadre de vie, peut paraître strictement identique à ce que nous avons (toujours ?) connu. C’est bien en un tel instant que des mots comme « profondeur », « intensité » cessent d’être vains. Ils sont maintenant d’autant plus nécessaires que notre monde a, plus que jamais, besoin de sens. Et c’est notre regard qu’ils doivent qualifier. Car une existence humaine est-elle réellement possible sans qu’elle soit pénétrée de signification ? Si les actions des hommes ne servent à rien d’autre qu’à satisfaire les désirs éphémères – et souvent sans portée – des jours qui passent, quel peut être le fondement de la vie ? Si la morale collective n’a plus pour objet que de se conformer avec souplesse aux demandes diverses du corps social, sans interrogation prolongée sur leurs motivations et leurs conséquences, que reste-t-il du soutien de la conscience et de sa puissance civilisatrice ? On s’interroge ainsi sur la disparition des esprits de valeurs pourtant fondatrices, sur le déferlement de violence qui frappe des sociétés avancées. Et on appelle souvent, à leur chevet, sociologues, psychologues et pédagogues. Peut-être est-ce d’abord justement une question de sens… Mais, devant des problématiques d’ordre si général, il est légitime que l’on se sente bien démuni. Chacun est-il plus qu’un être humain parmi tant d’autres ? Quelle puissance pourrait-il détenir qui lui permettrait de se pencher utilement sur ces questions ? C’est justement ici que le Don de la Torah intervient. Voici qu’il nous a livré la clé des choses ; il nous a montré avec force le sens recherché. Ainsi, il nous a dit que nous sommes les acteurs et non les sujets de notre temps. Mais il a fait également bien plus : il nous a donné les moyens d’agir. Par la vie à éternelle hauteur d’homme, par la compréhension de la Sagesse qui nous a alors été révélée, par la fidélité à ce qui nous a été ainsi confié, c’est enfin au sens que nous redonnons voix.
Haim Nisenbaum
Le cerveau et le cœur
Il est souvent expliqué que l’exil présente un certain nombre d’aspects positifs : il est «une chute pour permettre une élévation supérieure», il manifeste «la supériorité de la lumière qui provient de l’obscurité» etc. Toutefois, toutes ces explications s’adressent au cerveau. Pour les sentiments du cœur, l’amertume de l’exil les rend toutes inacceptables. C’est pourquoi, bien que ces explications aient été données et comprises, le peuple juif ne cesse de demander que l’exil se termine enfin et que la Délivrance arrive. (d’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch – Chabbat Parchat Nitsavim 5741) H.N.
Beaalote’ha : Un guide pour allumer les lumières
Nos Sages nous disent que dans le Saint Temple de Jérusalem et son précurseur, le Tabernacle construit par Moché dans le désert, était présent un modèle en trois dimensions de l’architecture spirituelle de l’âme. Le Temple consistait en de nombreux domaines, chambres et «récipients», correspondant chacun à un élément différent de la vie intérieure de l’homme et illustrant sa fonction et son but. La Menorah, candélabre d’or à sept branches, allumé chaque après-midi dans le Saint Temple, représente le potentiel humain d’ «allumer des lampes» : de générer des sources de lumière en son for intérieur, en son prochain et dans les ressources matérielles dont il dispose. La Torah consacre un certain nombre de chapitres détaillés à la description de la construction de la Menorah et aux différentes lois édictant la manière de l’allumer. Chacun de ces détails comporte une règle et une leçon lui correspondant dans la signification spirituelle de la Menorah. Pour en observer un exemple, examinons un passage de l’un des commentaires de ces chapitres. Le huitième chapitre de Bamidbar s’ouvre par l’instruction de D.ieu à Aharon : « Quand tu élèveras les lampes, elles jetteront leur lumière en direction de la face de la Menorah». Dans son commentaire, Rachi s’étend sur l’utilisation du terme Beaalote’ha : «quand tu feras monter». Pourquoi la Torah utilise-t-elle ce curieux synonyme d’ «allumer» ? Rachi explique que la Torah préfère se référer à la nature de la flamme qui est de graviter vers le haut et de s’élever et qu’elle a également pour but d’instruire le Cohen (prêtre), qui allume les lampes de la Menorah, de maintenir le feu sur la mèche jusqu’à ce que «la flamme s’élève d’elle-même». Ces trois mots Chalhévèt Olah Méhéléha («la flamme s’élève d’elle-même») renferment les leçons essentielles, dérivées de la Menorah. On se réfère habituellement aux lumières de la Menorah comme à ses Nérot, ses «lampes». Le terme Nérot peut s’appliquer à la fois à des lampes allumées et à des lampes éteintes. Mais le mot Chalhévèt implique une flamme «vivante», produisant de la lumière. En fait, chaque jour, pendant plusieurs heures, les lumières de la Menorah n’étaient pas allumées. Chaque matin, elles étaient nettoyées, remplies de la plus pure des huiles d’olive et pourvues de mèches nouvelles. Elles restaient ainsi la plus grande partie de la journée, attendant que le Cohen, porteur de la flamme, vienne les allumer dans le milieu de l’après-midi. Pendant ces heures intermédiaires, la lampe reposait dans un statut des plus complets et parfaits, ses mèches toutes fraîches et remplies à capacité de la meilleure des huiles. Rien n’y manquait. En fait, l’allumer ne ferait que ternir son lustre, consumer ses mèches et user son combustible. Mais dans son statut éteint, la lampe était obscure, son potentiel de lumière enfermé. Il se peut qu’elle fût parfaite en elle-même mais elle n’apportait rien à tout ce qui existait en dehors d’elle-même. L’homme, également, peut être un Ner sans Chalhévèt, une lumière sans flamme. Il peut parvenir à un état de perfection personnelle, un récipient ornementé, empli de talents et de potentiels abondants. Mais le but de la vie est d’être une lampe qui éclaire, de faire briller ses propres talents et ses aptitudes pour illuminer l’environnement. C’est là la première leçon de la Menorah : le but exclusif de la perfection personnelle ne suffira jamais à satisfaire les aspirations profondes de l’âme qui sont d’être «une flamme» qui apporte la lumière autour d’elle. S’élever «L’esprit de l’homme monte». Alors que l’espace que nous habitons possède trois dimensions et six directions, nos aspirations les plus profondes vont vers le haut. Quand des enfants se comparent, pour savoir qui est le plus grand, il s’agit de leur hauteur. Quand des hommes et des femmes parlent de leur désir de progrès personnel, ils le font en termes de «monter l’échelle», «atteindre le sommet» ou «s’élever à de nouvelles hauteurs». C’est ainsi que le roi Salomon décrit l’âme de l’homme comme une «lampe de D.ieu». Parmi les quatre éléments (le feu, l’eau, l’air et la terre), seul le feu monte vers le haut. Tout comme une flamme cherche toujours à se détacher de son attache, l’âme humaine est sans cesse attirée vers le haut, tentant de se détacher de la mèche (c’est-à-dire le corps humain) qui la retient en bas. Quel est le sens profond de cette aspiration «verticale» ? Certains accomplissements peuvent se définir en termes de croissance, en longueur ou en largeur. Il se peut que nous dépensions beaucoup d’efforts pour élargir ou agrandir nos accomplissements, mais tous dans la même dimension, le long des lignes qui définissent notre réalité présente. Mais l’esprit de l’homme aspire à plus. La «lampe de D.ieu» à l’intérieur de nous-mêmes ne nous permet pas de nous réconcilier avec la réalité présente, que ce soit une réalité limitée par l’habitude et les conventions ou même par les dictats les plus élémentaires de notre nature. Intrinsèques à la condition humaine sont la quête de la transcendance, le désir de «briser le moule» dans lequel nous avons été formés et nous remodeler en quelque chose de plus «haut» que ce que nous sommes. C’est là la seconde leçon de la Menorah : la vie n’est pas seulement une «flamme» mais une flamme qui «s’élève». Quels que soient nos gains dans l’espace que nous avons façonné pour nous-mêmes dans ce monde, nous devons constamment rechercher de nouveaux domaines d’accomplissements. La perfection personnelle n’est pas suffisante, pas plus que le fait d’être un «dirigeant» qui apporte la lumière dans quelque domaine que ce soit. Notre essence «la lampe de D.ieu demande que nous nous renouvelions perpétuellement, que constamment nous aspirions à briser notre statut présent pour atteindre quelque chose de plus «élevé». D’elle-même Une lampe ne peut s’allumer toute seule : elle a besoin d’un feu, d’une source d’énergie extérieure qui la fasse briller. Mais l’objectif est que la flamme «s’élève d’elle-même», qu’elle soit transformée en une source de lumière indépendante. Voilà la troisième leçon de la Menorah : quand nous agissons comme «allumeurs de réverbères», que ce soit dans l’entreprise d’allumer nos propres potentiels , d’allumer la «lampe» chez notre prochain ou de créer des luminaires à partir de s matériaux que nous offre notre environnement, notre objectif doit toujours être de générer une flamme qui «s’élèvera» d’elle-même. En termes d’efforts pour nous améliorer nous-mêmes, cela signifie qu’il ne suffit pas de prendre des «résolutions» et par la force de la volonté, de s’imposer sans cesse des changements de comportement. Mais il faut plutôt aspirer à une transformation de notre nature et de notre caractère, de sorte que ce nouveau comportement devienne une manière d’agir naturelle et instinctive. Lorsque l’on enseigne et que l’on tente de guider notre proche, l’objectif devrait être d’en faire quelqu’un qui brillera de façon autonome de sa propre lumière, l’aider à développer ses talents et ses aptitudes de sorte que sa propre lampe resplendisse indépendamment et soit à son tour une source d’illumination. Par exemple, au lieu de nous contenter de parler à nos enfants de l’importance de faire de la charité ou de les impliquer dans nos propres actes de bienfaisance, nous pouvons les aider à être eux-mêmes acteurs, à fabriquer leur propre boîte de Tsedaka qu’ils placeront dans leur chambre. Chaque fois que l’enfant y mettra une petite pièce, cela l’assistera et l’aidera à faire lui-même un acte de charité. Ce petit morceau de plastique ou de bois se trouvera alors transformé en «lampe». Mais cela va plus loin encore. Même quand elle n’est pas utilisée pour un acte de charité, la boîte de Tsedaka constitue elle-même une «lampe» qui illumine son environnement. C’est un objet qui fait immuablement partie du décor de la chambre et elle rappelle constamment à l’enfant sa responsabilité vis-à-vis d’autrui. Un objet matériel est devenu «une flamme qui s’élève d’elle-même», une source indépendante qui guide et illumine.
Qu’est-ce que la «Prière du Voyageur» ?
On prononce la prière du voyageur dès qu’on a quitté la ville et qu’on effectue un trajet de plus de cinq kilomètres en dehors de toute habitation. Si possible, on la récite debout, dès le début du voyage. Si on a oublié, on peut la réciter plus tard, tant qu’on n’est pas parvenu à destination. Il est préférable de réciter une autre bénédiction auparavant, par exemple une bénédiction après manger. Il est conseillé de donner la Tsedaka avant d’entreprendre un voyage. On informe les notables de la communauté avant de partir afin d’obtenir leur bénédiction pour un bon voyage. C’est une grande Mitsva de donner à manger au voyageur pour le chemin ainsi que des pièces à remettre à la Tsedaka à destination : alors le voyageur sera considéré comme un envoyé pour une Mitsva. Il est recommandé d’accompagner celui qui voyage pendant quelques mètres : l’accompagnateur doit rester debout et attendre jusqu’à ce que le voyageur soit hors de sa vue. On emporte toujours de la nourriture avant de partir (même si la compagnie d’aviation est supposée procurer un repas cachère). Si on est obligé de voyager vendredi, on veillera à arriver bien en avance de façon à pouvoir accueillir le Chabbat sereinement. F. L. (d’après Junior Code of Law – Dr. Nissan Mindel)
D’une pierre deux coups...
Il y a quelques mois, nous avons organisé une petite réunion au centre Loubavitch de Midtown Center à Manhattan. Le propriétaire d’un restaurant cachère, le Jérusalem II de Broadway, annonça qu’il serait heureux de participer à la fête et qu’il offrirait plusieurs gâteaux pour la réussite de la réunion. Le vendredi matin, avant de me rendre à mon travail, je décidai de passer par le restaurant afin de rappeler au propriétaire sa promesse de participer à l’organisation le mardi suivant. A peine entrai-je dans le restaurant qu’il m’attrapa par le bras : «Je n’ai pas mis les Téfilines ce matin ! Pouvez-vous m’en procurer une paire aujourd’hui ? Attention ! Je suis gaucher !» (Les gauchers mettent les Téfilines sur le bras droit et les lanières doivent être disposées différemment de ceux des droitiers). Je me précipitai vers un bureau quelques blocs plus loin, bureau dans lequel se réunissent plusieurs hommes d’affaires chaque après-midi pour la prière de Min’ha. Mais il s’avéra qu’aucune paire de Téfilines n’y était disponible. Intérieurement, je m’en voulais de ne pas avoir emporté mes Téfilines ce jour-là, encore qu’il aurait été difficile de les transformer pour qu’elles soient compatibles pour un gaucher. Je téléphonai à plusieurs personnes dans les bureaux avoisinants mais personne n’avait emporté ses Téfilines ! Pas de chance ! En désespoir de cause, je me rendis au Shalom Pizza Shop, au coin de la 37ème rue et de la 6ème Avenue. Je demandai au propriétaire si, par hasard, il possédait une paire de Téfilines de gaucher. - Oui, ils sont en bas au sous-sol ! Qui peut décrire mon soulagement ? Il ne me restait plus qu’à en informer le propriétaire du Jérusalem II. Je repris ma route en sens inverse et informai l’homme que des Téfilines pour gaucher l’attendaient au Shalom Pizza Shop et il me remercia : il m’assura qu’il s’y rendrait le plus rapidement possible. Durant ma pause de midi, je lui téléphonai pour m’assurer qu’il avait pu se libérer pour mettre les Téfilines. Il me répondit que le restaurant était rempli de clients et qu’il lui était absolument impossible de sortir. Je décidai de me rendre moi-même à son restaurant : peut-être pourrais-je m’y rendre utile de façon à le laisser prendre une pause pour qu’il puisse mettre les Téfilines à la pizzeria ? Alors que je courais sur Broadway, j’aperçus un Loubavitch qui portait justement son sac à Téfilines sous le bras. Je l’accostai en toute hâte et lui demandai si – par hasard, bien sûr ! – il était gaucher. - Oui, répondit-il, étonné. Peut-être pouvez-vous m’aider, continua-t-il avant que j’aie pu lui demander ce que j’avais à lui demander, j’arrive de Milan (Italie) et je recherche désespérément un restaurant cachère ! Je meurs de faim ! - C’est incroyable ! Je peux vous rendre service et vous amener à un restaurant cachère mais vous, de votre côté, vous prêterez vos Téfilines au patron du restaurant ! C’est ainsi que j’ai pu faire d’une pierre deux coups : le patron du restaurant gagna un client supplémentaire mais gagna aussi la possibilité de mettre les Téfilines d’un gaucher sans avoir à quitter son travail ! Et l’Italien me remercia abondamment de la chance qu’il avait eue de pouvoir manger un excellent repas ! Tous les trois nous nous sommes souhaité Chabbat Chalom avec de grands sourires, heureux d’avoir fait connaissance les uns et les autres ! Quant à moi, j’étais le plus heureux des trois : merci mon D.ieu de m’avoir donné la possibilité de rendre service à deux Juifs ! M. Gati - L’Chaim N° 1267 Traduit par Feiga Lubecki