Samedi, 20 novembre 2021

  • Vayislah
  • Vayichla’h
Editorial

 Quand la lumière va naître !

Nous sommes, à présent, à proximité presque immédiate de cette date majeure qu’est le 19 Kislev… Commencer ainsi un éditorial est toujours une aventure : comment dire et donner à ressentir ce qui paraît d’une clarté lumineuse ? C’est que le 19 Kislev renferme un secret prodigieux et qu’il nous appartient, à l’approche de ce jour, d’en découvrir la clé. Certes, c’est là une commémoration ancienne : Rabbi Chnéor Zalman emprisonné par le Tsar dans la vieille Russie et finalement libéré. Pourtant, quelque chose de profondément actuel y résonne et c’est cela qui, aujourd’hui, nous importe plus que toute autre chose.

De fait, il ne saurait être question ici d’un simple souvenir historique même si, s’agissant de Rabbi Chnéor Zalman, auteur du Tanya et fondateur de la ‘Hassidout ‘Habad, cela seul serait déjà suffisant pour motiver une célébration. Mais tout, ici, porte plus loin. C’est bien d’un Roch Hachana qu’il s’agit, celui de la ‘Hassidout, et il ne cède en rien aux autres Roch Hachana de l’année. En effet, qu’est-ce que Roch Hachana sinon, littéralement, la « tête de l’année » ? Qu’est-ce que cette appellation dénote sinon le fait que le jour ainsi désigné contient en lui la force et la vie de l’année comme la tête recèle celle de l’ensemble du corps ? Qu’évoque-t-elle sinon des images de lien renouvelé avec D.ieu, d’enthousiasme redécouvert et de vie retrouvée, plus riche et plus pleine ?

Le 19 Kislev est bien tout cela. Il porte une force nouvelle pour l’étude de la ‘Hassidout et une lumière accrue pour les voies du ‘hassidisme et tout cela nous est bien précieux. Nous le savons : nous vivons en un temps où, plus souvent qu’il ne faudrait, l’obscurité paraît grandir, presque écrasante. Nous vivons en un monde où le spirituel paraît parfois étranger, où seule la vaine poursuite du matériel semble le sort assigné à chacun. Tout se passe comme si nous vivions une de ces longues nuits d’hiver où on peut finir par désespérer de jamais retrouver les premières lueurs du jour. C’est au cœur de cette obscurité-là que jaillit la lumière du 19 Kislev. C’est une lumière puissante, elle sait dissiper toutes les forces de la nuit et fait jaillir, autour d’elle, la conscience du bonheur d’être Juif. Lorsque la célébration revient, comme par nature, elle éclaire donc le cœur et l’âme de chacun. Il ne reste plus qu’à se saisir de ce nouveau pouvoir pour réorienter le sens des choses et toute notre existence par l’étude de la ‘Hassidout et par la vie du ‘hassidisme. A présent, le monde change. Et nous sommes les acteurs de ce changement. Pour le bien et pour de bon.

Etincelles de Machiah

 L’éducation juive et la venue de Machia’h

Décrivant le temps de Machia’h, D.ieu dit (Isaïe 44:3) : « Je déverserai Mon esprit sur ta descendance et Ma bénédiction sur tes générations ». Dès la première lecture du verset, il est clair que sont ici désignés les enfants.

Or, on connaît le principe selon lequel toutes les révélations de ces temps futurs dépendent de nos actions et de notre effort d’aujourd’hui (Tanya chap. 37). C’est dire à quel point l’éducation juive assurée aux enfants est un impératif pour chacun.

(d’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch
 Chabbat Parchat Vayikra 5740)

Vivre avec la Paracha

 Vayichla’h

Après un séjour de vingt ans à ‘Haran, Yaakov revient en Terre Sainte. Il envoie des anges émissaires à Essav, dans l’espoir d’une réconciliation mais il s’avère qu’Essav est sur le chemin de la guerre avec quatre cents hommes armés. Yaakov se prépare à la guerre, prie et envoie un cadeau considérable à Essav.

En cette nuit, Yaakov fait traverser la rivière Yabok aux siens mais il reste en arrière et rencontre un ange, représentant l’esprit d’Essav avec lequel il se bat jusqu’à l’aube. Malgré une hanche disloquée, il sort vainqueur du combat et reçoit de l’ange le nom Israël qui signifie « il l’a emporté sur le Divin ».

La rencontre entre les deux frères a lieu, ils s’embrassent mais se séparent. Yaakov s’installe sur un terrain qu’il achète près de Che’hem. Le prince de cette ville, Che’hem abuse de Dinah, la fille de Yaakov et ses deux frères, Chimone et Lévi la vengent en tuant tous les hommes de la ville.

Yaakov continue sa route.

Ra’hel meurt en donnant naissance à son second fils, Binyamine. Elle est enterrée au bord de la route, près de Beth Lé’hem.

Réouven perd son droit d’aînesse en commettant une indiscrétion par rapport à la vie intime de son père.

Yaakov arrive à ‘Hévron, chez son père, qui meurt plus tard, à l’âge de 180 ans (Rivkah est morte avant le retour de Yaakov).

La Paracha se conclut par le décompte détaillé des femmes, enfants et petits-enfants d’Essav, l’histoire du peuple de Séir au sein duquel s’installe Essav et par la liste des huit rois qui dirigent Edom, la terre des descendants d’Essav et de Séir.

La rivière et les cruches

Certains d’entre nous sont dotés, dans toutes leurs activités quotidiennes, d’un sens pratique. D’autres sont plutôt visionnaires. Le judaïsme présente également ces deux approches. Etre visionnaire consiste à aspirer à la transcendance et à l’inspiration. Et le chemin de la pratique passe par l’observance concrète des Mitsvot (commandements de D.ieu).

Le Juif visionnaire méditera sur l’infinie grandeur de D.ieu et sera imprégné d’un amour illimité pour Lui. Il tremblera de crainte et se délectera dans l’extase. Il aspirera à une élévation spirituelle et se délectera dans la transcendance de son âme.

Rendre cette vision réelle et concrète est l’approche pratique. Quand l’amour pour D.ieu trouve sa concrétisation dans l’accomplissement de Sa volonté, la vision a trouvé son expression tangible. En étant visionnaires, nous trouvons de la gratification. Par les Mitsvot, c’est D.ieu Qui est satisfait.

Il est vrai que les deux approches sont nécessaires, mais c’est à nous qu’il revient de reconnaître celle qui représente les moyens et celle qui en est la fin. Etre visionnaire est prestigieux mais ce que D.ieu désire le plus est que nous nous attachions aux détails.

Traverser la rivière

Dans la Paracha Vayichla’h (Beréchit 32 : 4- 36 :43), nous lisons la façon dont Yaakov et sa famille traversent la rivière de Yabok. Yaakov met un pied sur chaque rive afin de former un pont humain et il transfère ses possessions d’une rive à l’autre.

Réalisant qu’il a oublié quelques objets peu importants, il choisit de laisser sa famille et ses possessions derrière lui et de partir à la recherche de ces objets perdus. Et la Torah de nous signaler qu’à ce moment, « Yaakov resta seul » sur l’autre côté de la rivière.

Le Midrach suggère qu’en insistant sur la solitude de Yaakov, la Torah indique qu’il était alors comparable à D.ieu. Tout comme D.ieu est glorifié et seul, ainsi se trouvait alors Yaakov.

Comment Yaakov put-il atteindre cet état comparable à celui de D.ieu ? Ce n’était pas par une extase spirituelle ni par une inspiration méditative mais par l’attention qu’il porta aux détails. Il avait oublié de simples cruches et il revint sur ses pas pour les récupérer.

Quelle est la signification de ces cruches ? Pour répondre à cette question, il nous faut tout d’abord comprendre la raison de son séjour chez son oncle Lavan et la rencontre qu’il fit, par la suite, avec son frère Essav.

La maison de son oncle et la compagnie de son frère n’étaient certainement pas propices à une élévation spirituelle personnelle. Mais Yaakov n’était pas là pour réaliser son propre programme mais pour réaliser le programme de D.ieu.

La révélation d’une aura

Bien que D.ieu soit transcendant, Il projette une aura de Sa présence dans le monde. Mais elle reste cachée et ne peut être dévoilée au genre humain. Les Patriarches et leurs héritiers furent chargés de révéler cette aura, par la propagation de la connaissance divine et de l’observance des commandements de D.ieu.

Il revint à Yaakov de dévoiler cette lumière divine cachée dans les maisons de Lavan et d’Essav. Chaque objet que touchait Yaakov était utilisé pour le service de D.ieu. C’est ainsi qu’il élevait ces objets matériels à un niveau supérieur. Il révélait la lumière divine enfouie en eux et réalisait ainsi leur potentiel divin.

Quand il traversa la rivière et qu’il prit conscience qu’il avait oublié certains objets de l’autre côté, il revint sur ses pas pour les reprendre. Il savait qu’en cas contraire, la lumière divine qu’ils contenaient resterait à jamais prisonnière, dans l’environnement impur de la maison de son oncle.

Prendre les circonstances en considération

Après avoir passé vingt ans en exil, Yaakov revenait enfin chez lui. Pendant cette longue période, il avait été constamment de service, toujours conscient de sa mission. Il ne fait aucun doute que l’âme de Yaakov languissait l’atmosphère toute de pureté de la maison de ses parents, les saints Its’hak et Rivkah.

Traverser la rivière représentait une avancée importante dans cette direction, une traversée métaphorique de l’impureté vers la sainteté. Yaakov quittait l’approche pragmatique du devoir pour se diriger vers la voie visionnaire de la transcendance. L’on aurait pu s’attendre à ce qu’il se précipite de l’avant et n’hésite aucunement.

Mais, en traversant la rivière, il s’arrêta. Pourrait-il être consumé par l’inspiration et ne pas succomber à ses tentations ? Pourrait-il vivre dans un monde de visionnaire et continuer son engagement dans le devoir du respect des détails ?

Il s’agit peut-être ici de l’une des raisons pour lesquelles Yaakov enjamba la rivière, gardant un pied fermement planté sur la rive pratique et l’autre planté avec appréhension sur la rive du visionnaire qu’il serait. Il fit passer sa famille et ses possessions au-dessus de la démarcation et était maintenant sur le point de rejoindre, lui-aussi, l’autre rive. Consumé par le désir mais rongé par l’appréhension, Yaakov passa, avec hésitation de l’autre côté.

Mais soudain il se rappela qu’il avait laissé quelques objets sur la première rive. A ce moment précis, il réalisa que l’avenir se jouait là. Les Hôtes des Cieux s’étaient rassemblés pour voir quelle direction il emprunterait. Il savait qu’il devait agir. Il revint alors sur la rive qu’il allait quitter et partit chercher ses objets.

Finalement, il traverserait la rivière, mais pas avant d’avoir démontré qu’il pouvait trouver un équilibre entre les deux mondes.

Le Coin de la Halacha

 A partir de quel âge peut-on amener les enfants à la synagogue ?

Il est recommandé d’habituer les enfants, dès leur plus jeune âge, à répondre Amen quand on prononce une bénédiction : nos Sages déclarent que, dès que l’enfant est capable de répondre ainsi, il a une part dans le Monde Futur.

On n’amène pas à la synagogue des enfants susceptibles de courir partout et de déranger ainsi les fidèles ; au final, ce serait d’ailleurs un mauvais service rendu à l’enfant lui-même car on ne lui aura pas assez expliqué qu’il doit respecter la sainteté de l’endroit. Si le père ne se sent pas capable d’obliger l’enfant à bien se conduire, il est préférable qu’il garde l’enfant à la maison ou qu’il ne vienne qu’à la fin de la prière.

A la synagogue, on habituera l’enfant à répondre au Kaddich et autres bénédictions. Le père prend l’enfant sous son Talit (châle de prière) pour la bénédiction des Cohanim. Progressivement, on pourra emmener les enfants à la synagogue en les encourageant à prier. Dans certains offices, on prévoit une salle attenante avec un mini-office pour les enfants avec des moniteurs dévoués qui distribuent des friandises à ceux qui se conduisent bien.

(d’après Rav Yossef Ginsburgh – Si’hat Hachavoua N° 1818)

Le Recit de la Semaine

 « Partout – sauf en Russie ! »

En 1998, jeunes mariés, Rav Chnéour Zalman et Miriam Zaklos avaient décidé de partir en Chli’hout pour répandre le judaïsme quelque part dans ce vaste monde. « N’importe où - mais pas en Russie » avait cependant tenu à préciser Miriam. En effet, la Russie, c’est loin de tout (c’est-à-dire des parents de l’un et de l’autre), il fait froid, c’est trop difficile, il faut apprendre la langue… Cependant, des amis leur suggérèrent de rencontrer Rav Berel Lazar, le Grand-Rabbin de Russie et Chalia’h en chef dans ce pays où il officie depuis 1989. Celui-ci leur parla de Novossibirsk, la grande ville capitale de la Sibérie - ni plus ni moins… « Non, s’écria Rav Zaklos, ni pour moi ni surtout pour ma femme ! »

Mais Rav Lazar leur conseilla d’aller visiter la ville - il prenait en charge tous leurs frais - afin qu’au moins ils se fassent une idée claire de ce dont il parlait. Ils acceptèrent et prirent l’avion pour Novossibirsk (3ème plus grande ville de Russie) afin de passer la fête de Pourim avec la communauté. Là, ils trouvèrent exactement ce qu’ils avaient redouté : une température de 22 degrés en-dessous de zéro, une synagogue en ruines fréquentée essentiellement par des clochards, pratiquement sans eau courante… Bref, ils organisèrent aussi bien que possible un semblant de fête pour Pourim avec la communauté locale et s’apprêtèrent à repartir.

Deux jours avant leur retour à Moscou (d’où ils pensaient revenir en Israël), la « synagogue » fut vandalisée : des délinquants locaux avaient fait irruption, avaient jeté les livres saints parterre, avaient profané ce qu’ils pouvaient et avaient laissé des graffitis antisémites sur les murs, promettant de recommencer…

Au milieu de la nuit (en tenant compte du décalage horaire entre la Sibérie et Moscou), Rav Lazar reçut un coup de fil affolé lui annonçant la nouvelle. Fin connaisseur de la mentalité du pays, il demanda à Rav Zaklos de tout mettre en œuvre pour alerter la presse - sans quoi le gouvernement n’interviendrait pas. Comme convenu, Rav Zaklos se rendit devant la synagogue quand les journalistes arrivèrent et, sans aucune préparation préalable, se retrouva face aux micros et aux photographes.

- On me demanda tout d’abord si j’étais le rabbin de la ville… Je répondis que je n’étais là que depuis peu de temps mais que je serai effectivement le rabbin de Novossibirsk ! J’exigeais avec fermeté de la municipalité qu’elle retrouve les coupables afin que ceci ne se reproduise plus jamais. Et pour rassurer la communauté qu’elle avait toute sa place dans la cité, il fallait, n’est-ce pas, construire une autre synagogue, plus spacieuse, mieux protégée, plus confortable, avec un centre communautaire et des structures éducatives…

Le reportage sur le vandalisme de la synagogue de Novossibirsk fut diffusé de nombreuses fois dans toute la Russie et même à l’étranger. Entretemps, les Zaklos retournèrent en Israël : toutes leurs familles, tous leurs amis les félicitèrent pour leur nouvelle nomination en Sibérie…

Très impressionnés par le cours des événements, les Zaklos réalisèrent que « le monde entier a décidé que nous devenions les Chlou’him officiels de Novossibirsk ! Nous n’avons plus le choix que d’y retourner pour de bon ! C’est comme si le Rabbi lui-même affirmait que c’est là-bas que nous devons nous installer ! »

Les obstacles furent nombreux : le froid extrême bien sûr, l’antisémitisme virulent et surtout les hésitations. Mais ce fut justement tous ces obstacles qui stimulèrent le jeune couple à régénérer le judaïsme et à allumer la flamme dans cette grande ville gelée.

En 2013, ils inaugurèrent officiellement le nouveau centre communautaire, de proportions énormes, bien différentes de la structure dilapidée qu’ils avaient trouvée à leur arrivée. Synagogue, jardin d’enfants, école juive, Mikvé, magasin cachère… on trouve tout maintenant à Novossibirsk ! La Sibérie n’est plus ce désert effrayant qu’avaient affronté les grands-parents de ce couple de Chlou’him quand ils avaient été emprisonnés dans les camps du Goulag au siècle dernier…

« La difficulté elle-même est un signe qu’il faut persévérer et transformer les circonstances en tremplin pour le positif ! ».

www.chabad.org

Traduit par Feiga Lubecki