Kislev et la joie nouvelle
Lorsqu’un nouveau mois commence, il apporte toujours, avec sa couleur particulière, son lot d’expériences nouvelles. C’est ainsi que le calendrier juif se déroule, faisant se succéder des temps qui se complètent et se soutiennent l’un l’autre jusqu’à former une forme de globalité du service de D.ieu. Le mois qu’il nous est offert de vivre à présent en donne, une fois de plus, la parfaite illustration. C’est celui de Kislev et, après l’éclat du mois des fêtes, Tichri, et la morosité relative du suivant, ‘Hechvan, il apporte une chaleur et une lumière que chacun ressent même sans savoir les désigner. Pourrait-il en être autrement ? Ce mois est celui de la victoire éternelle de la lumière sur l’obscurité.
Bien sûr, il est celui de ‘Hanoucca, dont la brillance resplendit déjà au loin, et celui du Roch Hachana de la ‘Hassidout, le 19 du mois, qui projette sa puissance jusqu’à nous. Mais ces points de lumière ne se limitent pas aux instants qu’ils animent. Ils traversent la nature même de la période et c’est ce qu’il importe de ressentir au plus profond. De fait, la joie intrinsèque de Kislev est ressentie par chacun. Elle donne sens à tous les jours qui passent et transforme notre manière de considérer les choses. Parce que cette lumière est celle des miracles qui se produisirent en leur temps, elle éclaire jusqu’au nôtre. Parce qu’elle est lumière de victoire, elle illumine notre conscience.
Cela n’est pas un simple rappel des rendez-vous spirituels en cours qu’il ne faut pas manquer. Il s’agit surtout d’être conscient des opportunités nouvelles ouvertes à présent. Car le caractère du mois est une de ces données objectives qui apportent leur contribution aux efforts de l’homme. Temps de lumière et de victoire, le mois de Kislev donne à qui veut s’en saisir la capacité de surmonter les obstacles, d’abattre les barrières qui s’opposent aux avancées harmonieuses et sereines d’une vie de liberté. Lorsque semblent s’élever, en soi-même ou au-dehors, des rumeurs hostiles ou simplement décourageantes, l’enthousiasme de Kislev sait les dissiper. Seules la joie et la confiance ont leur place. Sachons en porter la certitude, toute l’existence peut en être changée.
Le cerveau et le cœur
Il est souvent expliqué que l’exil présente un certain nombre d’aspects positifs : il est « une chute pour permettre une élévation supérieure », il manifeste « la supériorité de la lumière qui provient de l’obscurité » etc. Toutefois, toutes ces explications s’adressent au cerveau. Pour les sentiments du cœur, l’amertume de l’exil les rend toutes inacceptables.
C’est pourquoi, bien que ces explications aient été données et comprises, le peuple juif ne cesse de demander que l’exil se termine enfin et que la Délivrance arrive.
(d’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch – Chabbat Parchat Nitsavim 5741)
Vayichla’h
Après un séjour de vingt ans à ‘Haran, Yaakov revient en Terre sainte. Il envoie des anges émissaires à Essav, dans l’espoir d’une réconciliation mais il s’avère qu’Essav est sur le chemin de la guerre avec quatre cents hommes armés. Yaakov se prépare à la guerre, prie et envoie un cadeau considérable à Essav.
En cette nuit, Yaakov fait traverser la rivière Yabok aux siens mais il reste en arrière et rencontre un ange, représentant l’esprit d’Essav avec lequel il se bat jusqu’à l’aube. Malgré une hanche disloquée, il sort vainqueur du combat et reçoit de l’ange le nom Israël qui signifie « il l’a emporté sur le Divin ».
La rencontre entre les deux frères a lieu, ils s’embrassent mais se séparent. Yaakov s’installe sur un terrain qu’il achète près de Ch’hem. Le prince de cette ville, Ch’hem abuse de Dinah, la fille de Yaakov et ses deux frères, Chimone et Lévi la vengent en tuant tous les hommes de la ville.
Yaakov continue sa route.
Ra’hel meurt en donnant naissance à son second fils, Binyamine. Elle est enterrée au bord de la route, près de Beth Lé’hem.
Réouven perd son droit d’aînesse en commettant une indiscrétion par rapport à la vie intime de son père.
Yaakov arrive à ‘Hévron, chez son père, qui meurt plus tard, à l’âge de 180 ans (Rivka est morte avant le retour de Yaakov).
La Paracha se conclut par le décompte détaillé des femmes, enfants et petits-enfants d’Essav, l’histoire du peuple de Séir au sein duquel s’installe Essav et par la liste des huit rois qui dirigent Edom, la terre des descendants d’Essav et de Séir.
Dans la Paracha Vayichla’h, Yaakov est informé que lui est attribué un nouveau nom. Il ne sera plus appelé Yaakov mais Israël. Cela ressemble à ce qui se produisit avec son grand-père dont le nom Avram avait été transformé par D.ieu en Avraham. La lettre Hé fut ajoutée à son nom de sorte qu’il ne serait plus appelé Avram mais Avraham.
Cependant, il existe une différence fondamentale entre ces deux situations. Une fois qu’Avram fut renommé Avraham, jamais plus, dans la Torah, il ne fut appelé Avram. Et cela va même jusqu’au point où le Talmud conclut des versets que l’on n’a pas le droit de l’appeler Avram au lieu d’Avraham.
Cela n’est pas le cas de Yaakov. En effet, l’on peut observer, par la suite, que bien que désormais il ait reçu pour patronyme Israël, il arrive que la Torah se réfère à lui en le nommant Yaakov.
On peut également observer que dans nos prières quotidiennes, on le nomme parfois Israël et parfois Yaakov.
Les commentateurs nous expliquent la raison d’être de ces deux noms.
La nation juive, Israël, le représente et chaque individu est un descendant d’Israël. Mais chacun possède deux manières différentes de l’imiter, dans son service de D.ieu. L’une fait référence à Yaakov et l’autre à Israël. Etant donné que tous les hommes servent D.ieu des deux façons, les deux noms sont préservés : Yaakov et Israël.
Nous allons donc nous pencher sur ces deux approches.
Examinons, pour les comprendre, la racine du nom Yaakov. L’une des racines de ce mot est Akvah (ou Mirmah ) qui se réfère à la façon « détournée » dont Yaakov revêtit les vêtements de son frère Essav, pour recevoir, de façon « contournée » les bénédictions de son père, Its’hak. Par la suite, il reçut le nom Israël, parce que, comme l’explique Rachi, D.ieu désirait que ce soit lui qui reçoive les bénédictions destinées à Essav et que donc, il ne devait en rien en être gêné, ne devait aucunement s’en cacher. Son nom serait donc désormais Israël qui vient de la racine yachar, « droit ». Ces bénédictions lui revenaient donc à juste titre, de façon droite, et il ne devait pas s’en cacher.
Qu’est-ce que tout cela signifie pour chacun de nous ? Nous devrions servir D.ieu des deux manières et même de celle qui est mensongère, trompeuse ?
Il est bien évident que cela ne doit pas être pris à la lettre et ne signifie pas qu’il faut être malhonnête, à D.ieu ne plaise ! Cela est bien sûr interdit !
Mais il s’agit ici de la manière dont le Juif se confronte au monde matériel. Nous avons divers besoins matériels. Nous mangeons, nous dormons, etc. Nous nous livrons également, comme chaque être humain, à des occupations professionnelles.
Mais quand nous nous y adonnons, nous le faisons, dans un certain sens, de manière « détournée ». Il ne s’agit certainement pas de manquer d’honnêteté dans les affaires mais de les mener avec un projet intérieur différent. Il ne devrait pas être question pour nous d’accéder à la fortune, au succès dans le simple but d’être riches ou de pouvoir manger à satiété, sans plus. Il est plutôt question ici de servir D.ieu, en élevant spirituellement toute cette matérialité que nous rencontrons, de rester forts et en bonne santé pour mieux servir notre Créateur, d’utiliser l’argent que nous gagnons afin d’offrir à nos enfants une éducation qui les maintiendra dans le chemin du Judaïsme et de posséder un foyer où l’on ressent une atmosphère juive.
Si l ‘on parle ici de « tromperie » c’est parce que les valeurs apparentes ne sont pas les réelles. Nous semblons manger, boire, travailler, comme tout le monde, pour les bienfaits matériels que nous en retirons.
Mais en réalité, il y a autre chose, « derrière » ce que nous faisons.
L’on peut, par certains aspects, comparer cette attitude à celle d’un homme qui en trompe un autre. Il fait semblant d’adopter les mêmes idées, les mêmes comportements. Mais au bout du compte, il le trompe et fait l’opposé de ce qu’il prétendait.
De la même façon, nous menons une vie matérielle, nous nous impliquons dans le monde et le corps pense recevoir tout ce qu’il désire, ce qui est un fait. Mais l’intention est toute autre : le bénéfice n’est pas seulement matériel mais aussi spirituel.
C’est en cela que consiste l’attitude de Yaakov : utiliser le monde matériel pour en révéler toute la spiritualité.
Mais un Juif adopte également le comportement d’Israël. Il sert D.ieu ouvertement, visiblement.
Nous pouvons également retrouver cette démarche par rapport à la matérialité.
Contrairement au fait de manger pendant les jours de la semaine, où nous sommes occupés à purifier et élever les étincelles spirituelles enfouies dans la matérialité, le jour du Chabbat ou des fêtes, cette même activité, manger, devient elle-même une Mitsva, un commandement.
Il s’agit alors d’une activité spirituelle dévoilée, au vu de tous. Il s’agit de servir complètement D.ieu à la fois spirituellement et matériellement.
Quand dit-on Tal Oumatar ?
A partir de lundi soir 4 décembre 2017, on ajoute « Tal Oumatar » dans la prière de la Amida.
Cette prière pour « la rosée et la pluie » précise que ceci doit être « Livra’ha », pour la bénédiction.
Celui qui a oublié « Tal Oumatar » et s’en souvient avant d’avoir commencé la bénédiction suivante (« Teka Bechofar ») le rajoute alors. S’il a commencé « Teka Bechofar », il rajoute dans la bénédiction « Choméa Tefila » : « Vetène Tal Oumatar Livra’ha Ki Ata Choméa Tefilat Kol Pé… »
S’il l’a encore oublié mais s’en souvient avant « Retsé », il le dit alors. S’il a commencé Retsé et s’en souvient avant d’avoir reculé de trois pas à la fin de la Amida, il reprend à partir de « Barè’h Alénou » et continue la suite de la Amida. S’il a oublié après avoir reculé de trois pas, il reprend toute la Amida.
Il convient de louer et remercier le Créateur « pour chaque goutte de pluie » bénéfique, en son temps, qui apporte la bénédiction pour les récoltes, en particulier en Erets Israël.
(d’après Séfer Hatodaah)
Bon anniversaire !
Un jour de décembre 1977, le Rabbi de Loubavitch arriva dans la boîte aux lettres de mes parents. Enfin, pas vraiment le Rabbi mais une brochure émanant de son mouvement, avec une invitation à participer à une Peguicha, un Chabbat de rencontre, un vrai Chabbat, à New York. Après tout, pourquoi pas ? Cela me donnerait du matériau pour un prochain reportage. J’avais l’intention de participer incognito à ce Chabbat puis de décrire mon expérience dans un magazine.
- D’où appelez-vous ? me demanda mon interlocuteur quand je téléphonai pour m’inscrire.
- Maplewood, New Jersey.
- Maplewood ? Donc vous connaissez Rav Gordon ?
- Qui ?
- Rav Chalom Ber Gordon, l’émissaire du Rabbi à Maplewood !
- Non, désolée, je n’ai jamais entendu parler de lui.
- Je n’arrive pas à le croire, soupira l’homme au bout du fil.
Comme ma famille fréquentait un temple réformé, il n’y avait aucune chance que mon chemin croise celui de ce Rav Gordon.
Bref, je pris le train et le métro et arrivai vendredi après-midi à Crown Heights alors qu’une première sirène annonçait l’entrée imminente de Chabbat.
- Vous arrivez juste à l’heure, j’allais fermer le bureau ! me dit la jeune fille à l’accueil. Tous les participants ont déjà été dispatchés et je ne sais pas où vous envoyer ! Euh… Je vais tenter un dernier appel… Voilà ! Vous devrez aller chez la famille Groner sur President Street !
J’avais compris que je devais faire vite et ne posais pas de questions quant à mes hôtes. Comment aurais-je pu deviner qu’il s’agissait ni plus ni moins du secrétaire du Rabbi ?
Je m’attendais à être accueillie à la porte par une matrone parée d’une robe de chambre élimée et d’un foulard noir menaçant puisque telle était ma vision d’une maîtresse de maison ‘hassidique. Mais la dame qui m’ouvrit la porte était élégante et distinguée, d’une noblesse d’âme évidente.
- Entrez, c’est bientôt Chabbat, nous allons allumer les bougies ! Voici votre chambre !
C’était une petite chambre avec plusieurs lits. Je cachai subrepticement mon carnet avec le stylo sous le matelas afin de pouvoir noter discrètement mes observations durant Chabbat.
Madame Groner, ses filles et moi-même avons allumé nos bougies avec la bénédiction : heureusement, je connaissais ce rite puisque ma propre mère y était très attachée. La lumière de toutes ces bougies dansait sur les miroirs qui ornaient la salle à manger. Une autre jeune fille, comme moi venue de loin pour cette expérience, m’accompagna au 770 Eastern Parkway, la synagogue qui était absolument bondée.
- Regarde ! Voici le Rabbi !
On me montra un homme à la barbe blanche assis sur un fauteuil rouge bordeaux. Mais j’eus du mal à l’apercevoir vraiment tant il y avait de femmes et filles qui se poussaient pour mieux voir depuis la galerie des dames. Inutile de décrire la foule d’hommes en bas.
De retour chez les Groner, nous nous sommes confortablement assises sur un canapé devant la table si bien mise. Nous avons bavardé en attendant Rav Groner et ses fils. L’heure tournait et mon estomac criait famine !
Finalement, nous avons entendu Rav Groner et ses fils arriver en chantant. Nous avons pris place autour de la table et Rav Groner et ses fils ont entonné le chant traditionnel Chalom Alé’hem pour accueillir les anges du Chabbat. J’avais l’impression que les anges chantaient avec eux, je ressentais tant de paix, de sérénité, d’harmonie et de bonheur… Quelque chose que je n’avais jamais expérimenté bien que j’aie assisté à d’autres repas de Chabbat lors de mes voyages en Europe et en Israël.
La Providence Divine m’avait guidée là où je devais aller, l’endroit qu’il me fallait. Je réalisai qu’ici se trouvaient la lumière et la joie dont j’avais besoin dans ma vie.
Le Chabbat et le week-end se passèrent comme dans un rêve, avec des activités incessantes, des cours, des conférences, des discussions qui durèrent jusque tard dans la nuit samedi soir.
Dans l’excitation, j’avais perdu l’envie d’écrire quoi que ce soit.
De centaines de jeunes filles venues du monde entier, parlant dans toutes les langues possibles, chantaient et dansaient et parlaient… Aucune d’entre nous n’envisageait de « sortir » à Manhattan (je crois que c’était le Nouvel An…). Nous passions un moment tellement formidable !
Inutile de préciser que je n’ai pas touché à mon stylo durant tout Chabbat et que j’ai bien vite abandonné mon projet d’observer tout cela de l’extérieur, comme un reporter. Quelques semaines plus tard, je partis étudier sérieusement le judaïsme au Beth ‘Hanna dans le Minnesota. Durant dix jours, je me rendis à tous les cours, discutais à n’en plus finir avec les autres participantes – surtout à propos du rôle (énorme) de la femme dans le judaïsme.
Un jour je me réveillais et pris la décision de m’impliquer complètement dans ce que j’étudiais : j’allais mettre sérieusement en pratique tout ce que j’entendais, j’allais pratiquer scrupuleusement les Mitsvot au fur et à mesure que je les apprendrais.
Le lendemain j’aperçus des filles dans la bibliothèque qui se penchaient sur un gros volume. De quoi s’agissait-il ? « C’est un calendrier perpétuel, enfin… sur 300 ans, pour pouvoir calculer nos anniversaires juifs » répondirent-elles.
Voilà qui était nouveau, je n’y avais jamais pensé. Après tout, pourquoi ne pas m’y intéresser moi aussi ?
L’avez-vous deviné ?
Le jour précédent, le jour où j’avais décidé d’accepter le joug des Mitsvot, était mon 25ème anniversaire juif !
Elana Bergovoy – Chicago - COLlive
Traduite par Feiga Lubecki