Semaine 17

  • Emor
Editorial

Pour un nouveau départ

Pour un nouveau départ Notre rapport au temps est sans doute très révélateur de ce que nous sommes. Ainsi, on peut voir des hommes qui perçoivent le passé et les événements qu’il contient – positifs ou négatifs – comme des éléments à jamais gravés dans la pierre la plus dure, comme des choses que l’on peut oublier mais qui resteront, malgré tout, présentes au plus profond de la conscience et, par conséquent, au cœur des jours à venir. D’autres hommes font un choix différent : celui de considérer que le passé se limite à lui-même, qu’il est, par nature, enfoui bien loin en arrière et que, par conséquent, il ne peut avoir la moindre influence sur nos décisions futures ou notre vie présente. Faut-il donc vivre avec le passé chevillé à nous ou avec le seul souci de l’éphémère ? C’est une manière de se demander ce qui fait l’homme : sa capacité à assumer sa propre histoire ou son aptitude à l’oublier ? Lorsque le jour de Pessa’h Cheni – le deuxième Pessa’h – revient, il nous apporte aussi une réponse. Souvenons-nous : D.ieu avait ordonné de célébrer la fête de Pessa’h, d’offrir le sacrifice voulu, un événement spirituel essentiel. Et certains n’avaient pas pu le faire pour diverses raisons, dont ils étaient eux-mêmes souvent responsables. Puis ils vinrent voir Moïse. « Pourquoi cela nous serait-il retiré ? » supplièrent-ils. Leur demande était d’une sincérité absolue, elle s’éleva avec force jusqu’au Trône céleste et la réponse retentit : « Ils auront une deuxième chance. » Le deuxième Pessa’h – un mois après le premier – était né. Ce jour, qui tombe cette semaine, nous livre ainsi une clé. Le passé existe bien et nous n’avons d’autre choix que de l’assumer mais ses conséquences ne sont jamais inébranlables. Il est, de fait, entre nos mains et nous avons le pouvoir de lui donner un autre sens. Les défaillances ne sont pas irréversibles. Elles peuvent être un nouveau point de départ, comme une base pour une nécessaire reconstruction, plus grande, plus belle, plus solide. Tout cela est vrai pour chacun. L’insatisfaction est bien souvent le lot de celui qui choisit la conscience de préférence à l’illusion. Le deuxième Pessa’h relève que ce sentiment peut et doit être positif. Car il détient une puissance immense. Recommencer, refaire, rectifier, pour un avenir meilleur. A présent, tout est possible.
 
Haim Nisenbaum

Etincelles de Machiah

«Diffuser les sources»

Comment est-il possible de dire que, précisément dans notre génération – une génération imparfaite – il doit y avoir l’œuvre de «diffusion des sources de la ‘Hassidout à l’extérieur» ? A l’approche de la Délivrance future, le mode précédent de service de D.ieu – sans cette «diffusion des sources à l’extérieur» – présente un manque. Aussi, c’est dans ces dernières générations, et particulièrement dans la nôtre, que notre effort doit se déployer dans ce sens avec encore plus de puissance et d’énergie. (D’après un commentaire du Rabbi de Loubavitch – Chabbat Parchat Toledot 5744) H.N.

Vivre avec la Paracha

Emor

Nos Sages expliquent que le verset ouvrant la Paracha signifie : lehazhir guedolim al haketanim, ce que l’on traduit littéralement par «pour avertir les plus âgés à propos des enfants». Cela implique qu’un parent doit prendre la responsabilité de l’éducation de ses enfants. Nous ne devons pas attendre passivement que leur éducation s’accomplisse naturellement. Cela n’aura pas lieu. Si nous n’investissons pas d’efforts personnels, et si nous ne faisons que simplement nous reposer sur les professeurs et l’école, le caractère de nos enfants n’évoluera pas. C’est dans cet esprit que le Rabbi Rachab (Rabbi Chalom Dov Ber de Loubavitch) enseignait que tout comme la Torah requiert que nous mettions chaque jour les Tefiline, elle exige également que nous passions une demi-heure par jour à réfléchir à l’éducation de nos enfants. Le terme lehazhir renferme également une autre allusion. Zohar, sa racine, signifie «resplendissant» ou «splendeur». Nous pouvons en conclure qu’en travaillant à l’éducation de nos enfants, notre propre âme scintillera dans la splendeur. Car, le moyen le plus efficace que possèdent les parents pour donner une bonne éducation à leurs enfants est l’exemple, leur exemple. Quand un parent manifeste, continuellement et systématiquement, une qualité dans sa conduite, il est fort probable que son enfant la reproduira. C’est ainsi que si nous voulons influencer nos enfants, que nous désirons leur inculquer certaines vertus, des valeurs et des traits de caractère positifs, ils doivent tous briller dans notre propre personnalité. L’effet est réciproque. En entreprenant de communiquer avec nos enfants et de leur apporter des enseignements, nous grandissons nous-mêmes. Les traits de caractère que nous jugeons importants et que nous cherchons donc à leur transmettre se renforcent et s’accentuent en nous-mêmes lorsque nous cherchons à les partager avec autrui. *** Un jour, Rav Sim’ha Bounim de Pchis’ha envoya ses ‘hassidim auprès d’un aubergiste, vivant dans un village lointain. «Vous allez apprendre de lui quelque chose de très important» leur promit-il. Quand les ‘hassidim arrivèrent à l’auberge, leur hôte, tout joyeux, leur concocta un festin. Mais ils hésitaient un peu à prendre ce repas. Ils étaient très méticuleux en matière de Cacherout. L’aubergiste observait-il un tel niveau ? L’odeur appétissante de la nourriture embauma l’atmosphère et leur hésitation devint très douloureuse. Pouvaient-ils consommer ce repas ? Ils discutèrent de la question en chuchotant. L’aubergiste avait l’air d’un homme simple. Combien avait-il étudié ? Se pouvait-il qu’il connût toutes les lois ? Il parlait naturellement avec ses employés non-juifs. Peut-être cela impliquait-il qu’il fraternisait également avec eux en dehors du travail ? L’aubergiste avait remarqué leurs chuchotements. «‘Hassidim, leur dit-il, vous faites très attention à ce que vous portez en bouche mais peut-être devriez-vous exercer le même talent à veiller à ce qui sort de vos bouches !». «Emor», le nom de notre Paracha, signifie «parle», soulignant la force de nos paroles. Nos Sages statuent : «le lachone hara (la médisance) tue trois personnes : celui qui parle, celui qui écoute et celui dont on parle». Il est aisé de comprendre pourquoi celui qui parle et celui qui écoute souffrent. Ils se sont rendus coupables d’une grave transgression. Mais celui dont on parle ? Pourquoi devrait-il être affecté ? Pour répondre à cette interrogation, les mystiques de la Kabbale expliquent que parler de traits négatifs d’une personne provoque leur expression. Bien que l’individu ne soit pas même conscient que l’on parle de lui, le fait que l’on discute de ses défaillances attise leur révélation. Le contraire est également vrai. Mentionner intelligemment, finement, les qualités de quelqu’un, et en chacun il y a un réservoir infini de bien, facilitera l’expression de ces qualités dans la conduite de la personne. Les perspectives Ces concepts s’appliquent à tous les sujets positifs et en particulier au but ultime de notre Service Divin : l’Ere de la Rédemption. Parler beaucoup de Machia’h et de la Rédemption, en faire une réalité dans notre esprit et dans l’esprit de ceux que nous rencontrons, aidera à leur révélation et leur accomplissement. Outre le fait que cela génère un processus de discussions d’ordre spirituel, parler de la Rédemption, peut également avoir un effet plus tangible. Chez bon nombre de personnes, la Rédemption n’occupe aucune place dans leur vie et dans leurs perspectives. Certains peuvent l’accepter, comme une croyance spirituelle mais ils ne l’attendent pas comme ils le font pour les prochaines vacances. Elle ne paraît pas réelle. Et donc, ils n’en parlent pas. Quand, par contre, Machia’h et la Rédemption constituent des forces dominantes dans sa vie, la personne en parle et en discute avec les autres. Ces derniers répondent avec intérêt car nous attendons tous un monde meilleur. Et nous avons tous confiance que D.ieu peut déverser sur nous des bénédictions matérielles et spirituelles pour rendre ce monde meilleur. C’est ce que nous désirons véritablement. Ainsi, lorsque nous entendons parler de la Rédemption avec sincérité, conviction et réel espoir, nous écoutons et rendons ces perspectives plus concrètes, plus réelles.

Le Coin de la Halacha

Qu’est-ce que Lag Baomer (cette année dimanche 28 avril 2013) ?

Le 33ème jour du compte de l’Omer rappelle la Hiloula (décès) de Rabbi Chimone Bar Yo’haï qui avait demandé que cette date soit célébrée comme un jour de joie (puisqu’il y avait achevé de façon parfaite sa mission sur terre). Ce jour marque une pause dans la période de deuil instituée à cause d’une terrible épidémie qui avait frappé les disciples de Rabbi Akiba). - on ne récite pas les prières de Ta’hanoune (supplications), même pas la veille. - nombre de gens ont la coutume de se rendre sur le tombeau de Rabbi Chimone Bar Yo’haï à Mérone, près de Tibériade en Galilée ; on y procède à la première coupe de cheveux des garçons qui ont atteint l’âge de 3 ans depuis Pessa’h. - on organise des réunions ‘hassidiques joyeuses. - on a la coutume de manger des caroubes, en souvenir de ces fruits dont se nourrissaient Rabbi Chimone et son fils Rabbi Eléazar quand ils se cachaient dans une grotte à cause des Romains. Certains ont aussi la coutume de manger des œufs durs dont la coquille serait devenue marron durant la cuisson. - on donne davantage de Tsedaka (charité). - les enfants sortent et défilent tous ensemble fièrement dans la rue avec des drapeaux et des pancartes les encourageant à étudier la Torah et accomplir les Mitsvot : le but de la descente de l’âme dans le corps est de «marcher», d’avancer dans la vie. Ces défilés donnent chaleur et vitalité à l’étude formelle et prolongent l’enthousiasme des enfants dans leur éducation. - Lag Baomer est un moment propice pour prier pour la naissance d’enfants et leur bonne éducation. F. L. (d’après Hamitsvaïm Kehala’ha)

De Recit de la Semaine

Le dernier dollar

Durant plusieurs années, le Rabbi de Loubavitch passa de longues heures, debout devant son bureau, le dimanche matin, à distribuer à des milliers de gens un billet d’un dollar à remettre à la Tsedaka (charité). De plus en plus de personnes profitaient de ces moments privilégiés pour poser des questions au Rabbi qui répondait très brièvement mais de façon précise. Ce dimanche 26 Adar I (1er mars 1992), la queue semblait interminable. Le secrétaire du Rabbi, Rav Groner, raconta par la suite que, contrairement à son habitude, le Rabbi avait demandé plusieurs fois s’il y avait encore beaucoup de gens qui devaient passer devant lui (le lendemain, le Rabbi subissait une grave attaque cérébrale dont les séquelles devaient l’emporter deux ans et demi plus tard). Parmi les nombreux Juifs qui défilèrent ce jour-là au 770 Eastern Parkway (la synagogue du Rabbi à Brooklyn) se trouvait Reb Israël Sussman, avocat rabbinique israélien habitant à Bnei Brak. Ce n’était ni un ‘Hassid ni un fils de ‘Hassid comme il se définissait lui-même puisqu’il appartenait plutôt à la mouvance dite lituanienne du judaïsme orthodoxe : comment en était-il venu à demander une bénédiction au Rabbi ? Après son mariage, Rav Sussman avait dû abandonner ses études talmudiques pour entrer dans le monde du travail et il y avait, D.ieu merci, connu une certaine réussite. Néanmoins, cette situation ne le satisfaisait pas vraiment car il regrettait de ne pas disposer de suffisamment de temps pour continuer à étudier de façon intense et sérieuse. Un de ses amis lui conseilla alors «d’adopter» un jeune homme qui se consacrerait entièrement à l’étude de la Torah : si Rav Sussman procurait à un jeune érudit les moyens financiers nécessaires pour vivre, le mérite de son étude lui reviendrait en partie. Ce genre d’association a d’ailleurs toujours fait partie de la société juive puisqu’on la retrouve déjà décrite dans la Torah : la tribu de Zevouloun voyageait et entretenait des relations commerciales dont elle partageait les bénéfices avec la tribu de Issa’har dont les hommes étaient réputés pour leur érudition et leur étude approfondie des textes. Séduit par cette idée, Reb Sussman la soumit à Rav Aharon Leib Steinman qui, après réflexion, lui proposa de subvenir aux besoins d’un jeune homme prometteur, Rav Chmouel Yitshak Gad Yudaikin, capable d’étudier durant de longues heures mais qui était obligé d’envisager d’enseigner afin de gagner sa vie. Ce descendant du célèbre Gaon de Vilna rédigea par la suite de nombreux livres sur le Talmud avec l’approbation de nombreux Rabbanim orthodoxes de toutes tendances. Dès qu’il fit connaissance de cet érudit, Rav Sussman lui proposa un salaire confortable mais celui-ci ne désirait guère profiter de la situation et ne demanda qu’une modeste contribution pour couvrir ses besoins basiques. Grâce à cette bourse, Rav Yudaikin put étudier jour et nuit, consacrant néanmoins une heure par jour à répondre aux différentes questions que lui posaient des étudiants sur le Talmud. Un soir, avant que Rav Sussman n’entreprenne un voyage d’affaires à New York, une de ses parentes le contacta : «Je sais que vous partez à New York pour affaires mais je vous en supplie : allez demander pour moi une bénédiction au Rabbi de Loubavitch ! On vient de me découvrir «la maladie» (D.ieu préserve) ! Or je suis enceinte et les plus grands médecins me conseillent de mettre immédiatement un terme à ma grossesse car l’embryon ne supportera pas le traitement. Et même s’il devait naître en bonne santé, il serait bien vite orphelin, à D.ieu ne plaise ! » Ému aux larmes, Rav Sussman accepta et c’est ainsi qu’il se présenta devant le 770 et fit lui aussi la queue ce jour-là. Quand arriva son tour, alors que les secrétaires le suppliaient de ne pas faire perdre de temps au Rabbi, il trouva néanmoins la force de brièvement demander une bénédiction pour cette parente. Le Rabbi ferma les yeux un instant – et pour Rav Sussman, c’était comme s’il allait consulter les mondes supérieurs – puis le Rabbi affirma : «Elle est malade mais pas de cette terrible maladie ! Qu’elle demande aux médecins de chercher une autre piste !» Stupéfait, Rav Sussman réfléchit : comment le Rabbi pouvait-il parler ainsi alors que lui avait vu les radios, les analyses, les diagnostics des plus grands spécialistes… Le Rabbi continuait : «Ce n’est pas ‘la’ maladie et donc la seconde question – mettre ou non un terme à la grossesse – n’est pas d’actualité ! Elle mettra au monde un enfant en bonne santé ! » Rav Sussman se précipita vers le téléphone le plus proche et raconta en détail à sa parente ce que le Rabbi avait déclaré. Elle remarqua que, justement ce jour-là, elle s’était sentie mieux ! Immédiatement, elle demanda aux médecins de procéder à d’autres analyses : effectivement, même la plus grande spécialiste reconnut que les résultats étaient absolument différents des précédents et même encourageants, ce qui ne s’était jamais produit auparavant dans ce genre de cas ! Quelques mois plus tard, la patiente mettait au monde un enfant sain et vigoureux ! Il fallut que Rav Sussman lui-même aille expliquer à cette spécialiste comment il avait obtenu une bénédiction et un conseil du Rabbi. Ébranlée dans ses convictions les plus intimes, la spécialiste remarqua : «D.ieu existe !» Rav Sussman raconta tout cela à son «associé», Rav Yudaikin. Celui-ci, intrigué, décida alors en toute honnêteté d’étudier la ‘hassidout en profondeur et publia par la suite plusieurs livres de commentaires ‘hassidiques et même un commentaire de plus de 900 pages sur le Tanya. L’association entre Zevouloun et Issa’har avait été parfaite ! M. Herrman – Michpa’ha Hassidit n° 1503 Traduit par Feiga Lubecki